LA PRINCIPALE SOURCE D’HERMES DEVOILE
Bernard Husson
Article paru dans le n° 62 de la revue Initiation et Science (1964)
Le prédécesseur immédiat de Fulcanelli dans la lignée des
alchimistes qui ont témoigné par l'imprimé de leur accession à l'adeptat,
c'est-à-dire de leur réussite dans l'élaboration de la pierre philosophale, est
l'auteur du petit opuscule paru en 1832 sous le titre d'Hermès dévoilé.
Au sigle Ci.... sous lequel cet adepte a caché son identité,
les bibliographes ont substitué, dès 1834 (1), le pseudonyme de Cyliani (dérivé
de Cyllène, montagne grecque dédiée à Hermès dans l'Antiquité).
L'autobiographie de Cyliani, qui est une véritable
confession, nous apprend qu'il a passé une grande partie de son existence à
lire « presque tous les traités d'alchimie parus avant lui ». Cependant, de ces
immenses lectures, il ne cite que deux ouvrages, dont il tient les auteurs en
particulière estime, au point, nous dit-il, d'incorporer plusieurs passages de
leurs écrits dans le texte d'Hermès
dévoilé. On conçoit l'intérêt qu'offrent ces deux ouvrages pour l' «
amoureux de science » désireux de scruter attentivement le message « dédié à la
postérité » par le seul adepte qui se soit fait connaître en Occident au XIXème
siècle.
Or, ce dernier n'indique ni le nom d'auteur, fût-il même,
comme il arrive, réduit à une initiale, un sigle ou un pseudonyme, ni le titre
des deux textes dont il fait mention, se bornant à déclarer que l'un est un
traité « imprimé à Leipsick en 1732 », et l'autre, « un petit manuscrit trouvé
derrière une armoire » par un couple d'amis, férus d'alchimie, dans les
premières années du XIXème siècle. Il ajoute que ce manuscrit dévoile tout le
processus opératoire, à l'exception de la matière, du feu et des travaux
d'Hercule. Ce sont également ces trois points dont Cyliani, à la fin de sa
préface, laisse le soin de la divulgation « à Dieu seul ».
Dans ces conditions, il n'existe aucune piste permettant une
recherche directe et sélective de ces deux textes, et l'investigateur en est
réduit à une confrontation patiente et exhaustive de la pratique d'Hermès dévoilé avec tous les traités
alchimiques antérieurs, imprimés ou manuscrits, qu'il pourra consulter, jusqu'à
ce que des similitudes vraiment flagrantes lui permettent de reconnaître les
deux sources dont Cyliani semble avoir malicieusement dissimulé l'approche,
tant est grande l'imprécision avec laquelle il les signale.
En effet, l'exploration patiente et continuelle à laquelle
nous nous sommes livré depuis plus de dix ans, à travers la somme, bien
imparfaitement inventoriée encore, des écrits alchimiques européens, tant
imprimés qu'inédits, éparpillés en Europe, en nous attachant surtout à ceux du
XVIIème et du XVIIIème siècles, nous ont permis de constater que, jusqu'à
nouvel ordre, aucun traité alchimique n'avait été imprimé à Leipzick en 1732.
Toutefois, cette indication erronée constitue un élément
valable pour l'identification de cet imprimé, paru sans nom d'auteur, et pour
la première fois seulement en 1751, à Amsterdam (2). Il est du reste signalé
par les principaux bibliographes.
Par contre, l'autre source, qui joue un rôle beaucoup plus
important dans la rédaction d'Hermès
dévoilé était restée jusqu'à présent inédite et complètement inconnue. Nous
avons exposé, dans notre travail, les raisons qui nous incitent à penser qu'une
copie de ce manuscrit « trouvé derrière une armoire » se trouvait, sous le
titre Récréations Hermétiques, dans
un in-folio de la Bibliothèque du Museum d'Histoire Naturelle de Paris, et nous
en avons reproduit le texte, à la suite d'Hermès
dévoilé.
Il est suivi, dans le manuscrit du Museum, de 150 notes ou
scolies que nous n'avons pas reproduites, car elles ne sont qu'une paraphrase,
ou plutôt un résumé du traité qui les précède.
On les trouvera ici, avec l'extrait d'un traité inédit du
XVIIème siècle, dont nous devons l'aimable communication à l'obligeance de
notre charitable confrère en Hermès M. A. S.
