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THOMAS D'AQUIN Traité sur la Pierre Philosophale


Saint Thomas d'Aquin


TRAITÉ DE SAINT THOMAS D’AQUIN
De l’Ordre des Frères prêcheurs
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LA PIERRE PHILOSOPHALE
ET PREMIÈREMENT
DES CORPS SUPERCELESTES
Suivi du Traité sur
L’Art de L’Alchimie
Traduit du latin pour la première fois, introduction et notes de
Grillot de Givry
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INTRODUCTION

En tirant de l’oubli le vieil ouvrage alchimique qui resplendit du nom de saint Thomas, nous n’ignorons pas les critiques qui nous seront certainement adressées. Il est pourtant bien inutile de les formuler encore une fois, car elles datent de deux siècles. Nous les connaissons bien et pourtant elles ne nous ont pas arrêté un instant dans notre travail. Elles ne sont pas irréfutables non plus, car de savants hommes les ont réfutées. Nous pourrions donc nous contenter de renvoyer à leurs ouvrages, rares aujourd’hui, mais nul ne prendrait la peine de les consulter et chacun garderait son opinion préconçue.
Puisque l’esprit de routine nous oblige à recommencer le travail de nos ancêtres, nous rappellerons brièvement les principaux traits de la controverse.
* *
La grande, la seule objection qu’on puisse faire contre l’authenticité du livre de saint Thomas, n’est basée sur aucun fait, aucun acte, aucun anachronisme, aucune contradiction constituant une preuve valable en paléographie ou en bibliographie.
Elle se résume ainsi : « L’alchimie étant (d’après l’opinion des critiques modernes) une œuvre du démon ou du moins une pitoyable rêverie, un saint, un génie puissant et fort comme le fut saint Thomas d’Aquin n’a pu y ajouter foi ».
Tel est, en effet, le fond puéril et spécieux de l’interminable dissertation que Naudé a écrite sur ce sujet (Apologie pour les grands hommes soupçonnez de Magie, par G. Naudé, Parisien, in-12, 1712.). Rigoureusement on pourrait ne rien répondre à un auteur qui a voulu prouver dans le même ouvrage que ni Zoroastre, ni Pythagore, ni Plotin, ni Porphyre, ni Jamblique, ni Jérôme Cardan, ni Geber, ni Arnauld de Villeneuve, ni Roger Bacon, ni Trithème, ni même... les Rois Mages n’avaient jamais été initiés à la Magie. Mais comme il représente bien l’état d’un grand nombre d’esprits qui mériteraient de mieux penser, nous examinerons sérieusement sa critique. Il débute (chapitre xvii) par cette phrase d’une langue extraordinaire :
« Je ne fais nulle doute que la fausseté si manifeste de ces calomnies ne soit une conjecture indubitable du jugement qu’il nous faut faire sur ces livres des Images de nécromancie, de l’Art Métallique, des secrets de l’Alchimie et de essentiis essentiarum, qui sont divulgués et se vendent tous les jours sous le nom de saint Thomas d’Aquin, surnommé à bon droit par Picus, splendor Theologiae, par Erasme, vir non sui saeculi, par Vives, Scriptor de schola omnium Sanissimus, et par le consentement de tous les Auteurs, avec celui de l’Église, le fidèle interprète d’Aristote et de la Sainte Écriture, la base et le fondement de la Théologie scolastique, et pour dire en un mot, le docteur Angélique. Car je vous prie, quelle apparence y aurait-il de se pouvoir imaginer que ce grand esprit qui fut canonisé en l’an 1322 et duquel la doctrine fut approuvée par un décret de l’Université de Paris, l’an 1333 et par trois souverains pontifes, Innocent V, Urbain VI et Jean XXII, se soit amusé ou à la Magie, ou à toutes les refueriës des Alchimistes !... »
Ainsi ce verbiage se résume : « Il me déplaît de concevoir saint Thomas alchimiste. Donc il n’a pu écrire d’œuvre alchimique. »
C’est, comme on le voit, la substitution d’une appréciation personnelle aux preuves précises, comme base du raisonnement. Autrement dit, c’est l’anarchie en matière de logique. Nous pourrions nous servir du même procédé et retourner simplement la proposition en disant : « La science occulte étant la plus sublime science ou mieux la seule science, il est bien naturel qu’un homme extraordinaire comme saint Thomas l’ait connue et pratiquée, et le pape étant un Mage ou du moins un homme animé dans ses décisions de l’esprit de magie, il n’a pu que l’approuver. »
« Mais, poursuit Naudé, les Alchimistes n’oublient véritablement qu’une seule chose pour se l’attribuer, et pour le ranger dans leur parti : qui est de retrancher et de corrompre comme le font les hérétiques, cet endroit de ses Commentaires sur le deuxième livre du Maistre des Sentences (Distinct. 7, quaest 3, art. 1, ad. 5.) où il combat formellement la possibilité de leur transmutation métallique. »
Mais Naudé s’est bien donné garde de citer le texte de ce passage parce qu’on eut pu s’apercevoir qu’il ne favorisait nullement ses théories et que saint Thomas ne « combattait pas formellement » la possibilité de la transmutation. Plus soucieux de la vérité nous le donnerons intégralement ici. Il se trouve dans l’énorme tome intitulé : Sancti Thomse Aquinatis in quatuor libros sententiarum Pétri Lombardi. Parisiis, 1659, in-folio. Nous l’ouvrons Lib. II. Distinct. VII. Quaest. III. Solutio 6, pag. 74, et nous trouvons les paroles suivantes :
(Sicvit)Alchymistae faciunt aliquid simile auro quantum ad accidenta exteriores : sed tamen non faciunt verum aurum : Quia forma substantialis auri non est per calorem ignis, quo utuntur alchymistse SED PER CALOREM SOLIS, IN LOCO DETERMINATO UBI viget virtus numeralis : Et ideo tale aurum non habet operationem consequentem speciem : Et similiter in aliis, quae per eorum operationem fiunt. »
Or, qui ne s’apercevra à la lecture de ce passage qu’il atteste chez son auteur une connaissance profonde des lois et des théories alchimiques ? Il s’agit d’abord, non pas de savoir si saint Thomas condamne l’alchimie, mais s’il l’a étudiée. Or ce passage en est la preuve ; il sait en quoi consiste sa pratique ; il connaît l’essence intime des métaux ; il dévoile même le grand secret dans les mots que nous avons soulignés, avec le parfait langage d’un alchimiste. Ces phrases n’ont pu être écrites que par un adepte. Voilà donc un point bien précis : saint Thomas connaît l’alchimie.
La condamne-t-il formellement ? Si Naudé avait lu quelques traités d’Alchimie avec un esprit impartial, il aurait constaté avec étonnement que les adeptes eux-mêmes tiennent souvent dans leurs traités un langage semblable. Insignium medicinarum nomina clangunt, dit Weidenfeld, iis ipsis incognitis et cortices dantur pro nucleis (SEGERI WEIDENFELD. De Secretis adeptorum liber. Hambourg, 1555). Il l’aurait retrouvé dans Paracelse, dans le Trévisan, dans le président d’Espagnet et aussi dans le traité que nous traduisons aujourd’hui, ce qui est une grande preuve de son authenticité.
Quelle est donc la théorie de saint Thomas ? Que les alchimistes ne font pas de l’or, mais changent seulement les accidents extérieurs des métaux. Est-ce là condamner l’alchimie? Il enseigne qu’on ne peut transmuer la matière ni changer sa nature intime. Elle est intransmuable, en effet, puisqu’elle est une. Mais il reconnaît qu’on ne change que les accidents, les espèces pour parler le langage scholastique. Les alchimistes ont-ils jamais enseigné autre chose ?
Saint Thomas s’attaque donc ici aux souffleurs comme l’ont fait tous les alchimistes. En disant tale aurum non habetoperationem consequentem speciem, il désigne l’or des souffleurs, qu’ils obtiennent par la chaleur du feu, per calorem ignis. Mais puisqu’il dit lui-même que l’or véritable s’obtient per calorem solis, in loco determinato, n’est-il pas évident que celui qui connaîtra ce qu’il désigne par les mots énigmatiques de calor solis c’est-à-dire la lumière astrale et qui connaîtra également le locus determinatus ubi viget virtus mineralis, c’est-à-dire l’athanor construit d’après les règles principielles données par le grand athanor de la nature, n’est-il pas évident que celui-là pourra produire le verum aurum quod habebit operationem consequentem speciem ?
Qu’on me permette de citer et comparer ici Paracelse (PARACELSE : Les XIV livres des paragraphes de Paracelse Bombast, Paris, 1631, in-4, discours de l’ai chimie. Troisième fondement de la médecine paracelsique, page 13). « Or, dit-il, l’opération du cours céleste est admirable, car encore que le travail de l’artiste soit estimé de soi merveilleux, néanmoins ceci est digne de grande admiration que le CIEL cuit, digère, imbibe, dissout et réverbère beaucoup mieux que l’Alchimiste, en telle sorte que le cours du ciel enseigne le cours et régime du feu dans l’arcane que l’on veut préparer. »
N’est-ce pas là, avec une phraséologie différente, la pensée même de saint Thomas d’Aquin ? Cette similitude entre le Grand-Maître de la médecine occulte et le Grand-Maître de la philosophie scolastique embarrassera beaucoup les sceptiques et les incrédules ; pour nous elle est un appui considérable.
Dom Pernety (Fables égyptiennes et grecques, t. I, p. 170. Paris, 1786.) cite un auteur anonyme qui dit que, pour connaître la matière du feu philosophique, il suffit de savoir comment le « feu élémentaire prend la forme du feu céleste ».
Le dictionnaire hermétique attribué à Salmon (Paris, 1695, petit in-8°.) enseigne que c’est la lumière du soleil accompagnée de la chaleur vivifiante qui est le principe de tous les mouvements du monde.
Sans vouloir prolonger ces citations, constatons seulement que tous les alchimistes ont prohibé l’emploi du feu ordinaire et que saint Thomas le leur attribuant, désigne incontestablement les souffleurs.
Et Naudé ajoute, avec sa grâce habituelle :
« Témoin sans nous embarrasser dans une infinité de preuves (il n’en avait déjà donné aucune) qu’ils font parler ce grand docteur si puérilement dans le livre de Essentiis Essentiarum, qu’il faudrait n’avoir jamais davantage feuilleté ses œuvres que les Margajats et les Topinamboux (?) pour croire que des conceptions « si basses et si rampantes puissent venir « d’un esprit si sublime et si relevé. »
Or, ce n’est toujours là qu’une appréciation, et ce qui est pis, une appréciation de ce XVIIe siècle, admirable à d’autres égards, mais qui adaptait de mauvais portails grecs aux cathédrales gothiques et ne pouvait, par conséquent, comprendre entièrement saint Thomas qui incarne le Moyen-Age.
De plus, l’argument n’a aucune valeur ; en supposant que la différence entre l’œuvre alchimique et l’œuvre théologique de saint Thomas d’Aquin soit si sensible, serait-ce la première fois qu’une contradiction de ce genre apparaîtrait dans un homme de génie ? Il suffit de connaître un peu l’humanité pour ne pas faire usage de tels arguments.
Ne l’oublions pas ; un point incontesté et incontestable d’ailleurs, c’est que saint Thomas a été le disciple le plus illustre d’Albert-le-Grand. Or il serait bien difficile et bien paradoxal de vouloir disculper ce dernier d’avoir pratiqué la Magie et l’Alchimie, si toutefois culpabilité il y a. Et il serait peut-être plus incroyable encore de prétendre qu’un maître qui attachait une si grande importance à la science du mystère, n’en ait pas enseigné à son disciple au moins quelques notions. Le livre que nous traduisons aujourd’hui serait donc le résumé précieux de ces enseignements que saint Thomas aurait recueillis de la bouche même de son maître, avec la vénération qu’il lui porte toujours. Rien ne s’oppose à la vraisemblance de ce fait.
Mais, dira-t-on, c’est là une œuvre de jeunesse que saint Thomas eut désavouée plus tard ! Outre qu’il n’a jamais écrit ce désaveu nulle part, ce n’est pas à l’auteur lui-même à porter un jugement sur son œuvre parce qu’il s’y trompe presque infailliblement. L’expérience acquise par une longue pratique, l’évolution constante de son esprit lui font toujours regarder ses premiers essais comme des jeux d’enfants, tandis que ces essais paraissent encore de belles œuvres à ceux qui ont évolué dans une voie différente.
Le traité De Lapide Philosophico, à quelque époque de la vie de saint Thomas qu’il appartienne, est donc bien, selon toute probabilité, de cet auteur, et lorsqu’une tradition constante confirme cette probabilité, elle devient une certitude.
Naudé s’efforce de nous démontrer son infériorité, mais n’avons que faire de son appréciation ; ce que nous lui demandons, ce sont des preuves précises d’inauthenticité. Ces preuves il ne peut les donner, non plus que ceux qui voudraient adopter son opinion. Or cette constatation nous est suffisante.
Il n’est pas inutile de remarquer ici quel était véritablement le rôle de l’alchimie au Moyen-Age. On croit généralement qu’elle était un objet d’horreur, d’anathème et de malédiction, au même titre que les maléfices, les empoisonnements et les homicides. Rien n’est moins exact. « La pierre philosophale, comme le fait judicieusement observer le commentateur de Bonaventure Des Périers (Edition Garnier, 1872), était presque un article de foi au Moyen-Age. »
