Traduire/Translate



Affichage des articles dont le libellé est ANONYME Les Récréations Hermétiques *. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est ANONYME Les Récréations Hermétiques *. Afficher tous les articles

ANONYME Les Récréations Hermétiques (XIXème siècle). *


Livre de la Sainte Trinité, XVe siècle


LES RECREATIONS HERMETIQUES


Anonyme, XIXème siècle (vers 1820 ?)


Suivi des 

SCHOLIES

du même auteur anonyme

 Folios 1039 à 1054 du recueil de manuscrite côté Ms. 362 à la bibliothèque centrale du Museum dHistoire Naturelle



Les sciences éprouvent comme les choses les vicissitudes du temps, et dégénèrent plutôt que d’acquérir de l’accroissement. Les hommes à systè­mes, accueillis de toutes parts, ont semé le désor­dre dans le vaste champ de l’imagination, et les fleurs les plus bizarres en ont été le produit : ces fleurs ont pris enfin une telle faveur que les meil­leurs livres, les plus beaux discours sont réputés sans valeur, s’ils n’en sont ornés.
La science dont toutes les autres dérivent, celle de la Nature, est tombée dans un tel discrédit, que l’on frappe aujourd’hui de ridicule tous ceux que l’on y sait livrés.
Au moyen des lois de l’affinité, on prétend résoudre tous les problèmes ; les Eléments sont ou multipliés ou anéantis ; et ceux qui les admettent sans restriction sont placés, avec ceux qui en ont traité, au rang des ignorants, ou des hommes hors de sens.
Sans repousser les affinités, bases de la nouvelle Philosophie chimique, je les crois du moins inutiles au but qu’un véritable ami de la vérité se propose d’atteindre. J’entends parler ici de la connaissance des causes premières sur lesquelles toute science doit s’asseoir, et qu’on affecte de mépriser comme certain Renard de la Fable, qui faisait fi des raisins qu’il ne pouvait prendre : au surplus ces lois de l’affinité que les savants modernes font tant valoir, bien qu’elles ne conduisent point à la source de notre admirable fontaine de vie, sont loin d’être l’objet de nouvelles découvertes : j’en appelle à tous ceux d’entre eux qui ont de la bonne foi ; et étaient du moins reconnues par le fait, quand elles ne l’étaient pas encore par les mots.
Les Eléments ont un Centrum Centri que tous les yeux ne peuvent apercevoir ; et ils ont de plus un Centrum Commune dont les prétendus savants n’osent approcher, crainte de dévoiler leur turpitude (la lumière).
Cette chaleur caustique, accompagnée de lumière, que l’on appelle communément feu, n’est pas l’Elément de ce nom, dont les sages ont voulu parler. On prend en cette circonstance les effets pour la cause, et on va plus loin que les rhéteurs, qui prennent au moins la partie pour le tout.
Le feu est un fluide éminemment subtil, pro­cédant directement de la lumière et que l’on nomme, tantôt Electrique, tantôt Galvanique ou Magnétique etc., suivant ses diverses modifications, ou plutôt, c’est la lumière elle-même dérivée de sa source et dont elle demeure détachée. Il n’est ni froid ni chaud, et la chaleur ou le froid ne sont point des corps, quoi qu’en dise M. Azais, mais de simples effets du mouvement ou du repos.
Le mouvement seul produit la  chaleur avec tou­tes ses conséquences bonnes ou mauvaises, ce dont chacun est en état de faire l’application ; et le feu en raison de sa plus grande subtilité, est aussi propre à recevoir l’impulsion et à la commu­ter aux autres corps.
L’Air, l’Eau et la Terre ne sont que les conséquences immédiates et successives de la formation du feu. La Lumière détachée de son foyer, accumulée par perte de mouvement et refoulée par une nouvelle et continuelle émission de sa substance, s’est donnée à elle-même différentes formes dont nous avons fait la distinction. Dans le langage, les plus simples de ces formes ont été appelées Elémentaires.
La Lumière, principe de vie et de mouvement, peut être considérée comme l’acte unique de la création ; tout le reste n’en est que la conséquence. C’est ce qu’a voulu démontrer Hermès, lorsqu’il dit dans sa Table d’Emeraude : « Ce qui est dessus est semblable a. ce qui est dessous, et ce qui est des­sous est semblable à ce qui est dessus, pour faire au moyen de ces deux choses, le miracle d’une seule chose. »
Le Tout en toutes choses de B. V. n’est qu’une citation abrégée de cette proposition et de la vérité qu’elle renferme que tous les sages de l’antiquité ont reconnue, l’Univers signifiant l’unité retournée ou renversée en a reçu sa dénomination. Je puis citer encore à l’appui de mon assertion, l’Evangile de saint Jean, où il est dit : « la lumière était dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas emprise » ; car son application morale ne fait que justifier le fait qui lui a servi de base.
Les substances gazeuses et aériformes sont de nature chaotique plutôt qu’élémentaires, et s’inver­sent facilement en l’Élément dont elles se rapprochent le plus. Les Météores de toute espèce, sans excepter les aérolithes ou pierres d’Air, prennent d’elles leur origine, cependant leur forme est toute aérienne, et fait voir qu’elles sont sous la dépendance de cet Élément ; mais, comme tout ce qui luit n’est pas Or, tout ce qui a la légèreté et l’apparence de l’air, n’est pas air : c’est le Médium dont ces substances tiennent leur forme à qui cette dénomination appartient.
L’Eau, même celle des pluies et de la Rosée, n’est qu’un composé de substances gazeuses auxquelles le feu et l’action de la lumière ont donné la forme d’eau ; mais c’est la forme et non la subs­tance qu’il faut considérer ici comme Élément, or j’entends par forme ce qui en fait le lien, et qui fait aussi celui de tous les corps, même du verre.
La Terre que nous cultivons n’est pas non plus l’Elément que nous lui faisons représenter. Elle n’est au fait qu’un grand amas de débris des corps des trois Règnes dans le chemin de la destruction ; il est vrai de dire qu’elle contient quelques portions de la terre première et élémentaire, car indépendamment de celle que l’eau lui fournit sans cesse, elle en reprend elle-même la forme par sa destruc­tion journalière. Ainsi la fin de toutes choses res­semble à son commencement et la mort devient le principe d’une nouvelle vie : c’est ce que les anciens ont reconnu et expérimenté, et qu’ils nous ont représenté sous la forme du serpent qui mord sa queue, pour en perpétuer le souvenir.
Lors donc que vous lisez quelque traité des anciens sur l’étude de la Nature, n’entendez pas pour élément les substances crues, indigestes et mortifères que je viens de vous signaler, mais recherchez-en le Centrum Centri par quelques procédés ingénieux et de votre propre fonds ; car les sages le veulent ainsi, tant pour empêcher les abus, que la profanation de cette science, au moyen de laquelle la société pourrait être bouleversée et anéantie. Ne craignez donc pas de vous livrer à l’étude de notre science, et employez pour l’approfondir et en connaître les mystères, tous les efforts du raisonnement, puisqu’il n’y a que ce moyen pour sortir du labyrinthe dans lequel vous vous êtes peut-être légèrement engagé. N’attendez surtout aucune preuve de nos dires, car personne ne sera tenté de vous en administrer : je veux parler de cette preuve irrévocable que donne l’expérience mais puisque d’autres l’ont acquise par les seuls moyens que je vous donne, ne désespérez pas du succès ; j’ose même vous le garantir, si vous vous décidez à suivre mes conseils et à ne pas vous en écarter : car je vous enseigne la droite voie et veux vous sortir des pas perdus dont la route est partout semée.
« Retournez les éléments, dit Aristote, et vous trouverez ce que vous cherchez ». Cette proposition, l’une des plus importantes ayant mis les esprits en mouvement, chacun s’est mis à la recherche d’une matière première pour arriver à ce but pensant bien que les Éléments isolés ne pouvaient y conduire, tandis qu’un corps qui en était tout composé, et encore dans son état de simplicité, était le seul qu’on pouvait raisonnablement mettre en œuvre pour chercher le point de perfection. A force de chercher, quelques-uns l’ont enfin rencontré ; mais ne trouvant rien dans la Nature capable de le dissoudre, malgré sa simplicité et ne pouvant en extraire les éléments par aucun autre moyen, ils s’avisèrent de remonter vers leur source commune y ayant puisé, ils vinrent enfin heureusement à bout de leur dessein.
Soyez donc assuré que sans l’eau ignée composée de la pure lumière du Soleil et de la lune, il vous sera impossible de vaincre les nombreux obs­tacles qui se multiplieront encore à vos regards, lorsque vous tenterez le passage de ce fameux Détroit qui conduit à la mer des sages, cette eau que quelques-uns nomment avec raison esprit universel et que l’Anglais Dikinson a suffisamment fait con­naître, est d’une si grande vertu et pénétration, que tous les corps qui en sont touchés, retournent faci­lement à leur premier être.
J’ai déjà fait connaître que ce n’était pas l’eau de pluie ni de Rosée qui convenait à cette opéra­tion, j’ajouterai ici que ce n’est point non plus l’eau d’une espèce de champignon appelé commu­nément Flos Coeli ou Fleur du Ciel et que l’on prend fort improprement pour le Nostoch des anciens, mais une eau admirable tirée par artifice des rayons du soleil et de la lune. Je dirai encore que les sels et autres aimants qu’on emploie pour tirer l’humide de l’air, ne sont bons à rien dans cette circonstance et qu’il n’y a que le seul feu de Nature dont on puisse ici se servir utilement. Ce feu renfermé au centre de tous les corps a besoin d’un certain mouvement pour acquérir cette pro­priété attractive et universelle qui vous est si néces­saire, et il n’y a dans le monde qu’un seul corps où il se trouve avec cette condition, mais il est si commun qu’on le rencontre partout où l’homme peut aller ; c’est pourquoi j’estime qu’il ne vous sera pas difficile de le rencontrer.