Quelques avertissements ne seront pas inutiles pour les
quinze premières scolies, constituant une sorte de préambule à la partie
pratique proprement dite, car elles n'offrent point d'équivalent dans le début
des Récréations Hermétiques.
L'assimilation de la « matrice du monde » (alchimique), avec
l'argile « dont on fait la brique » est, sinon un piège, tout au moins un
artifice d'exposition typique des traités alchimiques. Le regretté hermétiste
René Buchère, mort en 1914, décomposait, par cabale phonétique, ce mot de la
façon suivante : arg- ile ou arguron hyle, en grec, matière d'argent, de
l'argent philosophique ou lune des philosophes.
Précisons toutefois que le rapport existant entre l'argile
vulgaire et l'argile « philosophique » est de même nature que celui qui existe
entre la rosée printanière, rosée de mai, et la rosée « philosophique » (cela,
sans parler de la réciprocité causale existant entre ces analogies respectives)
et que ce rapport n'est pas seulement cabalistique (rosée donnant en grec
rhosis, force, énergie, vertu), mais également opératif et pratiquement
constatable. De patients travaux effectués sur l'argile et la rosée « communes
» peuvent en effet conduire à des résultats fort intéressants, ainsi que l'a
montré de Saulx, médecin et hermétiste du Grand Siècle, dans ses Nouvelles recherches sur la santé et les
maladies (Paris, 1722)
NOTES
(1) Le Nouveau Recueil
d'Ouvrages anonymes et pseudonymes de M. de Manne, Paris, 1834, attribue Hermès dévoilé (page 157, n° 727) à
Cyliani, sans autre commentaire.
(2) Il s'agit du traité intitulé Petites clés de la science hermétique notées par un habitant du nord à
ses heures de loisir, l'an 1732, Amsterdam, 1751.
SCOLIES
1e
Tout était eau dès le principe : l’Univers et tout ce qu’il
renferme est sorti des Eaux.
2e
L’Eau est un composé de divers principes, si cela n’était
pas, elle n’éprouverait pas de fermentation ni de putréfaction.
3e
L’Eau fermentée, pourrie et desséchée forme un limon que
l’on peut appeler Eau sèche.
4e
Ce Limon, cette Eau sèche, c’est l’argile dont le Colosse du
monde a été formé.
5e
L’Argile est une Terre onctueuse, grise et pesante dont on
fait la Brique.
6e
L’alcalescence et non la graisse forme son onctuosité, et
la rend savonneuse.
7e
C’est ce qui la rend miscible avec les corps gras, mais non
d’une façon intime : à la moindre chaleur, la graisse se sépare.
8e
L’Argile n’est donc pas formellement un Alcali ; mais il a
une qualité voisine de sa nature. Il tient l’intermédiaire.
9e
Il passe souvent à l’état de craie ou de chaux, mais
imparfaitement, il conserve en plus ou moins grande partie sa forme première.
10e
Les terres jaunes, rouges, vertes, etc. sont de cette
Nature, mais avec addition de Teinture minérale.
11e
Cette Teinture est produite par mutation, d’une partie de la
terre première en vitriol de la nature du fer ou du cuivre.
12e
La double action de l’Esprit aérien et de l’esprit minéral,
opèrent ces diverses mutations.
13e
L’Esprit Astral, aérien et universel introduit dans ce
sujet, suivant sa pureté, lui donne une forme plus ou moins noble.
14e
La pierre, le marbre,
les sels, les Cristaux et les Minéraux tirent leur origine de cette Terre.
15e
L’Argile est la matrice naturelle et première du monde
entier : l’Esprit astral en est la semence
16e
L’Esprit astral est sans équivoque la lumière du Soleil et
des astres dont l’air et les cieux sont remplis.
17e
Dans notre système terrestre, le soleil est le père de cet
esprit, la Lune en est la mère.
18e
La Lune est dite la mère de l’Esprit astral, parce que sa
Lumière vivifique tire sa source du Soleil.
19e
Cependant tous les astres y joignant leur lumière, son
véritable nom est l’Esprit universel.
20e
Il faut que cet esprit qui est un feu, soit dissout par un
autre feu, et devienne Eau.
21e
On recueille cet Esprit dans la grande mer des sages qui est
l’air, par le moyen d’un acier magique qui est d’une même nature.