Nous ne citerons pas tous les auteurs ecclésiastiques qui en parlent en effet avec admiration ; contentons-nous de rappeler Marbode (De Lapidum) ; puis Jacques de Voragine dans la Legenda aurea, Pierre de Natalibus dans le Catalogus Sanctorum, qui disent, à la vie de sainte Marguerite, que la Pierre peut chasser le mauvais génie.
C’était de plus une des sciences exactes de cette époque. Sans faire toutefois partie des « sept arts » à cause de son enseignement initiatique, on l’étudiait néanmoins comme l’arithmétique, la cosmologie, la physique, la musique de ces mêmes temps et dont il nous reste des traités d’Albert le Grand, Sainte Hildegarde, Hucbald de Saint-Amand et autres. On n’imputait pas plus son invention au démon qu’on ne lui imputait celle du Trivium ou du Quadrivium. Pour parler en universitaire, c’était la « chimie » de cette époque. Elle faisait partie de la somme de science de tout homme vraiment érudit.
Est-il admissible qu’une science, si importante, si féconde en points métaphysiques de comparaison, cultivée par les plus graves personnages ait échappé à l’étude de Saint Thomas, et qu’il ait négligé d’y apporter le puissant esprit d’investigation qui le caractérisait? Et tandis qu’il aurait prêté attention au cours des astres, à la formation des météores, aux phénomènes du mouvement, le vaste champ d’observation des transformations de la matière l’auraient laissé indifférent ?
Saint Thomas admet d’ailleurs l’alchimie en plusieurs passages de son œuvre : Voyez Summa, Theologica. 2, 2, quest. 77, art. 2. Et Lib. 4, Meteorum initio.
Dans un autre ouvrage, il traite de l’astrologie judiciaire, qu’il est loin de condamner expressément, n’en désapprouvant que les abus. (Opusculum XXVI : Dejudiciis astrorum, 1857, in-8°. Tome 3.)
Ce dernier ouvrage, dont nul ne conteste l’authenticité, est dédié ad fratrem reginaldum ordinis prsedicatorum. Or, ce frère Reinaldus ou Renauld est précisément le même auquel est dédié le second traité d’Alchimie qu’on trouvera plus loin.
Ailleurs (Opuscul. de regimine principium. Lib. II, cap. VII), Saint Thomas enseigne qu’un roi doit posséder quantité de richesses d’or et d’argent.
Théorie d’une haute portée politique, mais qu’il est bien difficile d’expliquer sans supposer l’appui tacite de l’alchimie. « Sans richesses il est très difficile de s’enrichir, dit énigmatiquement Lao Tseu. » (Tao, 3e page). Il paraîtrait plaisant, en effet, de commander à un homme d’être riche sans lui en faciliter les moyens. Et si l’on rapproche cette assertion de la coutume suivie par les adeptes de remettre leur secret entre les mains des puissants, des rois ou des papes pour le plus grand bien de tous, on acquerra la certitude que Saint Thomas désigne le grand Œuvre par ces paroles mystérieuses.
* *
Les absurdes négations de Naudé ne pouvaient rester sans réponse. Le R. P. Jacques d’Autun, prédicateur capucin, publia quelque temps après : L’incrédulité savante et la crédulité ignorante, au sujet des magiciens et des sorciers avec la réponse à un livre intitulé Apologie pour tous les grands personnages qui ont été faussement soupçonnez de magie. Lyon. Jean Molin, 1671, in-4°.
Cet excellent livre est malheureusement presque sans utilité dans la question qui nous occupe, malgré ce que semble promettre son titre. En effet, Saint Thomas n’étant pas un des auteurs les plus violemment attaqués par Naudé, Jacques d’Autun n’a consacré que quelques lignes à son sujet (page 1090) en laissant complètement de côté de l’alchimie.
Un appui beaucoup plus précieux, nous sera donné par le R. P. de Castaigne, religieux de l’ordre de Saint-François, docteur en théologie, abbé de Sou, conseiller, aumônier ordinaire du roi et nommé Evêque de Saluées par Louis XIII, dont nul ne suspectera l’orthodoxie. Dans ses Œuvres tant médicinales que Chymiques (Paris, Jean d’Houry. Seconde édition, 1661), dédiées à François Favre, évêque d’Amiens et grand maître de l’Oratoire du Roy, nous trouvons (IIe partie, page 4) un avertissement pour l’Œuvre philosophique de Jean Saunier, ainsi conçu : « Mais aussi que dirons-nous de ce grand Docteur Angélique Saint-Thomas d’Aquin, de l’ordre des Vénérables Pères Prêcheurs, qui lui-même faisait cette sainte œuvre de l’or Potable. Et moi-même ai entre mes mains son original écrit de sa propre main en latin et se commence : Sicut lilium inter spinas. Et s’il en secourait les malades en faisant les Saintes Œuvres de miséricorde. Ne serait-il pas repris par aucuns envieux médecins de ce temps ci ? Oui : mais il leur dirait tanto dinaso. »
Mais l’abbé Langlet du Fresnoy est Fauteur qui semble avoir le mieux compris l’Œuvre alchimique de Saint Thomas et qui lui a rendu le plus pleinement justice (Histoire de la Philosophie hermétique, 3 vol in-12, 1742. Tome I, page 132). « Je conviens, dit-il, qu’un zèle indiscret a fait mettre sous le nom de cet homme illustre, quelques traités qui ne sont pas de lui ; mais il en a quelques autres que l’on aurait peine à lui contester. Celui de la nature des minéraux (de esse et essensia mineralium) n’est pas digne à la vérité d’un aussi grand philosophe, non plus que le commentaire sur la Tourbe qu’on « lui attribue. Cependant, son trésor d’Alchimie adressé au Frère Regnauld, son compagnon et ami, ne respire que la pratique d’une philosophie singulière et secrète qu’il a vu du moins exercer par Albert-le-Grand qu’il cite dans ce Livre comme son maître en tout genre et surtout dans cette science...
« ...Ce petit traité ne contient que huit pages et c’est ce que j’ai vu de meilleur en ce genre pour qui le sait entendre. »
Cette opinion d’un des plus savants historiens de l’hermétisme est précieuse. Le petit traité au Frère Regnauld pourrait suffire en effet pour l’accomplissement de tout l’œuvre sans le secours d’aucun autre maître. Il vaut donc mieux faire taire toute objection, accepter une authenticité traditionnelle semblable à celle de la plupart des ouvrages antiques, et qui, loin de ternir la gloire de saint Thomas, ne fait qu’ajouter à &on éclat en augmentant d’un petit traité admirable la série incomparable de chef-d’œuvres qu’il a légués à l’Église.
A toute contestation possible, nous opposerons l’exemple du Liber eruditionis principium, imprimé pour la première fois en 1857, sous le nom de Saint Thomas (Opuscules de saint Thomas, Paris, Vivès, 1857, tome IV) et qui venait d’être découvert à la Bibliothèque du Vatican.
Nul n’en a mis en doute l’authenticité : pourtant jamais mention n’en avait été faite auparavant et aucune preuve ne pouvait le faire attribuer à saint Thomas sinon qu’on a inscrit au commencement de l’ouvrage, le nom de ce grand Docteur. C’est précisément le cas du Traité de la Pierre. Le nom de Saint Thomas s’y trouve inscrit par tradition et si la preuve a paru suffisante après six siècles pour lui attribuer un manuscrit inconnu, à plus forte raison le sera-t-elle pour son œuvre alchimique qui a d’autres antécédents.
Ajoutons qu’aucun des traités hermétiques de saint Thomas n’est porté à l’index du concile de Trente.
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Les deux traités dont nous donnons pour la première fois une adaptation française se trouvent réunis au Tome III du Theatrum chemicum (Argentorati, in-8°, 1613), sous le titre général de : Secreta Alchemiae.
Le premier traité est intitulé De Lapide Philosophico. Il se trouve encore en partie dans les éditions suivantes :
S. Thomas de Esse et Essentia mineralium, in-4°, Venetiis, 1488.
Cette édition, donnée un peu plus de deux cents ans après la mort de Saint Thomas et à l’origine de l’imprimerie prouve que la gloire alchimique de ce Docteur date de fort loin et que les manuscrits en devaient être alors très répandus.
Idem, in-8°, 1592.
Idem, au Tome V du Theatrum chemicum, page 806.
C’est ce traité de Esse et Essentia mineralium ou suivant d’autres, de Esse et Essentia metallorum ou encore de Essentiis Essentiarum, dont l’abbé Lenglet du Fresnoy met en doute l’authenticité comme nous l’avons vu plus haut. Mais il est probable qu’il ne connaissait que ces trois dernières éditions qui sont visiblement tronquées et qui ne paraissent que des ébauches de la première citée. En effet, il manque dans celles-là le premier et les trois derniers chapitres que l’on trouve au Tome III du Theatrum et que nous avons traduits ; en outre, on y remarque de nombreuses variantes.
Il est incontestable que ce traité porte des traces nombreuses de remaniements, ainsi que des incorrections très grandes. Le texte en devient parfois si obscur, qu’on le croirait écrit cabalistiquement, quoiqu’il n’en soit rien. Nous avons suivi dans cette traduction le texte du Tome III en le conférant avec celui des autres éditions et de quelques manuscrits offrant des leçons plus correctes, sans nous flatter toutefois d’avoir tranché toutes les difficultés.
Pour terminer la bibliographie de ce premier traité, nous savons, par un document très secret, qu’il existait, au xvn6 siècle, une traduction française de la partie tronquée de cet ouvrage, et qui avait été faite sur l’édition de Venise, mais n’avait jamais été imprimée. C’était un manuscrit in-folio qu^on trouverait peut-être aujourd’hui dans quelque bibliothèque privée, si les vicissitudes des temps l’ont respecté.
Quant au second traité qui se trouve également au tome III du Theatrum, intitulé Thésaurus Alchemiae et dédié au frère Renauld, nous en connaissons les éditions suivantes :
Thomse aquinatis, secreta Alchimiae ; Colonise, 1579.
2° Id., Secreta Alchimiae magnalia, in-8° Lugduni, sans date.
Id., Lugduni Batavorum, 1598 ;
Thomae Aquinatis Alchimise magnalia, Item Thésaurus Alchimiae, in-8°, Lugduni, 1602.
Nous ne reviendrons pas sur les éloges que Langlet du Fresnoy a donnés à ce traité.
Il existe encore une œuvre de saint Thomas dont la traduction n’a, pu trouver place ici, et dont l’intérêt est moindre à la vérité. Il est titré : Liber Lilii benedicti nuncupatum, etc. C’est un commentaire sur un poème alchimique de 18 vers (Theatrum chemicum, tome IV, page 959). C’est peut-être cette œuvre dont le R. P. de Castaigne possédait le manuscrit de la main même de saint Thomas. Toutefois, je crois plutôt qu’il s’agit encore d’une autre œuvre perdue aujourd’hui.
Enfin, signalons le commentaire sur la Tourbe des philosophes dont parle Langlet du Fresnoy, mais que je ne connais pas sous le nom du docteur Angélique.
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Avant d’entreprendre la lecture de ce traité, souvenons-nous que les adeptes recommandent la prière et surtout la pureté du cœur. Que les incrédules méditent cette parole de l’Ecriture : Altissimus DE TERRA creavit medicamentum quod sapiens non despiciet (Eccl. c. 38, v. 4) à laquelle 3 on ne peut donner qu’un sens alchimique. Et cette autre : (Proverbes, chap. III, 16.) La sagesse a la, longueur des jours dans sa droite, et dans sa gauche les richesses et la gloire ! Admirable définition de la pierre philosophale, qui est à la fois, suivant tous les auteurs, une médecine qui prolonge la vie et une source intarissable de richesses, tandis que la science qui y conduit est la sagesse par excellence.
L’adepte se souviendra en outre que la connaissance parfaite de toutes les combinaisons du Tarot est nécessaire pour l’accomplissement de l’œuvre. Ce secret, renouvelé ici pour la première fois depuis trois siècles, se trouve contenu implicitement dans l’ouvrage intitulé : La Toison d’Or ou la fleur des trésors, en laquelle est succinctement et méthodiquement traité de la Pierre des Philosophes, par ce grand philosophe Salomon Trismosin, précepteur de Paracelse, Paris, 1613. On y trouvera vingt-deux figures en couleur qui représentent les vingt-deux phases des sept opérations principales de la transmutation.
Nous donnerons également à méditer les sentences symboliques qui accompagnent les planches admirables d’un ouvrage hermétique presque inconnu, mais le plus élevé et le mieux inspiré, peut-être (Escalier des Sages ou Trésor de la philosophie des anciens, mis en lumière par Barent Coenders van Helpen, gentilhomme. Cologne, 1693, in-folio.), qui existe.
Ars Laboriosa Convertens Humiditate Ignea Metalla In D.
Caliditas Humiditas Algor Occulta Sivitas.
Cunctipotens Autor Lucis Omnia Regit.
Author Mundi Omnipotens Rex.
Iucunde Generat Natura Ignea Solis.
Iu Gehenna Nostrae Ignis Scientiae.
Aurifica Ego Regina.
Album QVehit Aurum.
Trium Elementorum Receptaculum Recondo Aurifodinam.
Separando Venerum Leniter Philosophiis
Homogeneam Viscositatem Resuscitat.
Medicinam Ego Rubeam Creo Universalem Regiamque In Utero Soli.
Solus Altiora Laboro.
Ces sentences donnent, en quelque sorte, la clef absolue de l’Œuvre, et nous terminerons en souhaitant au lecteur, comme l’ont fait tous les Adeptes, la plus parfaite réussite dans leurs expériences, s’ils veulent placer leur confiance et leur espérance uniquement en Dieu.
CHAPITRE PREMIER.