(On tirera grands avantages à comparer ce passage où est mis en valeur ce fameux nostoc, aux lignes qu'y consacre Fulcanelli dans son "Mystère des Cathédrales"; ou encore Eugène Canseliet dans son "Alchimie expliquée sur ses textes classiques" et ses "Deux Logis alchimiques"; ou aussi Grassot, dans sa "Lumière tirée du chaos"; ou Pierre Dujols, alias Magophon, dans son "Hypotypose du Mutus Liber"; et enfin Pernety, en divers endroits. - L.A.T.)


M. Bruno de Lansac, auteur du commentaire sur l’ouvrage ayant pour titre La lumière sortant des ténèbres, dit savamment que le feu vit d’air et que c’est aux lieux où l’air abonde le plus qu’il faut chercher le Soufre des sages ; car il appelle cette eau indifféremment soufre ou mercure, d’autant qu’elle contient l’un et l’autre et qu’elle jouit de leurs propriétés. Ce n’est cependant pas tout à fait à la lettre qu’il faut prendre ces paroles. Je recom­mande seulement de suivre attentivement cet auteur lorsque passant en revue les Règnes de la Nature il fait une démonstration précise de l’emploi et de l’utilité de cet élément pour l’entretien de chacun d’eux. Ce chapitre bien médité sera d’un grand secours aux amateurs de la science, et je ne puis trop les engager à en faire l’objet d’une étude particulière.
J’ai dit que la lumière était la source commune, non seulement des Éléments, mais encore de tout ce qui existe, et que c’est à elle, comme à son prin­cipe, que tout doit se rapporter. Le Soleil et les Etoiles fixes qui nous l’envoient avec tant de pro­fusion en sont comme les générateurs ; mais la Lune placée intermédiairement, l’attrempant de son humidité, lui communique une vertu générative au moyen de laquelle tout se régénère ici-bas.
Tout le monde sait aujourd’hui que la lumière que la lune nous envoie, n’est qu’un emprunt de celle du Soleil, à laquelle vient se mêler la lumière des autres astres. La Lune est par conséquent le réceptacle ou foyer commun dont tous les philosophes ont entendu parler : elle est la source de leur eau vive. Si donc vous voulez réduire en eau les rayons du Soleil, choisissez le moment où la lune nous les transmet avec abondance, c’est-à-dire lorsqu’elle est pleine, ou qu’elle approche de son plein : vous aurez par ce moyen l’eau ignée des rayons du Soleil et de la Lune dans sa plus grande force.
Mais il est encore certaines dispositions indispensables à remplir, sans lesquelles vous ne feriez qu’une eau claire et inutile.
Il n’est qu’un temps propre à faire cette récolte des esprits astraux. C’est celui où la Nature se régénère ; car à cette époque l’atmosphère est toute remplie de l’esprit universel. Les arbres et les Plantes qui reverdissent, et les Animaux qui se livrent au pressant besoin de la génération, nous font particulièrement connaître sa bénigne influence. Le prin­temps et l’automne sont par conséquent les saisons que vous devez choisir pour ce travail ; mais, le printemps surtout est préférable. L’été, à cause des chaleurs excessives qui dilatent et chassent cet esprit, et l’hiver à cause du froid qui le retient et l’empêche de s’exhaler, sont hors-d’œuvre. Dans le midi de la France le travail peut être commencé au mois de mars et repris en septembre ; mais à Paris et dans le reste du royaume, ce n’est au plutôt qu’en avril qu’on peut le commencer et la seconde sève est si faible que ce serait perdre son temps que de s’en occuper en automne.
Il faut savoir maintenant que l’influence astrale se fait préférablement sentir vers le Nord ; que c’est vers le Nord que se tourne constamment l’aiguille aimantée, et que c’est aussi vers le Nord que les fluides Electrique, Galvanique et Magnétique portent tous leurs efforts, c’est donc aussi vers cette région que vous tournerez votre appareil, car l’expé­rience a prouvé que de tout autre côté vous ne trou­veriez point cet esprit.
Il faut aussi que le ciel soit pur et qu’il n’ait point de vent, autre que la fraîcheur agitée de la nuit, car sans cela on n’obtiendrait qu’un esprit très faible et incapable d’action.
On peut commencer le travail aussitôt que le soleil est couché, et le continuer toute la nuit; mais, il faut le cesser lorsqu’il se lève, car sa lumière disperse l’esprit, et on ne recueille plus qu’un flegme inutile et nuisible.
Les Philosophes ont tenu jusqu’ici ces choses très secrètes ; ils n’en ont parlé que fort obscurément, et toujours sous le voile de l’allégorie. D’Espagnet, le Cosmopolite et quelques autres ont fait des des­criptions ingénieuses de la saison de printemps.
Nicolas Flamel, pour désigner la région du Nord, a feint un voyage à Saint-Jacques de Compostelle, d’où il est revenu avec un médecin juif converti qui, après lui avoir enseigné les plus gran­des particularités de l’œuvre, mourut à Orléans où il le fit enterrer à Sainte-Croix.
On voit au ciel la Voie Lactée qui court du midi vers le Nord où elle forme deux branches dont la direction est variable en raison du mouvement de la terre, et dont la Boussole suit la variation. Cette voie lactée est appelée vulgairement le Chemin de Saint-Jacques, parce que les pèlerins la désignent ainsi, et qu’elle leur sert de guide pendant la Nuit pour leur grand voyage ; elle est aussi le guide du philosophe Hermétique qui la reconnaît dans le midi où elle prend sa source, et la suit vers le Nord où est son Embouchure. Le médecin juif converti est le Mercure qu’il trouve sur sa route, et qui  comme on le sait, révèle tous les secrets de l'Art,  quand on en est possesseur. Flamel le désigne comme médecin, parce qu’il purge les métaux de leur lèpre et qu’il est vraiment une médecine. Il en  fait un juif converti, parce que la Lumière prend sa source en Orient et qu’il en fait un juste emploi. Enfin, il le fait mourir à Orléans et enterrer à Sainte-Croix pour annoncer sa fixation : ce que la Croix marquant les quatre points Cardinaux de l’atmosphère montre plus positivement. C’est donc un mensonge de l’auteur du livre ayant pour titre Hermippus Redivivus tendant à accréditer son système imbécile, que la citation qu’il a faite du prétendu voyage de N. Flamel et qu’il ose appuyer de la relation qui lui en fut faite par deux Adep­tes se disant ses amis et affirmant sa longue existence.
B.V. fait dire à Adolphe sortant d’un souter­rain à Rome, et tenant à la main le petit Coffret de plomb renfermant la figure parabolique du vieil Adam : « Dans mon extrême ravissement, je regar­dai au midi où sont les chauds lions, et puis je me tournai au Nord où sont les Ours. »
Saint Didier, auteur du Triomphe Hermétique, dans sa Lettre aux disciples d’Hermès, dit que « l’étude de cette science est comme un chemin dans les sables où il faut se conduire par l’Étoile du Nord ».
Cette Etoile a toujours été considérée comme le guide certain de notre philosophie, et c’est elle qui conduisit les bergers à la Crèche où reposait le Sau­veur du monde. Il y a des ouvrages intitulés L’Étoile ou philosophe du Nord, mais l’abus qu’on fait de cet emblème un trop grand nombre d’auteurs pseudonymes, pour se donner du relief et se faire rechercher, l’ont couvert de tant de défaveurs qu’il a beaucoup perdu de son prix.
Sachez toutefois que l’esprit astral étant le père nourricier de la pierre, il en faut recueillir une grande quantité. Cette récolte ne peut se faire en une seule fois, c’est pourquoi on y emploiera tout le temps que durera le travail qui est au moins de trois années ; car il ne faut pas s’en tenir à ce que disent les auteurs sur les temps, leurs discours n’étant que des tissus d’énigmes ou d’allégories dont je donnerai ailleurs l’explication. Revenons au principal Sujet de la Philosophie.
Tous les sages s’accordent à dire, et c’est une vérité incontestable, que l’œuvre se fait d’une seule chose à laquelle on n’ajoute rien d’étranger et dont il n’y a rien à retrancher que les immondices et superfluités. C’est ainsi que s’exprime B. Trévisan ; et son dire qu’il a emprunté aux philosophes qui l’ont précédé, a été soutenu et répété unanimement par tous ceux qui l’ont suivi.
Bien des gens, entendant mal cette unité de la pierre, mettent dans un vaisseau qu’ils nomment un œuf philosophique, une seule matière de leur choix, qu’ils tiennent sur un feu de lampe ou tel autre qu’ils imaginent, et attendent ainsi vainement sa dissolution. D’autres font des amalgames, et ne sont pas mieux avisés. Ils ne font aucun progrès par beaucoup de raisons dont voici les principales :
1)  Ils travaillent sur matière morte ; et quand ce sera sur le véritable sujet de la philosophie, le vase et le feu ne lui sont pas proportionnés.
2) Ils ignorent que depuis le commencement jusqu’à la fin du travail, notre matière est double, je veux dire qu’elle a un agent et un patient sans lesquels il n’y aurait aucune action dans le vaisseau  que l’agent fait office de mâle, et le patient celui de femelle, et que tous les deux ensemble, bien que séparés par leur Nature, ne constituent qu’un seul corps qui est nommé à cet effet Rebis ou deux choses en une.
3) Enfin, leur travail est tout à fait en sens inverse de celui de la Nature ; car ils ne savent ni dissoudre, ni putréfier, ni distiller, ni sublimer, ni aucune de nos opérations. Cependant ils ne laissent pas d’entreprendre, se disant à eux-mêmes : cet œuvre est celui de la Nature à qui nous n’avons besoin que de prêter la main, c’est à elle de l’ache­ver. Marchant ainsi en aveugles, et avec tant de con­fiance, ils ne peuvent manquer de se heurter à cha­que pas qu’ils font dans un si obscur dédale.
Nous lisons dans l’Evangile qu’il ne vient pas de Lys sur des Ronces, ni de figues à la place de raisins; que telle est la semence, et tel sera le fruit; mais qu’un mauvais arbre ne peut produire de bons fruits, et que, pour cela, il doit être coupé et jeté au feu ; mais ces raisons ne les touchent point, et ils n’en sont pas moins persuadés de réussir. Cepen­dant voyant la mauvaise fin de leur travail, ils devraient s’amender et reconnaître leur faute ; mais, bien loin de là, ils l’attribuent à quelque accident qu’ils n’ont pu prévoir, et se remettent avec plus de courage encore à leur sot ouvrage. Mais, laissons ces ignorants s’enfler à loisir de vaines fumées et ne nous occupons plus que du choix d’une matière due et de sa préparation.