22e
Le feu central renfermé dans tous les corps est un acier
magique.
23e
Ce mot magique vous fait voir que ce n’est point un
véritable acier, mais qu’on ne l’appelle ainsi que par comparaison.
24e
Tous les corps qui ont vie attirent l’air pour leur
nourriture. Le règne animal est celui où cette attraction se fait le plus
visiblement.
25e
Aussitôt que l’esprit astral est attiré, il est réduit
en eau dont les sages font leur feu
secret.
26e
Quoique tous les temps soient propres à cette attraction, le
printemps est la saison la plus convenable, ensuite l’automne.
27e
A ces deux époques, la Nature se régénère, et l’air est plus
chargé de cet esprit vital.
28e
La Lune étant la mère de cet esprit, ce n’est que quand elle
luit qu’elle nous le donne.
29e
Par conséquent, plus sa lumière est grande, plus cet esprit
est abondant.
30e
La Terre est ronde, et son mouvement est d’occident en
orient.
31e
L’esprit repoussé vers les Pôles par ce mouvement, et ne
trouvant son repos que vers le Nord, il s’y réfugie.
32e
Le Nord étant sa patrie, c’est dans cette région de
l’atmosphère qu’on doit en faire la récolte.
33e
Aussitôt que le Soleil paraît sur l’horizon, il chasse
l’esprit, il faut cesser le travail.
34e
Esaü vendit à Jacob son droit d’aînesse pour un plat de lentilles,
il faut diviser ainsi sa terre.
35e
Il faut faire pleuvoir sur cette terre la rosée du ciel,
c’est-à-dire l’esprit, et qu’elle en soit imbibée.
36e
Que la terre ne soit ni trop abreuvée, ni pas assez, mais
qu’elle demeure mouillée.
37e
Ce que la terre peut contenir d’humidité, est le poids de
nature. La terre qui contient est le vase.
38e
Il ne faut rendre l’eau à la terre qu’après sa parfaite
dessiccation.
39e
Mouiller et dessécher, composent le jour naturel.
40e
Chaque humectation est appelée cohobation, et chaque
dessiccation distillation.
41e
A chaque imbibition, le feu centrai retient du feu Secret la
portion spirituelle, le flegme se dissipe entièrement.
42e
Ou plutôt l’acide et l’Alcali ne conjoignent pour ne plus se
séparer, à cause de la conformité de leur Nature.
43e
Tant que l’Alcali domine, dure le règne de sécheresse : mais
l’acide prédominant à son tour fait régner l’humidité.
44e
La prédomination de l’acide entraîne la dissolution du
corps, et amène la fermentation.
45e
Cette fermentation n’est qu’un combat entre l’acide et
l’alcali pendant lequel ils se tuent l’un l’autre.
46e
L’acide a pourtant surmonté le fixe puisqu’il l’a amené à
dissolution ; mais le fixe a aussi vaincu l’esprit volatil qui demeure sans
action.
47e
De l’acide et de l’alcali réunis se forme une nature
androgyne ou hermaphrodite.
48e
La fermentation achevée, la Putréfaction vient à la suite,
et met le Sceau au premier travail.
49e
Il y eut 50 Néréides ou déesses des humidités, 50 filles de
Danaüs qui épousèrent les 50 fils d’Aegyptus.
50e
Il faut 50 ablutions de l’esprit sur la terre, ou 50
mariages de l’acide et de l’alcali, du ciel avec la terre, pour obtenir la
dissolution.
51e
L’alcali faisant fonction de femelle, surmonte 49 fois son
mâle qui est l’esprit ; mais, à la 50e les forces venant à lui manquer, il
demeure conjoint.
52e
On cesse les ablutions aussitôt que la fermentation se
présente. On compare ce feu au bain-Marie.
53e
La chaleur augmentant dans la putréfaction est comparée à
celle du fumier.
54e
Ce n’est que dans la putréfaction que la conjonction est
opérée. Les principes renfermés dans une seule substance ne peuvent plus être
séparés, et c’est ce qu’on appelle Sceau Hermétique.
55e
Du charbon qui est noir on fait de la cendre grise, et de
cette cendre on tire un sel par continuation du feu.