Aristote, au premier livre des Météores, enseigne qu’il est beau et louable de rechercher par de profondes investigations la cause première qui dirige l’admirable concert des causes secondes, et les sages voyant des effets en toutes choses, parviennent à en scruter les causes occultes.
Nous voyons ainsi les corps célestes exercer une action marquée sur les éléments et par la seule vertu de la matière d’un seul élément, puisque de la matière de l’eau, par exemple, ils peuvent extraire les modalités aériforme et igniforme.
Tout principe naturel d’activité produit, dans sa durée d’action, une multiplication de lui-même, comme le feu communiqué au bois, extrait de ce bois une plus grande quantité de feu.
Nous parlerons donc ici des agents les plus importants qui existent dans la nature.
Les corps supercélestes se présentent toujours à nos yeux, revêtus de la forme matérielle d’un élément, mais ne participent pas de la matière de cet élément, et ces sphères sont d’une essence beaucoup plus simple et subtile, que les apparences concrétisées d’elles-mêmes, que nous apercevons seulement (1). Et Rogerius a fort bien exposé ceci : Tout principe d’activité, dit-il, exerce son action par sa propre similitude, cette dernière se transformant en même temps en principe passif récepteur, mais sans différer spécifiquement du principe actif qui l’a engendrée ; par exemple l’étoupe étant placée près du feu, sans le toucher cependant, celui-ci multipliera son espèce (2) comme tout autre principe d’action, et cette espèce sera multipliée et recueillie dans l’étoupe, autant par l’action naturelle et continue du feu que par l’aptitude de passivité que possède l’étoupe, puis se vivifiera jusqu’à l’accomplissement complet de l’acte du feu. Par quoi il est manifeste que la similitude du feu n’est pas différente du feu lui-même, in specie. Mais certains principes possèdent une action spécifique intensive, de telle sorte qu’ils peuvent la corroborer par leur propre similitude en se multipliant et se reformant sans cesse dans toutes choses ; tel le feu. D’autres, au contraire, ne peuvent pas multiplier leur espèce par similitude et transmuer chaque chose en eux-mêmes : tel l’homme.
En effet, l’homme ne peut pas agir par la multiplication de sa similitude comme il agit par son acte propre, parce que la complexité de son être l’oblige toujours à accomplir une pluralité d’actions. C’est pourquoi, comme le prouve Rogerius au livre de Influentiis, si l’homme pouvait, au contraire, produire une action puissante au moyen de sa similitude comme le feu, il est sans aucun doute, que son espèce serait véritablement un homme, d’où l’on ne pourrait inférer que la similitude multipliée de l’homme ne serait pas complètement un homme, étant placée alors au-dessus de l’espèce.
Par conséquent, lorsque les corps supercélestes exercent leur action sur un élément, ils agissent par leur similitude et, de plus, produisent quelque chose de semblable à eux et presque de la même espèce. Donc, puisqu’ils produisent l’élément de l’élément et la chose élémentée de la chose élémentaire, il s’ensuit nécessairement qu’ils participent eux-mêmes de la nature de l’élément. Et, afin de mieux comprendre ceci, il faut observer que le soleil produit du feu des corps saturés d’eau urinaire et des corps cristallins sphériques.
Tu dois savoir, en outre, que tout principe d’activité, selon qu’il est prouvé au livre de Influentiis, multiplie sa similitude suivant une ligne perpendiculaire droite et forte, ce que l’on voit évidemment dans l’exemple pris de l’étoupe et du feu, qui se joignent d’abord en un point pris sur une ligne perpendiculaire idéale ; ce que l’on voit également, lorsque l’urine ou le cristal sont exposés au soleil et reçoivent l’influence des rayons solaires qui sont leur similitude. Si l’on opère par l’intermédiaire d’un miroir, lorsque le rayon du soleil sera projeté perpendiculairement, on le verra traverser entièrement l’eau ou le corps transparent sans s’y briser à cause de l’extrême coefficient de puissance de son action : si, au contraire, il est projeté en une ligne droite non perpendiculaire il se brisera à la surface du corps, et un nouveau rayon se formera dans une direction oblique ; le point de jonction de ces deux rayons se trouvant pris sur la ligne perpendiculaire idéale. Et c’est le point de l’énergie maxima de la chaleur solaire car si l’on y place de l’étoupe ou tout autre corps combustible, il s’enflammera immédiatement.
Il résulte donc de tout ceci que, lorsque la similitude du soleil (c’est-à-dire les rayons du soleil) est corroborée par l’action continue du soleil même, elle engendre le feu. Le soleil possède ainsi le principe et les propriétés du feu, comme on le prouve par les miroirs ardents.
On construit cette sorte de miroirs, d’acier parfaitement poli, de telle forme ou disposition que, réunissant le faisceau des rayons solaires, ils le projettent suivant une ligne unique d’une grande force incandescente ; on place le miroir près des villes, des cités ou de tout autre lieu, lesquels ne tardent pas à s’embraser, ainsi que le dit Athan, au livre des Miroirs ardents.
Il est manifeste que le soleil et les autres corps supercélestes ne participent en aucune manière de la matière de l’Elémental et par conséquent sont exempts de corruptibilité, de légèreté et de pesanteur.
Ici il faut opérer une distinction entre les éléments : certains sont simples et infiniment purs, n’ayant pas la vertu transmutative nécessaire pour évoluer jusque dans un autre plan de modalisation, parce que la matière dont ils sont formés se trouvant délimitée par la plus parfaite forme qui lui puisse convenir, ils n’en désirent pas d’autre ; et de ces éléments sont formés probablement les corps supercélestes. Car nous plaçons réellement l’eau (3) au-dessus du firmament et du cristallin. De même nous pouvons en dire autant des autres éléments, et c’est de ces éléments que sont composés les corps supercélestes, par la puissance divine ou par les intelligences dans lesquelles elle s’est ministérialisée. Par ces éléments ne peuvent être engendrées ni pesanteur, ni légèreté, parce que ce sont des accidents qui n’appartiennent qu’aux terres grossières et lourdes. Toutefois ils produisent le phénomène de la coloration parce que les diversités dans la lumière sont dues à un fluide de la série impondérable. Ces corps supercélestes paraissent en effet de couleur dorée et de plus scintillent comme s’ils étaient frappés eux-mêmes d’un rayon de lumière, de même qu’un bouclier doré scintille et projette son éclat lorsqu’il est frappé par les rayons du soleil. Les astrologues attribuent donc à ces éléments la cause de la scintillation et de la couleur dorée des étoiles, comme l’ont suffisamment prouvé Isaac et Rogerius dans le livre de Sensu, et puisqu’elles sont engendrées de certaines qualités des éléments il s’ensuit qu’il est dans la nature élémentale de les posséder.
Mais comme ces éléments sont, de leur nature d’une infinie pureté et jamais mélangés d’aucune substance inférieure, il s’ensuit obligatoirement que dans les corps célestes ils doivent se trouver corporalisés et proportionnalisés de telle sorte qu’ils ne peuvent se séparer les uns des autres. Et ceci ne devra nullement étonner car en coopérant à la nature par les procédés de l’artiste, j’ai séparé moi-même les quatre éléments de plusieurs corps inférieurs, de façon à les obtenir chacun séparément, soit l’eau, le feu ou la terre ; j’ai purifié autant qu’il m’a été possible chacun de ces éléments l’un après l’autre par une opération secrète et ceci accompli, je les ai conjoints ensemble et j’ai obtenu une chose admirable (quaedam admirabilis res) qui n’était soumise à aucun des éléments inférieurs (4), car en la laissant aussi longtemps que possible dans le feu elle n’était pas consumée et n’éprouvait aucun changement (5). Ne soyons donc pas étonnés si les corps célestes sont d’une nature incorruptible, puisqu’ils sont composés entièrement d’éléments, et il est sans aucun doute que la substance que j’avais obtenue participait beaucoup de la nature de ces corps. C’est pourquoi Hermogènes, qui fut trois fois grand (triplex fuit) en philosophie s’exprime ainsi : Ce fut pour moi une grande joie à nulle autre pareille de parvenir à la perfection de mon œuvre et de voir la quinte essence sans aucun mélange de la matière des éléments inférieurs.
Une partie de feu possède plus d’énergie potentielle que cent parties d’air et par conséquent une partie de feu peut aisément dompter mille parties de terre. Nous ignorons suivant quelles proportions pondérales absolues s’opère la mixtion de ces éléments ; toutefois par la pratique de notre art nous avons observé que lorsque les quatre éléments sont extraits des corps et purifiés chacun séparément, il faut pour opérer leur conjonction prendre par poids égaux l’air, l’eau et la terre, tandis que l’on n’ajoute que la seizième partie de feu. Cette composition   est  véritablement formée de tous les éléments quoique pourtant les propriétés du feu dominent encore sur celles des autres. Car en projetant une partie sur mille de mercure on peut remarquer qu’il se coagule et devient rouge. Ce par quoi il est évident qu’une telle composition est d’une essence approchante de celle des corps célestes puisque dans la transmutation elle se comporte à la manière du principe actif le plus énergique (6).
CHAPITRE II.
DES CORPS INFÉRIEURS : DE LA NATURE ET DES PROPRIÉTÉS DES MINÉRAUX ET PREMIÈREMENT DES PIERRES.