Il s’agit moins de passer en revue les substan­ces des trois Règnes, que d’examiner leur composi­tion, pour savoir de quoi elles ont été formées. A la première vue, cette difficulté paraît insurmonta­ble. Elle est grande, à la vérité, mais pas autant qu’on pourrait se l’imaginer ; car :
1) Nous n’avons besoin pour ce travail, ni d’Alambic, ni de Cornues, encore moins de Sels, d’Esprits ardents, acides ou Corrosifs etc.
2) Nous savons au surplus que toutes les choses de ce monde ont une même origine, et qu’elles ne diffèrent entre elles que par le mélange des Élé­ments, mais tels que je les ai dépeints plus haut.
Il ne nous reste plus en troisième lieu qu’à rechercher exactement le point de leur formation.
Considérez que le Ciel et la Terre ont premiè­rement existé ; que le Ciel servant d’agent ou de mâle, et la Terre de patient ou de femelle ont donné naissance à toutes choses. Cependant ils n’étaient pas distincts l’un de l’autre, et ils ne for­maient d’abord qu’une masse ténébreuse et abo­minable ; mais la lumière en ayant été séparée, et les deux en ayant été établis, la masse s’ébranla et donna signe de vie. Les Éléments furent formés, l’Univers et tout ce qu’il renferme parut ensuite ;et cet ordre si admirable de choses subsiste depuis cette époque, et demeurera ainsi jusqu’à ce qu’il plaise au Souverain Médiateur de le changer.
La vie telle qu’on voudra la considérer, n’est qu’un combat de deux substances, ou un échange continuel de lumière et de ténèbres, l’une de ces substances prend alternativement la place de l’autre, st fait tantôt fonction de mâle et tantôt de femelle ;de manière que quant il plaît au divin auteur, tout se change en une pure lumière ou tout retourne dans les ténèbres cimmériennes, ce qui fait voir que la lumière et les ténèbres ne sont qu’une même chose, changée de forme et de valeur par le déve­loppement ou le resserrement de la substance, que de là provient un attrait mutuel d’où ressort, avec le mouvement, l’inversion élémentaire de la subs­tance.
Qui habet aures audiendi, audiat
Considérez maintenant que de la même manière et de la même matière dont le monde a été créé, l’œuvre des sages est mis au jour, et que c’est pour cette raison qu’il a reçu le nom de petit monde ou Microcosme. Ainsi, je vous ai dit en peu de paro­les tout ce que vous avez à faire pour cette grande entreprise.
Prenez donc la terre première qui n’est qu’une pure lumière environnée de ténèbres, et réduisez-la en ses principes avec la pierre arrachée sans mains du sommet de la montagne, afin de reconnaître en elle trois substances distinctes qui sont le sel, le sou­fre et le mercure, lesquelles étant adroitement con­jointes avec les deux dont la matière est formée, à savoir le Ciel et la Terre, forment une Quintes­sence admirable dont les vertus sont infinies et incompréhensibles.
Cette pierre merveilleuse apparut en songe à Nabuchodonosor Roi de Babylone, et vint briser et réduire en poudre une grande statue qu’il voyait debout devant lui, et dont la tête était d’or le plus pur, la poitrine, les épaules et les bras d’argent le ventre et les cuisses d’airain, les jambes de fer et  l’argile y était amalgamée avec de la semence humaine, mais qui ne leur était point adhérente, non plus que le fer ne peut être mêlé avec l’argile.
Nabuchodonosor justement effrayé de cette vision, manda tous les mages de son Royaume, et exigea d’eux, sous peine de mort, qu’ils devinas­sent son songe et en donnassent une juste inter­prétation ; aucun d’eux n’en put venir à bout. Il n’y eut dans tout le Royaume qu’un jeune homme nommé Daniel et rempli de l’esprit de Dieu, qui pût satisfaire à sa demande (Daniel, chap. 2, v. 18).
Ce songe peut être appliqué tout entier à l’Œuvre des sages, et lui servir de figure Parabolique. On verra, par exemple, dans les Mages de Baby­lone, la tourbe des faux savants s’efforçant en vain d’entendre la science, voulant néanmoins persuader qu’ils la possèdent, et conduisant dans des sentiers perdus ceux qui se livrent à eux de trop bonne foi :dans Daniel un fils de la sagesse, à qui tous les secrets de la Nature sont connus, et qui peut don­ner une saine et véritable explication.
La statue sera notre Arbre Métallique depuis son sommet jusqu’à sa racine dans laquelle sont encore confondus Saturne, Jupiter et Mercure comme métaux de première origine. Le fer et l’argile mêlés avec de la semence humaine représenteront l’Oeuvre de Nature figuré de main d’homme ; et la Pierre coupée sans mains du haut de la montagne, et venant briser les pieds de la statue et la réduire en poudre impalpable, sera prise ou pour la foudre que lance Jupiter, ou pour la faux de Saturne que vous devez échanger adroitement contre le trident de Neptune, moyennant une certaine clé que je vous donnerai, jusqu’à ce que Pluton s’en montrant jaloux, et soufflant du fond de ses cavernes montre à son tour sa puissance, en desséchant les eaux, et réduisant l’arbre en cendre ou poussière que vous sèmerez et dont il viendra beaucoup de pierres précieuses.
Les Anciens, jaloux de leur secret, ont parlé de la matière sous ses divers aspects, afin de tromper la crédulité des gens avares et des ambitieux qui ne rêvent que puissance et dévastation. Ils ont con­fondu avec le sujet de la philosophie leur première matière qui ne s’obtient qu’après beaucoup de temps et de longs travaux. N’étant nullement par­ticipant de leur envie, j’ai voulu vous faire toucher du doigt ce sujet tant recherché et l’ai mis exprès tout nu devant vos yeux, pour vous dispenser de le chercher plus longtemps. J’espère que vous me saurez gré de ma franchise, et que vous en tirerez le parti le plus avantageux, en vous prévenant toutefois d’ajouter à mes paroles un petit grain de sel, pour vous les rendre plus sensibles.
Ferrare peint ce sujet comme une pierre qui n’est pas pierre, qui est dure et molle, et qui n’est d’aucun prix ; mais si vous voulez m’en croire vous vous attacherez davantage à ce qu’en a dit le comte de Trévise, car il s’est montré moins envieux que personne, ayant peint ce sujet très au long dans son Arca Aperta, et ayant fait une description très étendue des matières qui ne sont pas propres à notre Œuvre, dans un autre ouvrage. Je vous don­nerai ensuite le conseil de l’illustre commentateur de la Lumière sortant des ténèbres, M. Bruno de Lansac : « Choisissez, dit-il, une matière qui ait le brillant métallique », et j’y ajouterai qu’elle ne soit point métal, ni minéral, autrement elle ne ser­virait de rien. Vous saurez au surplus que ce bril­lant n’est que le cachet de la matière et ce qui la décèle aux yeux du sage, et vous prendrez garde de prendre le fruit au lieu de la racine ; car non seulement il est non mûr, mais dans une hypothèse opposée, il ne vous donnerait encore qu’un sauva­geon dont vous ne tireriez aucun parti.
La dissolution est la première chose qu’il vous faut entreprendre, car il faut délier le corps pour mettre les ennemis aux prises. Or le feu et l’eau vous seront ici grandement nécessaires, d’autant que ces éléments sont déjà ennemis de leur Nature et ne demandent qu’à essayer leurs forces.
L’esprit, dont je vous ai parlé plus haut, est un feu vaincu par l’eau dont vous vous servirez à cet effet. Vous en emplirez le Vase de Nature et vous le distillerez à feu très lent pour le déflegmer. Vous trouverez au fond quelque chose de fixe que vous vous garderez d’en retirer. Vous verserez dessus de nouvel esprit dans la même proportion, et vous con­tinuerez ainsi la distillation, jusqu’à ce que le vase n’en puisse plus contenir, et que tout demeure fixe au fond. En continuant le feu au même degré, vous apercevrez bientôt dans votre vaisseau quelque agitation en puissance, mais aussi en acte, et qu’il y ait une splendeur métallique. »
Agitation causée par un petit vent de Sud-ouest laquelle sera suivie d’une pluie fort agréable à la vue. Le vent et la pluie allant toujours croissant vous ne verrez plus dans le vaisseau que comme une mer qui sera de plus en plus agitée jusqu’à ce qu’enfin les éléments pacifiés, tout rentre dans l’ordre de la Nature. Mais le jour a fait place à la Nuit, l’obscurité s’agrandit et le vaisseau est d’un noir parfait. Cette Nuit est la cinquantième, et elle a paru triple aux matelots à cause de la fatigue qu’ils ont essuyée. Le jour commence à poindre, l’horizon est clair et sans nuage ; la journée sera magnifique.
Cette manière de s’exprimer est commune à presque tous les auteurs anciens, et il n’est pas rare de trouver des lecteurs qui prennent ces discours à la lettre. Le vent et la pluie sont pour eux des réa­lités, et leur crédulité embrasse pour eux les plus petits détails de l’allégorie. Celle-ci, que je vais remettre dans le sens droit, leur facilitera l’intelli­gence des autres.
Le vase de Nature est la terre préparée qu’il faut abreuver de son esprit. Elle est dite un vaisseau, et elle l’est en effet, puisqu’elle contient. L’esprit qu’on lui ajoute n’est point une chose étrangère puisque tout est sorti de lui, et que notre terre en est formée ; c’est pourquoi il est dit de faire ren­trer l’enfant dans le ventre de la mère : ce qui ne se peut faire qu’en lui déchirant les entrailles. Il faut aussi que notre terre soit divisée dans ses plus petites parties pour mettre au jour ses grandes richesses, et cela arrivera ainsi, si vous l’abreuvez souvent de son esprit et que vous la laissiez autant de fois dessécher. Dans cette opération, le flegme s’évapore, mais l’esprit demeure et s’incorpore avec la terre qu’il salifie jusqu’à ce que la saturation soit complète ; alors l’esprit qu’on ajoute ne pouvant plus être contenu réagit sur celui que la terre a fixé et l’oblige de se dissoudre, ainsi que ferait le sel ; c’est pourquoi cette dissolution est comparée à une mer ; et parce que l’esprit qu’on ajoute est joint à une humidité altérante et corrompante, il résulte de son mélange un mouvement de fermentation qui est suivi de putréfaction, et par conséquent de régé­nération, parce que la fermentation change les corps de Nature, et dans la putréfaction, ils ne font qu’échanger leurs vêtements contre de nouveaux et d’autant plus riches et brillants, que l’Esprit moteur est d’une origine plus relevée.
Ce que la Matière peut contenir d’humidité, sans la déverser au dehors, voilà la mesure à obser­ver pour les imbibitions, et ce que nous appelons le poids de Nature.
La matière servant de vase, sert également de fourneau, puisque l’esprit que vous y introduisez est un feu naturel qui la cuit et la digère pour me servir, jusqu’au bout, des expressions philosophi­ques.
Il ne faut pas moins de cinquante ablutions ; car chaque ablution jusqu’à la parfaite dessiccation, est comptée pour un jour naturel ou philosophique ; de manière que nos jours peuvent durer une semaine suivant la saison, la qualité et la quantité de matière soumise au travail. Le grand secret des Sages pour abréger le temps, est de diviser la matière, pour que les jours aient moins de longueur.
Quoique nous ne nous servions point de feu vulgaire pour nos opérations, il est néanmoins cer­tain que nous avons besoin d’une température assez élevée pour que l’évaporation puisse se faire et que la matière ne languisse pas, et ne se perde. Il est par conséquent utile et indispensable, pendant l’hiver, et dans le lieu du travail, de faire un peu de feu, mais non assez pour que la matière en soit échauffée, ce qui serait pis que de n’en point avoir ; parce que l’esprit serait chassé et ne pour­rait être remplacé. Il ne faut pas que la tempéra­ture passe quinze degrés de Réaumur (18° C).
Lorsqu’on a ainsi opéré et que la matière se dis­sout, elle noircit à mesure. On ne lui ajoute dans ces divers temps que l’esprit nécessaire pour entre­tenir son feu fermentatif ; et quand la matière com­mence à fermenter, il faut l’abandonner à son pro­pre feu, jusqu’à la blancheur parfaite où elle arrive d’elle-même.
La matière n’est pas liquide comme un Brouet, mais épaisse et noire comme de la poix ou du cirage de bottes ; elle se boursoufle, s’élève dans le Gobe­let, donne des Bulles que l’on compare à des yeux de poisson et qu’il ne faut pas crever, car elles con­tiennent l’esprit animateur.
Après la fermentation, la matière s’affaisse ; elle est alors luisante comme de la poix, et du plus beau noir ; c’est le signe de la putréfaction que l’on nomme tête de corbeau. Elle se dessèche ensuite peu à peu et passe à la couleur gris de cendre. Bientôt un cercle Capillaire de la plus éclatante blancheur paraît autour du vaisseau. Ce Cercle s’élargit de plus en plus jusqu’à ce que le tout soit d’une blancheur parfaite.
Avant que cette blancheur arrive, il paraît quel­ques couleurs sur la matière, parmi lesquelles domine la verte, mais elles ne sont pas très pro­noncées, et ne sont que passagères et de peu de durée. On les compare néanmoins à l’Iris ou arc-en-ciel. Ce n’est que dans les opérations subséquen­tes qu’elles ont un caractère très prononcé.
Vous avez passé en revue, sans vous en aperce­voir, nos différentes espèces de feux, le premier, jusqu’à la fermentation, est appelé bain-marie, ou de mer, parce qu’il n’opère, en quelque façon, qu’une dissolution saline. Le second est appelé cha­leur de fumier, et vous en savez maintenant la rai­son. Le troisième est appelé feu de cendres ; et le quatrième enfin feu de Réverbère. Nous avons encore d’autres espèces de feux, mais qui connaît les premiers, connaît indubitablement tous les autres. D’ailleurs nous les signalerons au passage.
Vous remarquerez ici que ce travail ressemble à celui des jardiniers qui arrosent leurs jardins. Qu’arrive-t-il en cette circonstance ? La terre végétale qui, comme je vous l’ai observé dès le com­mencement, n’est formée que de débris des corps, s’altère et se décompose par sécheresse et humidité récessives, et fournit un sel et un esprit dont la Plante se nourrit par le moyen de l’eau qu’elle absorbe et qui est le conducteur.
Je reviens à la matière blanchie et qui est encore bien éloignée du but où vous devez la conduire.