56e
Le corps noirci par putréfaction devient gris et est comparé
aux cendres, ensuite blanc et est le vrai sel de nature où le salpêtre des
sages, c’est-à-dire le Sel de leur pierre.
57e
Les sages comparent encore leur matière au savon, parce que
indépendamment de ses propriétés particulières elle est comme le savon composée
d’un alcali auquel la graisse du Soufre est jointe.
58e
Dans la cendre, disent les sages, est renfermé le Diadème de
notre jeune roi ; dans la terre restante, après l’extraction du sel, est le
soufre.
59e
Le soufre se manifeste dans cette terre par sa coction avec
notre esprit ou feu Secret.
60e
Les philosophes appellent, feu externe, l’administration de
l’esprit au corps, de l’acide à l’Alcali ou l’excitation produite entre le sel
et l’humide.
61e
Geber définit la sublimation l’élévation par le feu d’une
chose sèche avec adhérence au vaisseau, pour exprimer la putréfaction et
exaltation de la substance, le feu, la chose sèche, et le vase étant ensemble
une même chose.
62e
Le sel des sages a besoin d’être exalté pour devenir leur
mercure. Ils comptent neuf sublimations.
63e
Les sublimations se font comme le premier travail, par
l’administration du feu externe.
64e
Le mercure doit être fait par le Mercure, c’est-à-dire, que
le feu doit être de même substance que le corps soumis au travail.
65e
Pour que cela soit ainsi, il faut dissoudre dans l’esprit
une partie du sel pour faire les Imbibitions.
66e
A cet effet, on fait, à chaque sublimation deux parts de son
Sel, l’une demeure sèche, et on dissout l’autre pour imbiber.
67e
Il se fait ainsi une nouvelle dissolution, fermentation et
putréfaction d’autant plus prompte que le sel est plus élevé en dignité.
68e
Ces sublimations que Philatèthe nomme ses aigles, ne peuvent
outrepasser le nombre de neuf.
69e
A chaque sublimation du Sel de nature ou mercure, il se
sépare toujours, au moyen de la dissolution, un peu de terre qu’il faut réunir
à la première.
70e
Ce sont toutes ces terres réunies que l’on met avec notre
esprit, pour avoir le soufre.
71e
Dans cette coction, il n’y a ni dissolution, ni
fermentation, ni putréfaction à attendre, le corps ne fait que rougir de plus
en plus et arrive à une couleur brune qui est la dernière.
72e
Pour avoir cette Teinture couleur de sang qui est l’or
solaire, ou le vinaigre très aigre, ou esprit de vin de R. Lulle etc. il faut
verser dessus la terre rouge, le Mercure philosophique à hauteur de deux ou
trois doigts ; alors elle se sépare doucement et surnage le mercure comme une
Quintessence.
73e
Lorsqu’on dissout avec l’esprit astral, le sel qui est le
mercure, il faut mettre la dissolution dans un lieu frais, le mercure se
rassemble alors sur la superficie de l’esprit sous forme de crème, mais c’est
un sel, ou une eau sèche qui, bien que liquide ne mouille pas les mains.
74e
Il reste dans l’esprit deux sortes de sels autres que le
mercure : savoir un sel nitreux et un sel fixe.
75e
En faisant subir à ces sels le travail des aigles, et les
travaillant l’un par l’autre, ils arrivent tous deux à une forme parfaite
mercurielle.
76e
Il y a deux voies pour avoir le soufre ; la voie humide, et
la voie sèche.
77e
La voie humide est celle que je viens d’enseigner, c’est la
plus longue, mais la plus noble, à cause des difficultés vaincues.
78e
La voie sèche, telle que Flamel et B. Trévisan l’on suivie,
mène au but, quoique particulière.
79e
Elle consiste à séparer la Teinture de l’or commun avec le
mercure du 7e aigle.
80e
On gagne ainsi sur le temps deux sublimations du mercure et
la coction entière de la terre des aigles.
81e
Quand on a procédé par la voie humide, il faut rejeter la
terre qui reste après l’extraction de la Teinture. C’est une terre damnée et
dommageable.
82e
Quelle que soit la voie que vous suiviez, il faut procéder
au mariage du Soufre et du Mercure.
83e
Ce sont de Nouveaux Cieux et une Nouvelle Terre que vous
allez marier ensemble, et qui produiront une nouvelle Jérusalem avec un roi
très puissant.