Nous allons traiter maintenant des corps inférieurs. Mais comme ceux-ci se divisent en minéraux, plantes et animaux, nous commencerons par étudier la nature et les propriétés des minéraux. Les minéraux se divisent en pierres et en métaux. Ces derniers sont formés d’après les mêmes lois et suivant les mêmes rapports quantitatifs que les autres créatures, excepté que leur constitution particulière résulte d’un plus grand nombre d’opérations et de transmutations que celle des éléments ou des corps supercélestes, car la composition de leur matière est pluriforme.
La matière qui compose les pierres est donc d’une nature très inférieure, grossière et impure et possédant plus ou moins de terrestréité suivant le degré de pureté de la pierre. Comme le dit Aristote dans son livre des Météores (que certains attribuent à Avicenne), la pierre n’est pas formée de terre pure ; c’est plutôt une terre aqueuse (7) ainsi que nous voyons certaines pierres se former dans les fleuves, et le sel s’extraire par évaporation de l’eau salée. Cette eau possédant beaucoup de terrestréité, elle se coagule sous forme pétrifiée, par la chaleur du soleil ou du feu.
La matière dont se compose les pierres est donc une eau grossière; le principe actif: la chaleur ou le froid qui coagulent l’eau et en extraient l’essence lapidiforme (8). Cette constitution des pierres est prouvée par l’exemple des animaux et des plantes qui ressentent les propriétés des pierres et en produisent eux-mêmes, ce qui mérite d’être considéré avec la plus grande attention.
Certaines de ces pierres se trouvent en effet coagulées dans les animaux, par l’effet de la chaleur, et quelquefois possèdent des propriétés plus énergiques que celles qui ne proviennent pas des animaux et se sont formées suivant la voie ordinaire. D’autres pierres sont formées par la nature elle-même, activée par la vertu d’autres minéraux. Car, dit Aristote, on obtient par le mélange de deux eaux différentes, l’eau appelée Lait de la Vierge (9) et que l’on coagule elle-même en pierre. Pour cela, dit-il, on mélange de la litharge dissoute dans le vinaigre avec une dissolution de sel alcali et quoique ces deux liquides soient fort clairs, si on opère leur conjonction, ils ne laissent pas de former immédiatement une eau épaisse et blanche comme du lait (10). Imbibés de cette eau, les corps qu’on voudra transformer en pierres, se coaguleront immédiatement. En effet, si la chaux d’argent ou un autre corps semblable est arrosé de cette eau et traité ensuite chimiquement par un feu doux, il se coagulera. Le lait de la Vierge possède donc véritablement la propriété de transformer les chaux en pierres. Nous voyons également dans le sang, les œufs, le cerveau ou par les cheveux et autres parties des animaux, se former des pierres (11), d’une efficacité et d’une vertu admirables. Si l’on prend par exemple, du sang humain, et qu’on le laisse putréfier dans le fumier chaud, puis qu’on le place dans l’alambic, il distillera une eau blanche semblable à du lait. On augmente ensuite le feu et il distillera une sorte d’huile. Enfin, on rectifie le résidu (foeces) qui reste dans l’alambic et on le rend blanc comme neige. On le mélange avec l’huile qu’on verse dessus et il se forme alors une pierre limpide et rouge, d’une efficacité et d’une vertu admirables, qui arrête (stringit) le flux du sang et qui guérit de nombreuses infirmités (12). Nous en avons également extrait une des plantes par la méthode suivante : Nous brûlons des plantes dans le fourneau de calcination, ensuite nous convertissons cette chaux en eau, nous la distillons et coagulons; elle se transforme alors en une pierre douée de vertus plus ou moins grandes, suivant les vertus des plantes employées et leur diversité. Certains produisent des pierres artificielles, lesquelles, à l’examen le plus minutieux paraissent semblables en tous points aux pierres naturelles, car on fait des hyacinthes artificielles qui ne diffèrent pas des hyacinthes naturelles (13), ainsi que des saphirs, par un procédé identique.
On dit que la matière de toutes les pierres précieuses est le cristal qui est une eau n’ayant que très peu de terrestréité, et coagulée sous l’action d’un froid extrême (14). On pulvérise du cristal sur du marbre ; on l’imbibe d’eaux fortes et de dissolvants énergiques, en recommençant plusieurs fois, le desséchant et le pulvérisant de nouveau pour l’humecter encore avec les dissolvants, jusqu’à ce que le mélange ne forme plus qu’un corps bien homogène ; on le place ensuite dans le fumier chaud où il se convertit au bout d’un certain temps en eau ; on distille celle-ci qui se clarifie et se volatilise en partie. On prend ensuite un autre liquide rouge, fait de vitriol rouge calciné et d’urine d’enfants (15). On mélange et on distille de la même manière un grand nombre de fois ces deux liqueurs, suivant les poids et les proportions nécessaires ; on les met dans le fumier afin qu’elles se mélangent plus intimement et ensuite on les coagule chimiquement (in Kymia) par un feu lent, ce qui forme ainsi une pierre semblable en tout à l’Hyacinthe. Quand on veut faire un saphir, la seconde liqueur se forme d’urine et d’azur au lieu de vitriol rouge, et ainsi des autres selon la diversité des couleurs, l’eau employée devant être naturellement de la même nature que la pierre qu’on veut produire. Le principe actif est donc la chaleur ou le froid, et soit que la chaleur soit douée ou que le froid soit très intense, ce sont eux qui extraient de la matière la forme de la pierre qui n’était qu’en puissance et comme ensevelie (sepultam) au fond de l’eau. On peut distinguer dans les pierres comme dans toutes choses trois attributs, savoir : la substance, la vertu et l’action. Nous pouvons juger de leurs vertus par les actions occultes et très efficaces qu’elles produisent, comme nous jugeons des actions de la nature et des corps supercélestes.
Il n’est donc pas douteux qu’elles possèdent certaines des propriétés et vertus occultes des corps supercélestes, et qu’elles participent de leur substance ; ce qui ne veut pas dire qu’elles soient composées de la substance même des étoiles, mais bien qu’elles possèdent les vertus sublimées des quatre éléments, puisque certaines pierres participent un peu de la complexion des étoiles ou corps supercélestes, comme j’en ai touché quelques mots au traité de ces corps. Ayant isolé de quelques corps, les quatre éléments, je les purifiais et ainsi purifiés je les combinais ; je recueillis alors une pierre d’une efficacité et d’une nature si admirables que les quatre éléments, grossiers et inférieurs de notre sphère, n’avaient aucune action sur elle (16).
C’est en parlant de cette opération Hermogènes (le Père, comme l’appelle Aristote, qui fut trois fois grand en philosophie, et qui connaît toutes les sciences aussi bien dans leur essence que dans leurs applications), c’est en parlant, dis-je, de cette opération qu’il s’écrie : Ce fut pour moi le plus grand bonheur possible que de voir la quinte essence (17) dépourvue des qualités inférieures des éléments.
Il apparaît donc, évidemment, que certaines pierres participent un peu de la quinte essence, ce qui est certain et manifeste par les opérations de notre art.
CHAPITRE III.
DE LA CONSTITUTION ET DE L’ESSENCE DES METAUX.