Néanmoins, la principale serrure est ouverte, il n’y a plus qu’à pénétrer dans le sanctuaire, mais tou­jours avec précaution pour ne point faillir, et être obligé de s’arrêter en si beau chemin.
Cette poudre blanche ou matière régénérée est le Mercure encore enfant, et à qui il faut donner des ailes d’aigle à la tête et aux talons, c’est-à-dire depuis les pieds jusqu’à la tête, pour qu’il puisse voler, et s’élever à la plus haute région qui est le Ciel. Il faut le sublimer autant de fois que dans sa dissolution dans l’esprit astral, il laissera une terre en arrière qui se précipitera et qu’il vous faudra recueillir avec beaucoup de soin. Philalèthe appelle ces sublimations des aigles ; d’autant que le mer­cure acquiert chaque fois une grande subtilité, et il compare la terre que le Mercure jette en arrière, à la queue que laisse le mercure vulgaire derrière lui, tant qu’il n’est pas assez purifié. « Lavez, dit-il votre mercure et le purifiez par sel et vinaigre, jusqu’à ce qu’il ne laisse plus de queue derrière lui, en coulant sur une surface plane. » Nous saurons bientôt ce qu’il entend par sel et vinaigre et nous en avons déjà un aperçu.
Lorsqu’on dissout le Mercure dans l’esprit astral, et qu’on a séparé la terre par décantation et lotion, pour n’en rien perdre, on pose la dissolution dans un lieu frais, et il se fait un dépôt de trois sels savoir, l’un cotonneux, qui nage à la superficie et qui est le mercure ; le second qui est aiguillé et de nature du Nitre, et qui est entre deux eaux ; et le troisième qui est un sel fixe et minéral qui se dépose au fond.
Dans l’état où l’on voit ici le Mercure, il tirerait la teinture des végétaux, et en ferait une médecine. Il est médecin lui-même, car si on en met­tait la valeur d’un grain au pied d’un arbre pres­que mort et qu’on l’arrosât, il reprendrait une nou­velle vigueur ; mais ce serait manger son blé en herbe que d’en rester là ; il faut poursuivre le travail.
Quant aux deux autres sels, ils se réduisent en mercure semblable au premier, en continuant l’opé­ration. A cet effet, quand les sels ont été séparés, on dissout la seconde espèce dans l’esprit astral pour en arroser le sel fixe, le dissoudre, le faire fermen­ter et putréfier : et comme il ne serait pas en assez grande abondance pour terminer l’opération, on achève les imbibitions avec le Mercure dissous, et on procède comme la première fois, par les poids de nature.
Le poids, si on y fait attention, diffère ici du premier, car la terre n’avait besoin que d’être abreu­vée ; mais ici il faut que le sel soit dissout et fixé jusqu’à ce qu’il ne puisse plus recevoir d’humidité, qu’il fermente, qu’il pourrisse et donne les mêmes résultats que ci-dessus, c’est-à-dire un Mercure que vous laverez et dont vous séparerez la terre pour la joindre avec la première.
Pour sublimer le Mercure, vous le séparerez en deux, vous dissoudrez une moitié par l’esprit astral, et vous ferez par son moyen des ablutions sur la Partie fixe, ainsi que je viens de vous enseigner. Vous continuerez vos ablutions jusqu’à dissolution parfaite, et vous laisserez ensuite fermenter et putré­fier comme auparavant.
Vous avez ici le mercure du second aigle ; si vous allez ainsi jusqu’au septième, inclusivement, ce mercure sera très propre à dissoudre l’or, et il le dissoudra sans chaleur ni ébullition, et à la manière dont la glace fond dans l’eau chaude ; vous le conduirez jusqu’au neuvième inclusivement, et vous lui donnerez toute l’exaltation dont il est sus­ceptible pour pouvoir opérer de plus grandes cho­ses. Mais, je vous préviens que si vous vouliez allez plus loin, il dissoudrait jusqu’aux silex par le sim­ple contact et vous ne trouveriez plus de vase pour le contenir.
A chaque sublimation ou aigle, vous séparerez la terre noire féculeuse comme la première fois, et vous la joindrez à la première pour en faire l’usage que je vous indiquerai au second travail ; car le pre­mier a été employé tout entier à la façon de notre mercure : mais c’est celui qui exige le plus de temps. Il est aussi le plus difficile, c’est pourquoi il est comparé aux travaux d’Hercule, dont il n’est au surplus que la juste application : et lorsqu’il est terminé, le reste n’est plus regardé que comme un ouvrage de femme et un jeu d’enfant. Il ne s’agit plus en effet que de laver le laiton, ou de faire une impastation, ce qui s’applique fort bien ou aux femmes qui s’occupent de lessive, ou aux enfants qui font des boulettes et des bonshommes d’argile ou de terre détrempée. Lavare et impastare, in hoc consistet magisterium sapientum.
Le temps de cette grande et importante opération est d’environ deux années communes. Et lorsqu’elle est terminée, l’apprentissage de notre maçonnerie, car il n’est que celle-ci de vraie, cet apprentissage finit, il fait place au compagnonnage dont les épreuves sont beaucoup moins longues, et moins rudes.
Vous avez enfin entre les mains ce Mercure uni­versel dont les sages ont tant parlé, par son moyen, vous pouvez attaquer la Nature jusqu’au cœur, et extraire les médecines ou teintures des trois Règnes, en leur donnant en même temps une fixité et per­fection qu’elles ne pouvaient avoir. Ce Mercure est véritablement la force de toutes forces dont a parlé le savant Hermès Trismégiste, c’est le dragon igné qui détruit toutes choses, l’esprit-de-vin, ou plutôt l’eau-de-vie de Raymond de Lulle, et le vinaigre du Cosmopolite. Il dissout et fixe en même temps, car il provient de l’union de deux feux en opposition l’un de l’autre, bien qu’ayant une même origine. Le premier est un feu acide et froid, c’est celui qui dissout et produit la fermentation ; le second est alcalin et chaud, il produit la putréfaction et fixe le composé. C’est pourquoi B.V. à la fin de ses Douze clefs vous avertit de bien distinguer le froid d’avec le chaud, dans l’application de vos feux.
Ce n’est pas pourtant que la chaleur fermentative provienne de l’alcali plutôt que de l’acide, puisqu’elle n’est qu’un simple effet du mouvement, comme vous avez dû le remarquer au commence­ment de ce traité ; mais parce que la présence de cet alcali la détermine et la conserve pendant la putréfaction.
Le Mercure n’étant qu’une demi-génération, il faut procéder maintenant à l’exaltation du Soufre. Ainsi que l’ont fait Flamel et Le Trévisan, vous Pouvez prendre de l’or en feuilles et en extraire la teinture en la projetant dans votre Mercure que vous aurez dissout auparavant. Cette voie n’est pas la plus noble, mais elle est la plus courte ; ce n’est qu’une teinture particulière qu’on obtient, mais le mercure l’universalise dans le travail et la conduit au même résultat.
Il est bien plus noble sans doute de tirer de la matière cette teinture universelle. Vous prendrez donc toutes vos terres provenant des aigles, et vous procéderez avec elles par de nouvelles imbibitions avec l’esprit astral, jusqu’à ce qu’elles rougissent et qu’elles soient d’un rouge-brun. C’est ce que les philosophes appellent la calcination. Le Mercure dis­sous et projeté dessus fera l’extraction de la Tein­ture, au moyen de laquelle vous pourrez procéder au Mariage Philosophique qui fera la perfection de l’œuvre, et terminera les travaux, sauf la multipli­cation qui n’en est que la répétition abrégée.
Cette Teinture est la couronne du Roi que vous devez tirer des cendres, pourquoi le sage Pythagore et après lui plusieurs ont répété « Ne méprisez pas les Cendres, parce que la couronne du Roi s’y trouve renfermée. » C’est de là que provient la cou­tume de conserver la cendre des morts. B.V. dit sans sa préface « que la couronne du Roi soit de très pur or » ; et ailleurs il dit : « C’est une cou­ronne tirée des cendres. » L’or est cette teinture dont nous parlons, et la cendre est la terre des aigles que vous avez mise à part.