84e
Prenez une partie de votre Soufre ou Teinture laissez-la
sécher et il s’en formera une terre douce et agréable au toucher, d’un rouge
brun.
85e
Faites avec le Mercure vos imbibitions, comme à la première
opération, en suivant le poids de Nature.
86e
Après 40 Imbibitions qui sont réputées 40 jours le corps se
dissoudra, fermentera et pourrira.
87e
Ce sont ces deux Teintures, l’une rouge l’autre blanche que
le Petit Paysan nomme ses deux fleurs et que d’autres ont appelées Grande et
Petit Lunaire
88e
Il faut amener cette teinture rouge à la blancheur par
imbibitions avec le mercure.
89e
Ces imbibitions doivent être faites de manière que la terre
demeure ferme, quoique mouillée.
90e
La Science demeure dans les principes ; mais l’art consiste
à savoir dissoudre et pourrir.
91e
Celui-là est passé maître qui a atteint le degré de
putréfaction, car quoique ce soit le plus bas de l’Œuvre, il est réputé le plus
élevé à cause des difficultés qu’il présente pour y arriver.
92e
Le principal pas est fait pour arriver à la blancheur qui
est une médecine souveraine contre toute sorte de maux.
93e
Ce n’est pas qu’il ne reste quelques difficultés à vaincre,
mais elles ne sont pas insurmontables.
94e
On n’arrive pas de suite à la blancheur, il faut auparavant
dissoudre et noircir.
95e
Il faut que ce soit une dissolution radicale, que le corps
soit réduit en ses plus menues parties bien qu’il ne soit pas semblable à de
l’eau fluviale ou semblable.
96e
C’est à tort que quelques philosophes ont parlé de noircir
le blanc, car quoique la blancheur sorte de la noirceur, c’est néanmoins le
rouge que l’a blanchi et le même par conséquent qui le noircit.
97
Au surplus cette noirceur est un voile ténébreux qui couvre
la blancheur aussi bien que la rouge.
98e
On appelle la dissolution le Sceau de Mercure le bain-Marie,
le bain du Roi. Quant à la putréfaction dont la noirceur est le symbole, c’est
le fumier de bouc ou de cheval, et le Sceau de Saturne.
99 e
La dissolution est prise par les uns pour la première
matière des sages, et la putréfaction par les autres, eu égard à la réunion
essentielle et inséparable des deux substances.
100e
Quoi qu’il en soit, la dissolution est proprement le chaos
des sages, dans lequel le Ciel et la Terre sont renfermés, et la putréfaction
est leur principe matière.
101e
Ce n’est qu’au bout de 40 imbibitions que le corps se
dissout, fermente et pourrit.
102e
On appelle Tête de Corbeau, Saturne ou Plomb des philosophes
cette première noirceur.
103e
Comme au 1er travail on cesse d’administrer le feu externe
lorsque la dissolution est entière.
104e
La matière se conduit par son propre feu jusqu’au cercle de
la blancheur qui est la lune des philosophes, Diane, Latone ou le Laiton
blanchi.
105e
La blancheur commence par un cercle capillaire qui s’étend
de jour en jour jusqu’au centre ; mais avant d’arriver à la blancheur, la
matière passe du noir au gris qui est la couleur intermédiaire et qu’on nomme
le feu de cendre, et le Sceau de Jupiter.
106e
Le passage du gris au blanc est marqué par l’apparition de
plusieurs couleurs, parmi lesquelles domine la verte : ce qui a fait donner à
la blancheur le nom de Lion vert.
107e
Les sages nomment ces couleurs Iris, ou Queue de Paon.
108e
On compare ce travail jusqu’à la blancheur, au feu de
Réverbère.
109e
La blancheur, que nous avons dit être le règne de la Lune,
n’est qu’une demi génération. Les sages l’appellent terre feuillée pour deux
raisons principales.
110e
Une c’est que quand on la regarde de près, elle ressemble à
des feuilles de Talc brillant.
111e
Second c’est que la putréfaction où elle vient de passer est
le symbole de l’hiver pendant lequel la terre est couverte de feuilles dont une
nouvelle terre se forme au printemps, laquelle terre est appelée terre des
feuilles.
112e
La matière ne pouvant aller plus loin par son propre feu, il
faut recommencer le feu externe.