Les métaux sont formés par la nature, chacun suivant la constitution de la Planète qui lui correspond et c’est ainsi que l’artiste doit opérer. Il existe donc sept métaux qui participent chacun d’une planète, savoir : l’Or qui vient du Soleil et qui en porte le nom ; l’Argent, de la Lune ; le Fer, de Mars ; le Vif-Argent, de Mercure ; l’Etain, de Jupiter; le Plomb, de Saturne ; le Cuivre et l’Airain, de Vénus. Ces métaux prennent, d’ailleurs, le nom de leur planète (18).
De la Matière essentielle des Métaux.
La première matière de tous les métaux est le Mercure (19). Dans les uns, il se trouve congelé faiblement, et dans les autres fortement (20). C’est pourquoi on peut établir une classification des métaux basée sur le degré d’action de leur planète correspondante, sur la perfection de leur soufre, sur le degré de congélation du mercure et de terrestréité qu’ils possèdent, ce qui leur assigne une place par rapport aux autres métaux.
Ainsi le plomb n’est autre chose que du mercure terrestre, c’est-à-dire participant de la terre, faiblement congelé et mêlé d’un soufre subtil et peu abondant ; et comme l’action de sa planète (V) est faible et éloignée, il se trouve en infériorité par rapporta l’étain, le cuivre, le fer, l’argent et l’or (21).
L’Etain est du vif argent subtil, peu coagulé mêlé d’un soufre grossier et impur ; c’est pourquoi il est sous la domination du cuivre, du fer, de l’argent et de l’or.
Le Fer (22) est formé d’un Mercure grossier et terrestréiforme et d’un soufre terrestre et très impur, mais l’action de sa planète le coagule fortement, c’est pourquoi on ne trouve au-dessus de lui que le Cuivre, l’argent et l’or. Le cuivre est formé d’un soufre puissant et d’un mercure assez grossier.
L’Argent est formé de soufre blanc, clair, subtil, non brûlant et d’un mercure subtilement coagulé, limpide et clair, sous l’action de la planète la Lune ; c’est pourquoi il n’est que sous la domination de l’or.
L’Or, véritablement le plus parfait de tous les métaux, est composé d’un soufre rouge, clair, subtil, non brûlant; et d’un mercure subtil et claire (23) fortement mis en action par le Soleil. C’est pourquoi il ne peut être brûlé par le soufre, ce qui est possible pour tous les autres métaux.
Il est donc évident qu’on peut faire de l’or de tous ces métaux, et que de tous, excepté de l’or, on peut faire de l’argent. On peut s’en convaincre par l’exemple des mines d’or et d’argent desquelles on extrait d’autres métaux mêlés avec des marcassites d’or et d’argent. Et nul doute que ces métaux se seraient transformés eux-mêmes en or et en argent, s’ils étaient restés dans la mine le temps nécessaire pour que l’action de la nature eût pu se manifester.
Quant à savoir si l’on peut faire artificiellement de l’or avec les autres métaux en détruisant les formes de leur substance et de quelle manière on opère, nous en parlerons dans le traité de esse et essentiarerum sensibilium (24). Mais ici nous l’admettons comme vérité démontrée.

CHAPITRE IV.
DE LA TRANSMUTATION DES METAUX ET PREMIÈREMENT DE CELLE QUI S’ACCOMPLIT PAR ARTIFICE.

La transmutation des métaux peut s’accomplir artificiellement par le changement de l’essence d’un métal en l’essence d’un autre car, ce qui est en puissance peut, évidemment, se réduire en acte comme dit Aristote ou Avicenne : les alchimistes savent que les espèces ne peuvent jamais être transmuées véritablement, mais seulement lorsqu’on a opéré la réduction en la matière première. » Or, cette matière première de tous les métaux approche beaucoup de l’aveu de tous, de la nature du mercure. Mais quoique cette réduction soit en grande partie l’ouvrage de la nature, il n’en est pas moins utile de l’aider par le moyen de l’art ; or, ceci est difficile, et c’est dans cette opération qu’on fait un grand nombre de fautes et que la plupart dissipent en vain leur jeunesse et leurs forces et séduisent les rois et les grands par de vaines promesses qu’ils ne peuvent pas tenir, ne sachant discerner les livres erronés, les impertinences, ni les opérations fausses écrites par les ignorants, puis finale ment n’obtiennent qu’un résultat complètement nul. Ayant donc considéré que les rois après des opérations minutieuses n’avaient pas pu arriver à la perfection, je crus que cette science était fausse. Je relus les livres d’Aristote ou Avicenne, de secretis secretorum où je trouvai la vérité tellement voilée sous des énigmes qu’ils paraissaient vides de sens ; je lus les livres de leurs contradicteurs et j’y trouvai des folies semblables. Enfin je considérais les principes de la NATURE, et je vis en eux la VOIE DE LA VERITE. J’observai en effet que le mercure pénétrait et traversait les autres métaux, car si l’on teint du cuivre avec de l’argent vif mélangé avec autant de sang et d’argile, ce cuivre sera pénétré intérieurement et extérieurement et deviendra blanc, quoique cette couleur ne soit pas durable (25). On sait déjà que l’argent vif se mixtionne avec des corps et les pénètre. Je considérais donc que si ce mercure était retenu il ne pourrait plus s’échapper et que si je pouvais trouver un moyen de fixer la disposition de ses molécules avec les corps, il s’ensuivrait que le cuivre et les autres corps mélangés avec lui ne seraient plus brûlés par ceux qui, les brûlant ordinairement, n’ont aucune action sur le mercure. Car ce cuivre serait alors semblable au mercure et en posséderait les mêmes qualités.
Je sublimais donc une quantité de mercure assez grande pour que la fixation de ses dispositions internes ne soit pas altérée, c’est-à-dire pour qu’il ne se subtilise pas au feu ; ainsi sublimé, je le fis dissoudre dans l’eau afin d’en opérer la réduction en matière première, j’imbibais largement avec cette eau de la chaux d’argent et de l’arsenic sublimé et fixé ; puis je fis dissoudre le tout dans du fumier chaud de cheval ; je congelais la dissolution et j’obtins une pierre claire comme du cristal ayant la propriété de diviser, de rompre les particules des corps, de les pénétrer et de s’y fixer fortement de telle sorte qu’un peu de cette substance projetée sur une grande quantité de cuivre la transformait immédiatement en un argent si pur, qu’il était impossible d’en trouver de meilleur. Je voulus éprouver si je pouvais également convertir en or notre soufre rouge ; j’en fis bouillir dans l’eau forte sur un feu lent ; cette eau étant devenue rouge, je la distillais à l’alambic et j’obtins comme résultat au fond de la cucurbite le soufre rouge pur que je congelais avec la pierre blanche susdite afin de la rendre également rouge. J’en projetais une partie sur une quantité de cuivre et j’obtins de l’or très pur.
Quant au procédé occulte que j’emploie, je ne l’indique que dans ses lignes générales et ne le place pas ici afin que nul ne commence à œuvrer à moins qu’il ne connaisse parfaitement les modes de sublimation, de distillation et de congélation et qu’il soit expert dans la forme des vases et des fourneaux et dans la quantité et la qualité du feu.
J’ai opéré aussi au moyen de l’arsenic et j’ai obtenu de très bon argent mais non de la plus parfaite pureté ; j’ai obtenu également le même résultat par l’Orpiment sublimé, mais cette méthode est appelée la transmutation d’un métal en un autre.
CHAPITRE V.
DE LA NATURE ET DE LA PRODUCTION D’UN NOUVEAU SOLEIL ET D’UNE NOUVELLE LUNE PAR LA VERTU DU SOUFRE EXTRAIT DE LA PIERRE MINÉRALE.