Il faut aussi que vous sachiez que le Mercure, qui fait l’extraction de cette Teinture, est appelé Eau sèche qui ne mouille pas les mains, parce que, bien qu’il ne soit qu’un sel qui ne mouille point, il a seul la vertu de dissoudre tous les corps, ainsi que l’eau fait des sels et des gommes. En appa­rence, l’eau est dite un dissolvant, mais, au fait, elle ne fait que diviser. La dissolution n’a lieu dans toute la nature qu’au moyen de la fermentation, tandis que le Mercure en dispense dans les mêmes occasions ; mais dans les choses plus élevées où la présence de l’eau est de nul effet, et en remplit les fonctions, et ne fait comme elle, que séparer les corps ou substances pour les mettre aux prises, et leur faire subir la fermentation, seule cause de dissolution. Au surplus la dissolution n’est elle-même qu’une division plus étendue des corps, ou une disjonction absolue, et le mélange exact de tou­tes leurs parties. Il arrive en cette circonstance que les parties disjointes et d’une nature opposée entre elles venant à se rencontrer, se heurtent et se livrent une espèce de combat auquel nous avons donné le nom de fermentation, après quoi elles s’unissent de nouveau, mais après s’être purgées de ce qui leur était étranger qui cause la corruption, et empêche que l’union soit parfaite ; mais après son entière séparation, l’union est si intime que tous les efforts de la Nature pour les séparer seraient nuls et insufflant. Ainsi seront les corps et les âmes des justes après le jugement et leur purification.
Après l’extraction de la Teinture, il reste en arrière une terre réfractaire que nous appelons terre damnée, parce que, comme le péché, elle est cause de mort et de souffrances. Il faut la rejeter avec soin, car c’est elle qui empêche l’ingrès de la tein­ture, et qui cause ici-bas l’antipathie et l’inimitié parmi les êtres.
L’ébullition qui accompagne ordinairement la fermentation est figurée dans nos livres comme un combat entre deux champions dont l’un doit sur­monter l’autre, et le mettre à mort ; mais il ne faut pas prendre cela tout à fait à la lettre. Cette ébullition ne doit être attribuée qu’au dégagement des gaz qui cherchent à se mettre en équilibre, soit par mixtion, soit par extension.
De même, lorsque nous parlons de Sceau Her­métique, il ne faut pas l’entendre de la clôture exacte du vase : clôture imbécile et qui serait plus nuisible qu’utile, attendu qu’elle empêcherait la manipulation aussi bien que la séparation et con­jonction des substances dans les temps et propor­tions dues. Nous appelons ainsi la réunion de plu­sieurs substances en une seule, de manière à ne pouvoir plus les séparer : car chez nous, ou dans notre langage, ouvrir est la même chose que dis­soudre, et fermer, la même chose que fixer. Nous avons sept sceaux correspondant à sept corps planétaires, et qui connaît l’un, connaît tous les autres.
Nous nous servons aussi de beaucoup de ter­mes familiers à la chimie vulgaire ; il faut que l’on sache, une fois pour toutes, que distiller, cohober, sublimer, calciner, réverbérer, incérer etc. ne sont chez nous depuis le commencement jusqu’à la fin qu’une seule et même opération, laquelle consiste à dissoudre et coaguler, ce qui est la même chose que mouiller et dessécher, et que le moindre apprenti sait faire.
Maintenant que vous avez la solution des Enigmes principales qui obscurcissent notre langage et en empêchent ou retardent au moins l’intelli­gence, je vais vous expliquer ce que c’est que notre mariage philosophique entre Beya et Gabertin. Vous devez savoir à présent que la Teinture rouge, qui est le Soufre fixe des philosophes, et qu’ils appellent tantôt Lion, tantôt esprit-de-vin ou vinaigre très aigre, et quelquefois orpiment fait ici fonction de mâle et est appelé Gabertin. Le Mercure ou la Tein­ture blanche qu’ils nomment Lune, argent, Eau-de-vie, vinaigre, arsenic, magnésie, Terre feuillée etc. fait ici l’office de femelle et est appelée Beya.
Il faut savoir encore que ces deux substances, Soufre et Mercure que le petit paysan appelle les deux fleurs, ne constituent ensemble qu’un seul Mercure, dit hermaphrodite, ou plutôt androgyne, qui signifie mâle et femelle  ; que dans l’opéra­tion que je vais décrire, elles en font alternative­ment les fonctions ; que par conséquent ils ont sou­vent donné à l’un et à l’autre les mêmes noms, mais particulièrement celui de Mercure, en faisant pourtant une petite différence essentielle à connaître ; ils mettent alors devant le nom de Mercure le mot premier, pour exprimer la teinture blanche. ils nomment celle-ci Lion Vert, et le Soufre Lion Rouge. S’ils nomment le Mercure eau-de-vie, vinaigré, arsenic, magnésie, Lune, argent, ils nomment par une juste comparaison et proportion la Teinture rouge, Esprit-de-vin, le vinaigre très aigre, orpi­ment, réalgar, or vif, Soleil etc.
Pour dernière observation, je vous ferai remar­quer que le mercure n’est qu’un sel inverti en cette substance mercurielle ; que le Soufre lui-même n’est jamais sans Sel, non plus que le Sel sans Mercure, ce qui vous fait voir jusqu’à l’évidence trois subs­tances en une, lesquelles substances nous appelons, pour notre commodité. Sel, Soufre et Mercure.
Pour procéder au mariage philosophique, vous séparez en deux votre Teinture Rouge, et vous en laissez dessécher une partie, mettant l’autre à part pour le besoin. Combien de gens ont failli, pour avoir ignoré cette précaution ! Ils ont cru que blan­chir le rouge, et rougir le blanc, n’était qu’une Suite ordinaire et nécessaire de la marche du grand Œuvre, et que tout cela se faisait de soi-même. Qu’ils sachent donc que le rouge est nourri du blanc et le blanc du rouge ; que le blanc est pris pour le lait dont on nourrit l’enfant nouveau-né, ou pour la Robe virginale. Quant au rouge, il exprime ou l’augmentation du feu, ou le change­ment de vêtement, il est pris par quelques-uns pour le Manteau Royal.
Vous procéderez donc aux imbibitions sur une moitié de votre Soufre, que vous aurez laisse des­sécher, avec le Mercure blanc, suivant les poids et mesures dont vous avez déjà fait usage, et conti­nuerez ainsi jusqu’à une complète saturation et que la matière demeure liquide au fond du vaisseau, c’est-à-dire boueuse. Si vous avez bien opéré, vous obtiendrez en quarante jours la dissolution du corps à la suite de laquelle viendront la fermentation et la putréfaction.
Dans la fermentation, la matière se boursoufle, s’élève et fait un petit bruit comme celui d’une fourmilière ; et lorsque la putréfaction veut arri­ver, la matière s’affaisse et noircit. Ce n’est que lorsqu’elle est arrivée à la noirceur parfaite, nom­mée tête du Corbeau, qu’elle est en pleine putré­faction. C’est là seulement la première matière de notre Œuvre, matière qu’on ne trouve nulle part sur la terre des vivants, qu’on ne crée pas cependant, mais qui est dite avoir volé au-dessus de nos têtes, à cause que le mercure ayant été sub­limé neuf fois, le Soufre s’est encore élevé par-dessus.
Les philosophes prennent la dissolution pour le règne de Mercure ; c’est pendant ce Règne que s’allient entre eux nos principes métalliques, mais il est ici comme hors-d’œuvre ; ce n’est ici qu’au Règne de Saturne ou pendant la noirceur qu’ils commencent à compter, ou qu’ils prennent le com­mencement de l’œuvre, parce que les trois princi­pes sont liés d’une manière irrévocable et que le Sceau d’Hermès est accompli. C’est le vase de Nature qu’il faut fermer et non un œuf de cristal ou de tout autre matière ; et la clôture ne s’entend pas de la gorge d’un vase pour que l’air n’y puisse pénétrer, mais de la jonction intime du Sel et du Soufre et du Mercure, de manière que l’on ne puisse plus les séparer par tel art que ce soit.
Il n’y a besoin d’aucun feu externe pour arriver à la blancheur, la matière en se desséchant y arrive d’elle-même. D’abord, elle prend la couleur de gris cendré que l’on compare à l’Étain, et que l’on appelle le sceau de Jupiter ; ensuite elle arrive par degrés à la blancheur ; mais avant d’y arriver on aperçoit circulairement sur la matière diverses couleurs, rouges, jaunes, bleues et vertes que l’on compare à l’iris ou arc-en-ciel, et que d’autres appellent la queue du Paon. Ces couleurs, qui ne durent guère, sont remplacées par une pellicule d’un brun noirâtre qui se strie par dessiccation et laisse voir la matière sous une couleur grise : bien­tôt après, on aperçoit sur les bords du vase un cer­cle capillaire d’une grande blancheur ; alors, le Règne de Jupiter, qu’annonçait la couleur grise, et que les philosophes comparent au feu de cendres, finit, pour faire place à celui de la Lune. Ce Cer­cle s’agrandit successivement jusqu’à la blancheur parfaite de la matière que les philosophes appel­lent avec raison Lune ou Argent, puisqu’un poids de cette médecine blanche projeté sur 10 d’argent, et ensuite sur 100 d’un autre métal imparfait, trans­mue celui-ci en argent plus pur que celui des mines.
L’argent que l’on emploie en cette circonstance, tient ici lieu de ferment, et sans lui il n’y aurait pas de transmutation, c’est dans ce sens qu’il faut entendre ce que disent les Sages : que sans or, aucun or n’est faisable ; ils entendent parler du ferment.