113e
Pour se préparer d’avance à la multiplication, il faut
séparer en deux la matière.
114e
On en met une part de côté, et on conduit l’autre à la
rougeur, en continuant le travail.
115e
On reprend donc ici le travail des imbibitions avec le
mercure, observant les poids de Nature.
116e
Il faut comme la première fois que la terre demeure entière
au fond du vaisseau.
117e
La matière perd peu à peu sa blancheur et arrive à une
couleur verte que l’on compare au Vitriol, et que l’on appelle le Sceau de
Vénus.
118e
Par la continuité du feu, elle acquiert une couleur jaune
safranée qui est le Sceau de Mars.
119e
La matière ne pouvant par le même degré de feu acquérir une
plus grande rougeur, il faut l’augmenter.
120e
On augmente le feu en imbibant le corps avec du mercure rouge
mis en réserve.
121e
On continue cette manière jusqu’à ce que la matière ait
acquis un rouge brun.
122e
Avant d’arriver à cette rougeur foncée, elle passe une belle
couleur de pourpre.
123e
La matière arrivée au rouge brun très foncé, est le vrai Or
fluide des sages, leur soleil, leur médecine universelle.
124e
Sauf les multiplications, il n’y a plus de difficultés à
vaincre.
125e
On possède deux médecines ; l’une blanche et l’autre rouge
pour guérir toute maladie.
126e
Ces deux médecines ne sont pas seulement utiles aux hommes,
mais aux végétaux et aux minéraux.
127e
Un arbre presque mort arrosé d’eau dans laquelle sera
dissout un seul grain pesant de cette médecine, reprendra vie, fleurira, et fructifiera.
128e
On fait avec cette médecine une infinité de merveilles
au-dessus du pouvoir naturel.
129e
Si vous projetez un grain de la médecine blanche sur dix de
bon argent, le tout sera médecine, dont un grain en transmuera 100 de métaux
imparfaits, en argent meilleur que celui des mines.
130e
Un grain de médecine rouge projeté sur de bon or en fusion,
fera de l’or dans la même proportion.
131e
Pour faire des perles plus grosses et plus belles que les
naturelles, on n’a besoin que d’en dissoudre avec le mercure et de les mouler
ensuite.
132e
On augmente de même manière le poids et la beauté du Diamant
et des pierres précieuses.
133e
On fait des Rubis artificiels, bien plus éclatants que les
naturels, par addition de teinture rouge.
134e
Mais il n’y a que Dieu seul qui puisse rappeler les corps de
la mort à la vie.
135e
La teinture rouge est le septième et le dernier Sceau
d’Hermès qui appartient au Soleil.
136e
On procède à la multiplication avec des parents d’un même
sang.
137e
On appelle parent d’un même sang les teintures blanche et
rouge d’une même opération.
138e
Le mercure qui n’a pas été accouplé avec la teinture rouge,
n’est pas propre à multiplier.
139e
Les médecines blanche et rouge du 1er degré sont parents
d’un même sang, et peuvent multiplier.
140e
C’est dans cette intention qu’on sépare les médecines en
deux, dans les Cercles de la blancheur et de la rougeur.
141e
On procède à la première multiplication en prenant une part
de teinture rouge qu’on dissout avec la blanche mise en réserve.
142e
Il faut auparavant dissoudre la blanche avec le mercure pour
procéder aux imbibitions.
143e
On recommence alors le premier travail avec les mêmes
conditions et observant le poids de Nature.
144e
Le pur séparé de l’impur abrège chaque fois de moitié le
temps de l’opération.
145e
La projection de cette seconde médecine se fait sur cent
d’argent ou d’or, comme ferment, et ensuite sur mille des métaux imparfaits.
146e
Le poids et la vertu de la médecine augmentant de dix à
chaque multiplication, une once, de la neuvième, transmutera un million en très
pur métal d’or ou d’argent.
147e
La vertu de cette médecine est si grande qu’elle peut en un
instant changer de face toute la Nature sublunaire.
148e
C’est pour que les méchants n’en approchent pas que les
sages la tiennent si cachée.
149e
Passé la neuvième multiplication la médecine ne peut plus
être contenue ; elle flue à travers le verre, comme l’huile à travers le papier.
150e
L’Œuvre entier s’achève en 150 jours, excepté les
multiplications qui peuvent conduire à deux cents.