Il existe toutefois un mode plus parfait de transmutation qui consiste dans le changement du mercure en or ou en argent, par le moyen du soufre rouge ou blanc, clair, simple, non brûlant, comme l’enseigne Aristote, in secretis secretorum en une méthode très vague et très confuse, car ceci est LE SECRET DES SAGES (Absconditum sapientibus) ; il dit donc à Alexandre : La divine Providence te conseille de cacher ton dessein et d’accomplir le mystère que je t’exposerai obscurément, en nommant quelques-unes des choses dont peut s’extraire ce principe vraiment puissant et noble (26).
Ces livres ne sont pas publiés pour le vulgaire mais pour les initiés (propterprofectos).
Si quelqu’un, présumant de ses forces, commençait l’œuvre, je l’exhorte de ne le point faire, à moins qu’il ne soit très expert et habile dans la connaissance des principes naturels, et qu’il sache employer avec discernement les modes de distillation, de dissolution, de congélation et surtout les diverses sortes et degrés de feu (27).
D’ailleurs, l’homme qui veut réaliser l’œuvre par avarice n’y parviendra pas, mais seulement celui qui travaille avec sagesse et discernement.
La pierre minérale de laquelle on se sert pour produire cet effet est précisément le soufre blanc ou rouge clair, qui ne brûle pas et que l’on obtient par la séparation, la dépuration et la conjonction des quatre éléments (28).
Enumération des Œuvres minérales.
Prends donc, au nom de Dieu, une livre de ce soufre; triture-le fortement sur du marbre et imbibe-le avec une livre et demie d’huile d’olive très pure dont se servent les philosophes ; réduis le tout en une pâte que tu mettras dans un poêlon (sartagine physica) et que feras dissoudre ainsi au feu. Lorsque tu verras monter une écume rouge, tu retireras la matière du feu et laisseras descendre l’écume sans cesser de remuer avec une spatule de fer, puis tu mettras de nouveau sur le feu et tu réitéreras cette opération jusqu’à ce que tu obtiennes la consistance du miel. Remets ensuite la matière sur le marbre où elle se congèlera aussitôt comme de la chair ou comme du foie cuit ; tu la couperas ensuite en plusieurs morceaux de la grandeur et de la forme de l’ongle, et avec un poids égal de quintessence d’huile de tartre, tu les remettras au feu pendant deux heures environ.
Enferme ensuite l’œuvre dans une amphore de verre bien lutée avec le lut de sapience (29) que tu laisseras sur le feu lent pendant trois jours et trois nuits. Tu mettras ensuite l’amphore et la médecine dans l’eau froide pendant trois autres jours; puis tu couperas de nouveau l’œuvre en morceaux de la grandeur de ton ongle et tu la mettras dans une cucurbite de verre au-dessus de l’alambic. Tu distilleras ainsi une eau blanche semblable à du lait, qui est le véritable lait de la vierge ; lorsque cette eau sera distillée, tu augmenteras le feu et transvaseras dans une autre amphore. Prends donc maintenant de l’air qui soit semblable à l’air le plus pur et le plus parfait, parce que c’est celui-là qui contient du feu. Calcine dans le four de calcination cette terre noire qui reste dans le fond de la cucurbite, jusqu’à ce qu’elle devienne blanche comme neige ; remets la dans l’eau distillée sept fois, afin qu’une lame de cuivre embrasé, éteinte par trois fois, devienne parfaitement blanche. Qu’il en soit fait de même pour l’eau que pour l’air ; à la troisième distillation, tu trouveras l’huile et toute la teinture semblable à du feu au fond de la cucurbite. Tu recommenceras alors une seconde et une troisième fois, et tu recueilleras l’huile ; ensuite tu prendras le feu qui est au fond de la cucurbite et qui est semblable à du sang noir et mou ; tu le garderas pour le distiller et l’éprouver avec la lame de cuivre, comme tu as fait pour l’eau ; et voici maintenant que tu possèdes la manière de séparer les quatre éléments. Mais le moyen de les unir (modum conjungendi) est ignoré de tous.
Prends donc la terre et triture la sur une table de verre ou de marbre très propre ; imbibe la d’un poids égal d’eau jusqu’à ce qu’elle forme une pâte ; place la dans un alambic et distille la avec son feu ; imbibe de nouveau ce qui te restera dans le fond de la cucurbite avec l’eau que tu auras distillée jusqu’à ce que celle-là soit complètement absorbée.
Ensuite imbibe-la d’une égale quantité d’air en te servant de celui-ci comme tu t’es servi de l’eau, et tu obtiendras une pierre cristallisée, laquelle projetée en petite quantité sur beaucoup de mercure, convertit celui-ci en vrai argent, et ceci est la vertu du soufre blanc non brûlant, formé de trois éléments : la terre, l’eau et l’air. Si, maintenant tu prends une dix-septième partie du feu et que tu la mélanges avec les trois éléments ci-dessus, en les distillant et les imbibant comme on l’a dit, tu obtiendras une pierre rouge, claire, simple, non brûlante, dont une petite partie projetée sur beaucoup de mercure sera convertie en or obryzum très pur.
Ceci est la méthode pour parfaire la pierre minérale (30).
CHAPITRE VI.
DE LA PIERRE NATURELLE ANIMALE ET VÉGÉTALE.

Il existe une autre pierre, laquelle, selon Aristote, est une pierre et n’est pas une pierre. Elle est à la fois minérale, végétale et animale ; elle se trouve en tous les lieux, en tous les hommes (31) et c’est elle que tu dois putréfier dans le fumier et placer après cette putréfaction dans une cucurbite sur l’alambic ; tu en extrairas les éléments de la manière susdite, tu opéreras leur conjonction et tu obtiendras une pierre qui n’aura pas moins d’efficacité et de vertu. Et ne sois pas étonné que j’aie dit de la putréfier dans le fumier chaud de cheval comme le doit faire l’artiste, car, si le pain de froment y est placé, après neuf jours il sera transformé en vraie chair mêlée avec du sang (32). C’est pour cette raison, je crois, que Dieu a voulu choisir le pain de froment préférablement à toute autre matière, parce qu’il est plus particulièrement la nourriture du corps que toute autre substance et qu’on peut facilement en extraire les quatre éléments et en faire une œuvre excellente (33).
De tout ce que nous avons dit, il ressort que tout corps composé peut être réduit en minéral et cela, non seulement par la nature mais par l’art. Béni soit Dieu qui donna aux hommes un tel pouvoir, puisque, imitateur de la nature, il peut transmuer les espèces naturelles, ce que la nature indolente n’accomplit qu’au bout d’un temps immense. Voici les autres méthodes de transmutation des métaux que l’on trouve dans les livres des Rosés, d’Archelaüs, dans le septième livre des Préceptes et dans beaucoup d’autres traités d’Alchimie.
CHAPITRE VII.
DE LA MANIÈRE D’OPERER PAR L’ESPRIT.

Il existe un mode d’opération par l’esprit et il est à propos de savoir qu’il existe quatre sortes d’esprits, appelés ainsi parce qu’ils se volatilisent au feu, et qui participent de la nature des quatre éléments, savoir : le Soufre, qui possède la nature du Feu, le Sel ammoniac, le Mercure qui possède les propriétés de l’Eau et qui est encore appelé serviteur fugitif (servus fugitivus) et l’Orpiment ou Arsenic qui possède l’esprit de la Terre (34). Quelques-uns ont opéré au moyen d’un de ces esprits, en le sublimant et le convertissant en eau, en le distillant et le congelant ; puis, l’ayant projeté sur du cuivre ont opéré la transmutation. Un autre s’est servi de deux de ces esprits ; un autre de trois, un autre enfin, de tous les quatre ; et voici sa méthode : Après avoir sublimé chacun de ces éléments séparément, un grand nombre fois jusqu’à ce qu’ils soient fixés, et les avoir distillés puis dissous dans l’eau forte et imbibés de dissolvants énergiques, on réunit toutes ces eaux ; on les distille et on les congèle de nouveau toutes ensemble et on obtient une pierre. blanche comme du cristal qui, projetée en petite quantité sur un métal quelconque le change en véritable Lune. On dit généralement que cette pierre est composée des quatre éléments à un très haut degré d’épuration. D’autres croient qu’on la compose d’un esprit uni avec les corps ; mais je ne crois pas que cette méthode soit véritable et je la crois ignorée de tous, quoique Avicenne en touche quelques mots dans son Epître. Je l’éprouverai lorsque j’aurai le temps et le lieu nécessaires.


CHAPITRE VIII.
DE LA PRÉPARATION DES FERMENTS DE SATURNE ET AUTRES MÉTAUX.
Prends donc deux parties de Saturne (plomb) si tu veux accomplir l’Œuvre du Soleil, ou bien deux parties de Jupiter (étain) pour l’Œuvre de la Lune. Ajoute une troisième partie de mercure afin de former un amalgame qui sera une sorte de pierre très fragile que tu broieras avec soin sur le marbre en l’imbibant de vinaigre très aigre et d’eau tenant en dissolution du sel commun le mieux préparé, en imbibant et desséchant tour à tour jusqu’à ce que la substance ait absorbé son maximum d’eau ; alors imbibe ce lingot avec de l’eau d’alun afin d’obtenir une pâte molle que tu feras dissoudre dans l’eau. Tu distilleras ensuite cette dissolution trois ou quatre fois, tu la congèleras et tu obtiendras une pierre qui convertit Jupiter en Lune (35).