Cette terre blanchie a l’aspect d’une poudre brillant de diamant et est divisée en petites lames : ce qui est cause que les sages l’ont nommée leur terre feuillée dans laquelle ils recommandent de semer leur OR, elle n’est comme l’on voit qu’une demi-génération, c’est pourquoi il faut continuer le travail si l’on veut arriver à la perfection.
Il faut donner à cette terre la culture nécessaire avant d’y semer l’or, autrement il ne fructifierait point.
On recommence donc les imbibitions avec le mercure blanc, selon la mesure antérieurement observée. A l’aide d’un feu bien observé, la matière se subtilise de plus en plus, se couvre de verdure, après quoi elle commence à jaunir et prend une couleur orangée qu’elle ne pourrait plus dépasser si le feu n’était augmenté.
Cette verdure tant chantée par les poètes, et si recommandée par tous les philosophes est le règne de la belle Vénus, auquel succède celui de Mars qui est la couleur orangée.
Vous vous souvenez d’avoir fait deux parts de votre teinture Rouge : vous venez de blanchir la première, il faut maintenant la rougir. Prenez donc la Teinture mise en réserve, dissolvez-la en proje­tant dessus du mercure philosophique et procédez avec cette Teinture aux imbibitions, jusqu’à ce que la matière arrive à un beau rouge pourpré et foncé de pavot.
Telle est la médecine du premier ordre, tant au Blanc qu’au Rouge, laquelle guérit toutes maladies lorsqu’on en use sans addition de métal, dans un véhicule approprié au mal, selon la prudence requise, et qui avec l’addition, comme ferment, des deux métaux parfaits, transmue en or ou en argent tous les métaux imparfaits, tels que le cuivre, le plomb, l’étain etc.
Auparavant que de tenter une projection, il faut essayer la matière sur une lame de cuivre rougie au feu. Si elle fond sans fumée elle est dans l’état désiré, autrement il faudrait continuer le feu.

Multiplication


La Multiplication n’est autre chose que la répé­tition de tout l’Œuvre, à partir du mariage philo­sophique. Il faut seulement avoir le soin de parta­ger en deux sa matière dans le Cercle de la blan­cheur et dans celui de la rougeur, afin de pouvoir procéder aux imbibitions sur la moitié restante avec des parents d’un même sang. Le Mercure aussi bien que la teinture Rouge dans leur premier état, seraient ici trop imparfaits pour pouvoir s’allier à notre médecine.
Vous aurez soin, à chaque dissolution par le Mercure, de séparer une terre damnée qui se pré­cipite et que vous rejetterez avec d’autant moins de scrupule, qu’elle est absolument réfractaire, et qu’elle empêche l’ingrès de la matière dans les métaux.
Avec toutes les conditions que j’ai décrites ci-dessus, sans en rien omettre, vous arriverez sûrement au but si désiré de la Philosophie.
Toutefois, ne cherchez pas à outrepasser le nom­bre sacré de neuf, car la matière, si fixe qu’elle soit, aurait acquis une si grande fluidité et dilatation, qu’aucun vase ne pouvant la contenir, elle serait entièrement perdue.
Sur ce, mon frère, remerciez Dieu de la grâce qu’il vous a faite, ainsi que je le remercie de vous avoir été utile dans vos desseins, s’ils sont droits, et que vous demeuriez dans les sentiers du bien.

FIN




Scholies


(Du même auteur anonyme)


1e
Tout était eau dès le principe : l’Univers et tout ce qu’il renferme est sorti des Eaux.

2e
L’Eau est un composé de divers principes, si cela n’était pas, elle n’éprouverait pas de fermentation ni de putréfaction.

3e
L’Eau fermentée, pourrie et desséchée forme un limon que l’on peut appeler Eau sèche.

4e
Ce Limon, cette Eau sèche, c’est l’argile dont le Colosse du monde a été formé.

5e
L’Argile est une Terre onctueuse, grise et pesante dont on fait la Brique.