CHAPITRE XI.
DU PROCEDE DE REDUCTION DE JUPITER, AUTREMENT DIT, DE L’ŒUVRE DU SOLEIL.

Pour l’Œuvre du Soleil, prends du vitriol bien épuré, rouge et bien calciné, et dissous-le dans l’urine des enfants. Tu distilles le tout et tu renouvelles cela autant de fois qu’il sera nécessaire pour obtenir une eau très rouge. Alors tu mélangeras cette eau avec l’eau susdite avant la congélation ; tu placeras ces deux corps dans le fumier pendant quelques jours afin qu’ils s’incorporent mieux, et tu les distilleras et congèleras ensemble. Tu obtiendras alors une pierre rouge semblable à l’Hyacinthe dont une partie projetée sur sept parties de Mercure ou de Saturne bien épuré se changera en or obryzum (36).
On trouve dans les autres livres une multitude d’autres opérations confuses et en nombre infini, qui ne peuvent qu’induire les hommes en erreur et desquelles il est superflu de parler. Ce n’est pas par cupidité que j’ai traité de la science, mais afin de constater les effets admirables de la nature et de rechercher leurs causes, non seulement générales mais spéciales et immédiates, non seulement accidentelles mais essentielles ; j’en ai traité longuement ainsi que de la séparation des éléments des corps. Cette œuvre est véritablement vraie et parfaite, mais elle demande tant de travail, et je souffre tant de l’imperfection de mon corps, que je ne la tenterai nullement, à moins de nécessité pressante. Ce que j’ai dit ici des minéraux suffit amplement.
FIN.




TRAITÉ DE SAINT THOMAS D’AQUIN SUR L’ART DE L’ALCHIMIE
Dédié au frère Reinaldus.
CHAPITRE I

A tes prières assidues, mon très cher frère, je me propose de te décrire en ce bref traité divisé en huit chapitres, certaines règles simples et efficaces pour nos opérations, ainsi que le secret des véritables teintures ; mais auparavant je t’adresse trois recommandations.
Premièrement : ne prête pas beaucoup d’attention aux paroles des Philosophes modernes ou anciens qui ont traité de cette science, parce que l’Alchimie consiste entièrement dans la capacité de l’entendement et dans la démonstration expérimentale (37). Les Philosophes voulant cacher la vérité des sciences, ont parlé presque toujours figurativement.
Deuxièmement : n’apprécie jamais ni n’estime la pluralité des choses ni les compositions formées de substances hétérogènes (38), car la nature ne produit rien que par les semblables, et quoique le cheval et l’âne produisent le mulet, ce n’en est pas moins une génération imparfaite, comme celle qui peut se produire par hasard exceptionnellement avec plusieurs substances.
Troisièmement : ne sois pas indiscret, mais surveille tes paroles, et comme un fils prudent, ne jette pas les perles aux pourceaux.
Conserve toujours présente à ton esprit la fin pour laquelle tu as entrepris l’œuvre. Tiens pour certain que si tu gardes constamment devant tes yeux ces règles qui me furent données par Albert-le-Grand, tu n’auras rien à quémander aux Rois et aux grands, mais, au contraire, les Rois et les grands te couvriront d’honneurs (39). Tu seras admiré de tous, en servant par cet art les Rois et les Prélats, car non seulement tu subviendras à leurs besoins mais encore tu subviendras à ceux de tous les indigents, et ce que tu donneras ainsi vaudra dans l’éternité autant qu’une prière. Que ces règles soient donc gardées au fonds de, ton cœur sous un triple sceau inviolable, car dans mon autre livre, donné au vulgaire, j’ai parlé en philosophe, tandis qu’ici, confiant en ta discrétion, j’ai révélé les secrets les plus cachés.


CHAPITRE II DE L’OPERATION

Comme l’enseigne Avicenne dans son épître au roi Assa, nous cherchons à obtenir une substance véritable au moyen de plusieurs intimement fixées, laquelle substance étant placée dans le feu, l’entretienne et l’alimente, et qui soit en outre pénétrative et ingressive, qui teigne le mercure et les autres corps; teinture très véritable, ayant le poids requis et surpassant par son excellence tous les trésors du monde.
Pour faire cette substance, comme le dit Avicenne, il faut avoir de la patience, du temps et les instruments nécessaires.
De la patience, parce que selon Geber, la précipitation est l’œuvre du diable; aussi celui qui n’a pas de patience doit suspendre tout travail.
Du temps, parce que dans toute action naturelle résultant de notre art, le moyen et le temps sont rigoureusement déterminés (40).
Des instruments, nécessaires non pas en grand nombre comme on le verra dans la suite, puisque notre œuvre s’accomplit au moyen d’une chose, d’un vase, d’une seule voie et d’une seule opération (in una re, uno vase, una via et una operatione) comme l’enseigne Hermès.
Il est permis de former la médecine de plusieurs principes agglomérés; toutefois, il n’est besoin que d’une matière et d’aucune chose étrangère, sinon du ferment blanc ou rouge. Toute l’Œuvre est purement naturelle; il suffit d’observer les diverses couleurs suivant le temps où elles apparaissent.
Le premier jour, il faut se lever de grand matin et de voir si la vigne est en fleurs et se transforme en tête de corbeau; puis elle passe par diverses couleurs entre entres lesquelles il faut remarquer le blanc intense parce que c’est celle-là que nous attendons et qui révèle notre roi, c’est-à-dire 1 ‘élixir ou la poudre simple, lui a autant de noms qu’il y a de choses au monde. Mais Pour terminer en peu de mots notre matière ou magnésie est appelée Terre d’Espagne ou Antimoine, mais remarque bien que je ne désigne pas par-là le mercure commun dont se servent les sophistes et qui ne donne qu’un résultat médiocre, malgré les grandes dépenses qu’il occasionne, et s’il te plaisait de travailler avec lui, tu parviendrais incontestablement à la vérité, mais après une interminable coction et digestion (41). Suis donc Plutôt le bienheureux Albert le Grand, mon maître, et travaille avec le vif argent minéral, car en lui seul est le secret de l’œuvre. Puis, tu opéreras la conjonction des deux teintures, blanche et rouge, provenant des deux métaux parfaits qui, seuls, donnent une teinture parfaite; le mercure ne communique cette teinture qu’après l’avoir reçue; c’est pourquoi en les mêlant toutes deux, elle se mélangeront mieux avec lui et le pénétreront plus intimement.
DE LA COMPOSITION DU MERCURE ET DE SA SÉPARATION

Et quoique notre œuvre s’achève au moyen de notre mercure seul, il a besoin néanmoins du ferment rouge ou blanc ; il se mêle alors facilement avec le Soleil et la Lune, car ces deux, corps participent beaucoup de sa nature et sont aussi plus parfaits que les autres. La raison est que les corps sont plus parfaits suivant qu’ils contiennent plus de mercure. Ainsi le Soleil et la Lune, en contenant plus que les autres, se mêlent au rouge et au blanc et se fixent (42) dans le feu, parce que c’est le mercure seul qui parfait l’Œuvre en lui, nous trouvons tout ce qui nous manque pour notre œuvre, sans que nous ayons besoin d’y rien ajouter.
Le Soleil et la Lune ne lui sont pas étrangers, parce qu’ils sont réduits dès le commencement de l’Œuvre, en leur matière première, c’est-à-dire en mercure; ils tiennent donc de lui leur origine. Certains s’efforcent de parachever l’Œuvre au moyen du seul mercure ou de la simple magnésie, les lavant dans le vinaigre très aigre, les cuisant dans l’huile, les sublimant, les brûlant, calcinant, distillant ; extrayant leur quintessence, les mettant à leur torture par les éléments et une infinité d’autres supplices (martyrizationibus) croyant que leur opération leur sera très profitable; et finalement, ils n’en tirent qu’un résultat modique.
Mais crois-moi, mon fils, tout notre mystère consiste seulement dans le régime et la distribution du feu (43) et dans la direction intelligente de l’Œuvre.
Nous n’avons que peu de chose à faire, c’est la vertu du feu bien dirigé qui opère sur notre œuvre (44), sans que nous ayons grand travail, ni grande dépense, car je suppose que lorsque notre pierre était dans son état premier, c’est-à-dire Eau première, ou Lait de la Vierge, ou Queue de dragon on l’ait dissoute, elle se calcine alors, se sublime, se distille, se réduit, se lave, se congèle elle-même (45), et par la vertu du feu bien proportionné s’achève seule dans un vase unique sans aucune autre opération manuelle. Sache donc, mon fils comment les philosophes ont parlé figurativement des opérations manuelles et afin que tu sois assuré de la purgation de notre mercure, je t’en enseignerai la simple préparation. Pends donc du mercure minéral ou Terre d’Espagne ou Antimoine ou Terre noire, ce qui est la même chose et qui n’ait été employé auparavant à aucune autre œuvre. Prends en vingt-cinq livres ou un peu plus et fais les passer par drap de lin un peu épais, et ceci est le véritable lavage (lotio vera). Regarde bien après l’opération s’il ne reste aucune ordure ou scorie, car alors le mercure, ne, pourrait être employé à notre œuvre. Si rien n’apparaît, tu peux le juger excellent (46). Remarque bien qu’il n’est besoin de rien ajouter à ce mercure et que l’œuvre peut être ainsi achevée.
DE LA MANIERE DE FAIRE L’AMALGAME

Puisque notre Œuvre s’accomplit par le seul mercure sans l’addition d’aucune autre matière étrangère, je traiterai brièvement de la manière de faire l’amalgame. Car ceci est très mal compris de beaucoup de philosophes qui croient que l’œuvre peut s’accomplir par le seul mercure sans être pourtant uni à sa sœur ou sa compagne (compar ejus) (47). Je te dis donc avec assurance que tu dois travailler avec le mercure uni à son compagnon, sans ajouter, aucune matière étrangère au mercure, et sache que l’Or et, l’Argent ne sont pas étrangers au mercure, mais au contraire participent plus de sa nature que tous les autres corps. C’est pourquoi réduit en leur première nature, on les appelle sœurs ou compagnes du mercure, car de leur composition et de leur fixation, résulte le lait de la Vierge. Si tu comprends clairement ceci et si tu n’ajoutes rien d’étranger au mercure, tu obtiendras la réalisation de tes vœux.
DE LA COMPOSITION DU SOLEIL ET DU MERCURE

Prends le soleil commun bien épuré, c’est-à-dire chauffé au feu ce qui donne le ferment rouge; prends en deux onces et coupe-le en petits morceaux avec les pinces; ajoute quatorze onces de mercure que tu exposeras au feu dans une tuile creuse, puis dissous l’or en le remuant avec une baguette de bois. Lorsqu’il sera bien dissout et mêlé, place-le tout dans l’eau claire et dans une écuelle de verre ou de pierre, lave le et nettoie-le jusqu’à ce que la noirceur s’en aille de l’eau alors si tu y prends garde, tu entendras la voix de l’oiseau (vox turturis) dans notre terre. Et lorsqu’elle sera bien purifiée, place l’amalgame dans un morceau cuir bien lié à sa partie supérieure en forme de sac, puis tu presseras fortement pour qu’il passe au travers. Lorsque deux auront été ainsi pressées les quatorze qui restent sont aptes à être employées à notre opération. Prends bien garde de n’en extraire que deux onces ni plus ni moins. S’il y en avait plus, retranches-en ; s’il y en avait moins ajoute. Et ces 2 onces ainsi exprimées, et qui sont appelées lait de la Vierge, tu les réserveras pour la deuxième opération.