6e
L’alcalescence et non la graisse forme son onc­tuosité, et la rend savonneuse.

7e
C’est ce qui la rend miscible avec les corps gras, mais non d’une façon intime : à la moindre chaleur, la graisse se sépare.

8e
L’Argile n’est donc pas formellement un Alcali ; mais il a une qualité voisine de sa nature. Il tient l’intermédiaire.

9e
Il passe souvent à l’état de craie ou de chaux, mais imparfaitement, il conserve en plus ou moins grande partie sa forme première.

10e
Les terres jaunes, rouges, vertes, etc. sont de cette Nature, mais avec addition de Teinture minérale.

11e
Cette Teinture est produite par mutation, d’une partie de la terre première en vitriol de la nature du fer ou du cuivre.

12e
La double action de l’Esprit aérien et de l’esprit minéral, opèrent ces diverses mutations.

13e
L’Esprit Astral, aérien et universel introduit dans ce sujet, suivant sa pureté, lui donne une forme plus ou moins noble.

14e
 La pierre, le marbre, les sels, les Cristaux et les Minéraux tirent leur origine de cette Terre.

15e
L’Argile est la matrice naturelle et première du monde entier : l’Esprit astral en est la semence

16e
L’Esprit astral est sans équivoque la lumière du Soleil et des astres dont l’air et les cieux sont remplis.

17e
Dans notre système terrestre, le soleil est le père de cet esprit, la Lune en est la mère.

18e
La Lune est dite la mère de l’Esprit astral, parce que sa Lumière vivifique tire sa source du Soleil.

19e
Cependant tous les astres y joignant leur lumière, son véritable nom est l’Esprit universel.

20e
Il faut que cet esprit qui est un feu, soit dis­sout par un autre feu, et devienne Eau.

21e
On recueille cet Esprit dans la grande mer des sages qui est l’air, par le moyen d’un acier magique qui est d’une même nature.

22e
Le feu central renfermé dans tous les corps est un acier magique.

23e
Ce mot magique vous fait voir que ce n’est point un véritable acier, mais qu’on ne l’appelle ainsi que par comparaison.

24e
Tous les corps qui ont vie attirent l’air pour leur nourriture. Le règne animal est celui où cette attraction se fait le plus visiblement.

25e
Aussitôt que l’esprit astral est attiré, il est réduit en  eau dont les sages font leur feu secret.

26e
Quoique tous les temps soient propres à cette attraction, le printemps est la saison la plus convenable, ensuite l’automne.

27e
A ces deux époques, la Nature se régénère, et l’air est plus chargé de cet esprit vital.

28e
La Lune étant la mère de cet esprit, ce n’est que quand elle luit qu’elle nous le donne.

29e
Par conséquent, plus sa lumière est grande, plus cet esprit est abondant.

30e
La Terre est ronde, et son mouvement est d’occident en orient.

31e
L’esprit repoussé vers les Pôles par ce mouvement, et ne trouvant son repos que vers le Nord, il s’y réfugie.

32e
Le Nord étant sa patrie, c’est dans cette région de l’atmosphère qu’on doit en faire la récolte.

33e
Aussitôt que le Soleil paraît sur l’horizon, il chasse l’esprit, il faut cesser le travail.

34e
Esaü vendit à Jacob son droit d’aînesse pour un plat de lentilles, il faut diviser ainsi sa terre.

35e
Il faut faire pleuvoir sur cette terre la rosée du ciel, c’est-à-dire l’esprit, et qu’elle en soit imbibée.

36e
Que la terre ne soit ni trop abreuvée, ni pas assez, mais qu’elle demeure mouillée.

37e
Ce que la terre peut contenir d’humidité, est le poids de nature. La terre qui contient est le vase.

38e
Il ne faut rendre l’eau à la terre qu’après sa parfaite dessiccation.

39e
Mouiller et dessécher, composent le jour naturel.

40e
Chaque humectation est appelée cohobation, et chaque dessiccation distillation.

41e
A chaque imbibition, le feu centrai retient du feu Secret la portion spirituelle, le flegme se dissipe entièrement.

42e
Ou plutôt l’acide et l’Alcali ne conjoignent pour ne plus se séparer, à cause de la conformité de leur Nature.

43e
Tant que l’Alcali domine, dure le règne de sécheresse : mais l’acide prédominant à son tour fait régner l’humidité.

44e
La prédomination de l’acide entraîne la dissolution du corps, et amène la fermentation.

45e
Cette fermentation n’est qu’un combat entre l’acide et l’alcali pendant lequel ils se tuent l’un l’autre.

46e
L’acide a pourtant surmonté le fixe puisqu’il l’a amené à dissolution ; mais le fixe a aussi vaincu l’esprit volatil qui demeure sans action.

47e
De l’acide et de l’alcali réunis se forme une nature androgyne ou hermaphrodite.

48e
La fermentation achevée, la Putréfaction vient à la suite, et met le Sceau au premier travail.

49e
Il y eut 50 Néréides ou déesses des humidités, 50 filles de Danaüs qui épousèrent les 50 fils d’Aegyptus.

50e
Il faut 50 ablutions de l’esprit sur la terre, ou 50 mariages de l’acide et de l’alcali, du ciel avec la terre, pour obtenir la dissolution.

51e
L’alcali faisant fonction de femelle, surmonte 49 fois son mâle qui est l’esprit ; mais, à la 50e les forces venant à lui manquer, il demeure conjoint.

52e
On cesse les ablutions aussitôt que la fermentation se présente. On compare ce feu au bain-Marie.

53e
La chaleur augmentant dans la putréfaction est comparée à celle du fumier.

54e
Ce n’est que dans la putréfaction que la conjonction est opérée. Les principes renfermés dans une seule substance ne peuvent plus être séparés, et c’est ce qu’on appelle Sceau Hermétique.

55e
Du charbon qui est noir on fait de la cendre grise, et de cette cendre on tire un sel par continuation du feu.

56e
Le corps noirci par putréfaction devient gris et est comparé aux cendres, ensuite blanc et est le vrai sel de nature où le salpêtre des sages, c’est-à-dire le Sel de leur pierre.

57e
Les sages comparent encore leur matière au savon, parce que indépendamment de ses propriétés particulières elle est comme le savon composée d’un alcali auquel la graisse du Soufre est jointe.

58e
Dans la cendre, disent les sages, est renfermé le Diadème de notre jeune roi ; dans la terre restante, après l’extraction du sel, est le soufre.

59e
Le soufre se manifeste dans cette terre par sa coction avec notre esprit ou feu Secret.

60e
Les philosophes appellent, feu externe, l’administration de l’esprit au corps, de l’acide à l’Alcali ou l’excitation produite entre le sel et l’humide.

61e
Geber définit la sublimation l’élévation par le feu d’une chose sèche avec adhérence au vaisseau, pour exprimer la putréfaction et exaltation de la substance, le feu, la chose sèche, et le vase étant ensemble une même chose.

62e
Le sel des sages a besoin d’être exalté pour devenir leur mercure. Ils comptent neuf sublimations.

63e
Les sublimations se font comme le premier travail, par l’administration du feu externe.

64e
Le mercure doit être fait par le Mercure, c’est-à-dire, que le feu doit être de même substance que le corps soumis au travail.

65e
Pour que cela soit ainsi, il faut dissoudre dans l’esprit une partie du sel pour faire les Imbibitions.

66e
A cet effet, on fait, à chaque sublimation deux parts de son Sel, l’une demeure sèche, et on dissout l’autre pour imbiber.

67e
Il se fait ainsi une nouvelle dissolution, fermentation et putréfaction d’autant plus prompte que le sel est plus élevé en dignité.

68e
Ces sublimations que Philatèthe nomme ses aigles, ne peuvent outrepasser le nombre de neuf.

69e
A chaque sublimation du Sel de nature ou mercure, il se sépare toujours, au moyen de la dissolution, un peu de terre qu’il faut réunir à la première.

70e
Ce sont toutes ces terres réunies que l’on met avec notre esprit, pour avoir le soufre.

71e
Dans cette coction, il n’y a ni dissolution, ni fermentation, ni putréfaction à attendre, le corps ne fait que rougir de plus en plus et arrive à une couleur brune qui est la dernière.

72e
Pour avoir cette Teinture couleur de sang qui est l’or solaire, ou le vinaigre très aigre, ou esprit de vin de R. Lulle etc. il faut verser dessus la terre rouge, le Mercure philosophique à hauteur de deux ou trois doigts ; alors elle se sépare doucement et surnage le mercure comme une Quintessence.

73e
Lorsqu’on dissout avec l’esprit astral, le sel qui est le mercure, il faut mettre la dissolution dans un lieu frais, le mercure se rassemble alors sur la superficie de l’esprit sous forme de crème, mais c’est un sel, ou une eau sèche qui, bien que liquide ne mouille pas les mains.

74e
Il reste dans l’esprit deux sortes de sels autres que le mercure : savoir un sel nitreux et un sel fixe.

75e
En faisant subir à ces sels le travail des aigles, et les travaillant l’un par l’autre, ils arrivent tous deux à une forme parfaite mercurielle.

76e
Il y a deux voies pour avoir le soufre ; la voie humide, et la voie sèche.

77e
La voie humide est celle que je viens d’enseigner, c’est la plus longue, mais la plus noble, à cause des difficultés vaincues.

78e
La voie sèche, telle que Flamel et B. Trévisan l’on suivie, mène au but, quoique particulière.

79e
Elle consiste à séparer la Teinture de l’or commun avec le mercure du 7e aigle.

80e
On gagne ainsi sur le temps deux sublimations du mercure et la coction entière de la terre des aigles.

81e
Quand on a procédé par la voie humide, il faut rejeter la terre qui reste après l’extraction de la Teinture. C’est une terre damnée et dommageable.

82e
Quelle que soit la voie que vous suiviez, il faut procéder au mariage du Soufre et du Mercure.

83e
Ce sont de Nouveaux Cieux et une Nouvelle Terre que vous allez marier ensemble, et qui produiront une nouvelle Jérusalem avec un roi très puissant.

84e
Prenez une partie de votre Soufre ou Teinture laissez-la sécher et il s’en formera une terre douce et agréable au toucher, d’un rouge brun.

85e
Faites avec le Mercure vos imbibitions, comme à la première opération, en suivant le poids de Nature.

86e
Après 40 Imbibitions qui sont réputées 40 jours le corps se dissoudra, fermentera et pourrira.

87e
Ce sont ces deux Teintures, l’une rouge l’autre blanche que le Petit Paysan nomme ses deux fleurs et que d’autres ont appelées Grande et Petit Lunaire

88e
Il faut amener cette teinture rouge à la blancheur par imbibitions avec le mercure.

89e
Ces imbibitions doivent être faites de manière que la terre demeure ferme, quoique mouillée.

90e
La Science demeure dans les principes ; mais l’art consiste à savoir dissoudre et pourrir.

91e
Celui-là est passé maître qui a atteint le degré de putréfaction, car quoique ce soit le plus bas de l’Œuvre, il est réputé le plus élevé à cause des difficultés qu’il présente pour y arriver.

92e
Le principal pas est fait pour arriver à la blancheur qui est une médecine souveraine contre toute sorte de maux.

93e
Ce n’est pas qu’il ne reste quelques difficultés à vaincre, mais elles ne sont pas insurmontables.

94e
On n’arrive pas de suite à la blancheur, il faut auparavant dissoudre et noircir.

95e
Il faut que ce soit une dissolution radicale, que le corps soit réduit en ses plus menues parties bien qu’il ne soit pas semblable à de l’eau fluviale ou semblable.

96e
C’est à tort que quelques philosophes ont parlé de noircir le blanc, car quoique la blancheur sorte de la noirceur, c’est néanmoins le rouge que l’a blanchi et le même par conséquent qui le noircit.

97
Au surplus cette noirceur est un voile ténébreux qui couvre la blancheur aussi bien que la rouge.

98e
On appelle la dissolution le Sceau de Mercure le bain-Marie, le bain du Roi. Quant à la putréfaction dont la noirceur est le symbole, c’est le fumier de bouc ou de cheval, et le Sceau de Saturne.

99 e
La dissolution est prise par les uns pour la première matière des sages, et la putréfaction par les autres, eu égard à la réunion essentielle et inséparable des deux substances.

100e
Quoi qu’il en soit, la dissolution est proprement le chaos des sages, dans lequel le Ciel et la Terre sont renfermés, et la putréfaction est leur principe matière.

101e
Ce n’est qu’au bout de 40 imbibitions que le corps se dissout, fermente et pourrit.

102e
On appelle Tête de Corbeau, Saturne ou Plomb des philosophes cette première noirceur.

103e
Comme au 1er travail on cesse d’administrer le feu externe lorsque la dissolution est entière.

104e
La matière se conduit par son propre feu jusqu’au cercle de la blancheur qui est la lune des philosophes, Diane, Latone ou le Laiton blanchi.

105e
La blancheur commence par un cercle capillaire qui s’étend de jour en jour jusqu’au centre ; mais avant d’arriver à la blancheur, la matière passe du noir au gris qui est la couleur intermédiaire et qu’on nomme le feu de cendre, et le Sceau de Jupiter.

106e
Le passage du gris au blanc est marqué par l’apparition de plusieurs couleurs, parmi lesquelles domine la verte : ce qui a fait donner à la blancheur le nom de Lion vert.

107e
Les sages nomment ces couleurs Iris, ou Queue de Paon.

108e
On compare ce travail jusqu’à la blancheur, au feu de Réverbère.

109e
La blancheur, que nous avons dit être le règne de la Lune, n’est qu’une demi génération. Les sages l’appellent terre feuillée pour deux raisons principales.

110e
Une c’est que quand on la regarde de près, elle ressemble à des feuilles de Talc brillant.

111e
Second c’est que la putréfaction où elle vient de passer est le symbole de l’hiver pendant lequel la terre est couverte de feuilles dont une nouvelle terre se forme au printemps, laquelle terre est appelée terre des feuilles.

112e
La matière ne pouvant aller plus loin par son propre feu, il faut recommencer le feu externe.

113e
Pour se préparer d’avance à la multiplication, il faut séparer en deux la matière.

114e
On en met une part de côté, et on conduit l’autre à la rougeur, en continuant le travail.

115e
On reprend donc ici le travail des imbibitions avec le mercure, observant les poids de Nature.

116e
Il faut comme la première fois que la terre demeure entière au fond du vaisseau.

117e
La matière perd peu à peu sa blancheur et arrive à une couleur verte que l’on compare au Vitriol, et que l’on appelle le Sceau de Vénus.

118e
Par la continuité du feu, elle acquiert une couleur jaune safranée qui est le Sceau de Mars.

119e
La matière ne pouvant par le même degré de feu acquérir une plus grande rougeur, il faut l’augmenter.

120e
On augmente le feu en imbibant le corps avec du mercure rouge mis en réserve.

121e
On continue cette manière jusqu’à ce que la matière ait acquis un rouge brun.

122e
Avant d’arriver à cette rougeur foncée, elle passe une belle couleur de pourpre.

123e
La matière arrivée au rouge brun très foncé, est le vrai Or fluide des sages, leur soleil, leur médecine universelle.

124e
Sauf les multiplications, il n’y a plus de difficultés à vaincre.

125e
On possède deux médecines ; l’une blanche et l’autre rouge pour guérir toute maladie.

126e
Ces deux médecines ne sont pas seulement utiles aux hommes, mais aux végétaux et aux minéraux.

127e
Un arbre presque mort arrosé d’eau dans laquelle sera dissout un seul grain pesant de cette médecine, reprendra vie, fleurira, et fructifiera.

128e
On fait avec cette médecine une infinité de merveilles au-dessus du pouvoir naturel.

129e
Si vous projetez un grain de la médecine blanche sur dix de bon argent, le tout sera médecine, dont un grain en transmuera 100 de métaux imparfaits, en argent meilleur que celui des mines.

130e
Un grain de médecine rouge projeté sur de bon or en fusion, fera de l’or dans la même proportion.

131e
Pour faire des perles plus grosses et plus belles que les naturelles, on n’a besoin que d’en dissoudre avec le mercure et de les mouler ensuite.

132e
On augmente de même manière le poids et la beauté du Diamant et des pierres précieuses.

133e
On fait des Rubis artificiels, bien plus éclatants que les naturels, par addition de teinture rouge.

134e
Mais il n’y a que Dieu seul qui puisse rappeler les corps de la mort à la vie.

135e
La teinture rouge est le septième et le dernier Sceau d’Hermès qui appartient au Soleil.

136e
On procède à la multiplication avec des parents d’un même sang.

137e
On appelle parent d’un même sang les teintures blanche et rouge d’une même opération.

138e
Le mercure qui n’a pas été accouplé avec la teinture rouge, n’est pas propre à multiplier.

139e
Les médecines blanche et rouge du 1er degré sont parents d’un même sang, et peuvent multiplier.

140e
C’est dans cette intention qu’on sépare les médecines en deux, dans les Cercles de la blancheur et de la rougeur.

141e
On procède à la première multiplication en prenant une part de teinture rouge qu’on dissout avec la blanche mise en réserve.

142e
Il faut auparavant dissoudre la blanche avec le mercure pour procéder aux imbibitions.

143e
On recommence alors le premier travail avec les mêmes conditions et observant le poids de Nature.

144e
Le pur séparé de l’impur abrège chaque fois de moitié le temps de l’opération.

145e
La projection de cette seconde médecine se fait sur cent d’argent ou d’or, comme ferment, et ensuite sur mille des métaux imparfaits.

146e
Le poids et la vertu de la médecine augmentant de dix à chaque multiplication, une once, de la neuvième, transmutera un million en très pur métal d’or ou d’argent.

147e
La vertu de cette médecine est si grande qu’elle peut en un instant changer de face toute la Nature sublunaire.

148e
C’est pour que les méchants n’en approchent pas que les sages la tiennent si cachée.

149e
Passé la neuvième multiplication la médecine ne peut plus être contenue ; elle flue à travers le verre, comme l’huile à travers le papier.

150e
L’Œuvre entier s’achève en 150 jours, excepté les multiplications qui peuvent conduire à deux cents.


FIN.




LA LÉGENDE D'HIRAM

LA LÉGENDE D'HIRAM

Articles les plus récents

LES SENTIERS D’HERMÈS

LES SENTIERS D’HERMÈS

Articles les plus récents

GEORGE RIPLEY - Rouleau alchimique (Bodleian Library - University of Oxford) - 15ème siècle






GEORGE RIPLEY - Rouleau alchimique (Beinecke Library - Yale University) - 15ème siècle





GEORGE RIPLEY - Rouleau alchimique (Huntington Library) - 15ème siècle






GEORGE RIPLEY - Rouleau alchimique (The Getty Research Institute)