Transvase maintenant la matière dans un vase de terre et mets ce vase dans le fourneau décrit ci-dessus. Puis ayant allumé une lampe au-dessous, chauffe ainsi avec ardeur nuit et jour sans jamais éteindre (48). Que la flamme soit entièrement enfermée et environne l’athanor qui sera bien fixé sur le lut de sapience.
Si après un mois ou deux tu as observé les fleurs éclatantes et les couleurs principales de l’œuvre c’est-à-dire la noire, la blanche, la citrine et la rouge, alors sans aucune autre opération de tes mains, par la direction du seul feu, ce qui était manifeste sera et ce qui était caché sera manifeste. C’est pourquoi notre matière parvient d’elle-même à l’élixir parfait, se convertissant en une poudre très subtile appelée terre morte ou homme mort dans le sépulcre ou magnésie sèche; cet esprit est caché dans le sépulcre, et l’âme en est presque séparée. Lorsque vingt-six semaines se sont écoulées depuis le commencement de l’œuvre, alors ce qui était grossier deviendra subtil, ce qui était rude deviendra mou, ce qui était doux deviendra amer et par la vertu occulte du feu la conversion des principes sera achevée. Lorsque tes poudres seront complètement sèches et que tu auras achevé ces opérations, tu essaieras la transmutation du mercure; ensuite je t’enseignerai les deux autres opérations parce qu’une partie de notre œuvre ne peut encore transmuer que sept parties de mercure bien épuré.
DE L’AMALGAME AU BLANC

On suit la même méthode pour obtenir 1e ferment blanc ou ferment de la Lune. On mélange ce ferment blanc avec sept parties de mercure bien épuré comme on a fait pour le rouge. Car dans l’œuvre au blanc il n’entre aucune autre matière que le blanc et dans l’œuvre au rouge aucune autre que le rouge ; de même notre eau devenant rouge ou blanche suivant le ferment ajouté et le temps employé à l’œuvre, on peut teindre le mercure au blanc comme on l’a fait pour le rouge.
Remarquons en outre que l’argent en feuilles est plus utile ici que l’argent en lingot (argentum massale) par ce qu’il se lie plus facilement au mercure et se doit amalgamer avec le mercure froid et non pas chaud. Ici beaucoup ont erré en dissolvant leur amalgame dans l’eau forte la composition de l’eau forte, ils reconnaissent qu’elle ne peut que la détruire. D’autres, voulant travailler avec l’or ou l’argent selon les règles de ce livre, errent en disant que le soleil n’a pas d’humidité selon les de té, et le font dissoudre dans l’eau corrosive puis le laisse digérer dans un vaisseau de verre bien fermé pendant quelques mois; mais il vaut mieux au contraire que la quintessence soit extraite par la vertu du feu subtil, dans un vase de circulation appelé à cause de cela Pélican (49).
Le soleil minéral ainsi que la Lune sont mêlés de tant d’immondices que leu purification est, nécessaire et n’est pas une œuvre de femmes ni un jeu d’enfants; au contraire la dissolution, la calcination et les autres opérations pour le parachèvement du grand Œuvre sont un travail d’hommes robustes (50).
DE LA SECONDE ET DE LA, TROISIEME OPERATION

Cette première, partie, achevée, procédons à l’accomplissement de la seconde. Il faut ajouter sept parties de mercure, au corps obtenu dans notre première œuvre et appelé Queue de, dragon ou Lait de la Vierge. Fais passer, le tout à travers le cuir et retiens-en sept parties; lave et mets-le tout dans le vase de fer, puis dans le fourneau comme tu as fait la première fois et tu y emploieras le même temps ou à peu près, jusqu’à ce que la poudre soit de nouveau formée. Tu la recueilleras et tu la trouveras beaucoup plus fine et subtile que la première parce qu’elle est plus digérée. Une partie en teint sept fois sept en Elixir. Procède alors à la troisième opération comme tu as fait pour la première et pour la seconde ; ajoute au poids de la poudre obtenue dans la seconde opération sept parties de mercure épuré et mets-le dans le cuir de telle sorte qu’il en reste sept parties du tout, comme ci-dessus. Fais cuire le tout de nouveau, réduis en poudre très subtile, laquelle projetée sur le mercure en teindra sept fois quarante-neuf parties, ce qui fait trois cent quarante-trois parties. La raison en est que plus notre médecine est digérée, plus elle devient subtile; plus elle est subtile, plus elle est pénétrative; et plus elle est pénétrative, plus elle transmue de matière. Pour finir, remarque bien que si l’on n’a pas de mercure minéral, on peut indifféremment travailler avec le mercure commun ; quoique ce dernier n’ait pas la même valeur, il donne néanmoins un bon profit.
DE LA MANIERE DE TRAVAILLER LA MATIERE ou MERCURE

Passons maintenant à la teinture du mercure. Prends une coupelle d’orfèvre et enduis en un peu l’intérieur avec de la graisse et places-y notre, médecine suivant la proportion requises le tout sur feu lent, et lorsque le, mercure commence à fumer projette, la médecine enfermée dans de la cire propre ou dans du papier (papyrus) et prends un gros charbon embrasé et spécialement préparé pour cet usage que tu mettras sur le fond du creuset; puis donne un feu violent, et lorsque tout sera liquéfié, tu projetteras clans un tube enduit de graisse et tu auras de l’or ou de l’argent très fins suivant le ferment que tu aura ajouté. Si tu veux multiplier la médecine, opère avec le fumier de cheval suivant le moyen que je t’ai déjà enseigné oralement comme tu le sais, et que je ne veux pas écrire, parce que c’est un péché de révéler ce secret aux hommes du siècle qui recherchent la science plutôt par vanité que dans le but du bien et pour l’hommage dû à Dieu, auquel gloire et honneur soient dans les siècles des siècles. Amen ! Remarque bien que j’ai toujours vu accomplir par le Bienheureux Albert le Grand cet œuvre que je viens de décrire en style vulgaire, au moyen de la terre Hispanique ou Antimoine, mais je te conseille de n’entreprendre que le petit Magistère que je t’ai brièvement décrit, dans lequel il n’y a nulle erreur et qui s’accomplit avec peu de dépense, peu de travail, et en peu de temps ; alors tu arriveras à la fin désirée. Mais, mon très cher frère n’entreprends pas le Grand Magistère, parce que pour ton salut et pour le devoir de la Prédication du Christ, tu dois plutôt attendre les richesses éternelles que les biens terrestres et temporels.

Ici finit le Traité de Saint-Thomas sur la multiplication alchimique, dédié à son frère et ami, le Frère Reinaldus pour le Thesaurus secretissimus.

NOTES INEDITES DE GRILLOT DE GIVRY

1. Pour la compréhension de ce paragraphe : Voy: La Lumière d’Egypte. 2e partie, Ch. II « Les étoiles et les planètes sont les instruments ma­gnétiques des sept principes créateurs, etc. ».
2. Species : Il faut prendre ce mot dans le sens de figure, forme, apparence, comme on dit les espèces du pain et du vin, par opposition à sub­stance.
3. Ou plutôt la sphère aqueuse. Pour l’intelli­gence de ce passage étudier le système de Ptolémée. Les deux cristallins, placés après le ciel des étoiles fixes, précèdent le premier mobile et l’Empyrée.
4. ... par cet agent universel, la nature fait une matière extraite des quatre Eléments, et de trois principes universels, mêlez avec la plus juste pro­portion pour l’œuvre de la Sagesse, et cette extrac­tion naturelle a été appelée mercure universel ou mercure de Vie. (Le grand éclaircissement de la pierre philosophale pour la transmutation de tous les métaux, par nicolas flamel, Amster­dam, 1782, chap. 9).
5. Voy. jérôme cardan, De Subtilitate, Liber VII, au paragraphe, gemmae quae ignibus resistunt.
6. Malgré les lacunes évidentes du texte on peut s’apercevoir que ce chapitre représente symboliquement la Solution, qui de l’aveu de tous les alchimistes est la clef de l’Oeuvre. On doit se souvenir pour l’étudier avec fruit que le fameux syntagme des quatre Eléments, si décrié aujour­d’hui ne signifie pas que l’eau, la terre, l’air et le feu sont des corps simples, comme le croyait la chimie des XVIIe et XVIIIe siècles, mais il re­présente les quatre stases extrêmes de la modalité de la matière: solide, liquide, aériforme et igniforme qui ne sont elles-mêmes que des accidents destinés à marquer le degré plus ou moins infé­rieur de négativité dans la polarisation de la substance, et aussi le coefficient de puissance vi­bratoire qui anime leurs molécules constitutives et détermine ces stases. C’est ce que symbolise le sacré quaternaire de pythagore. (Cf. diogène laerce, lib. VIII; porphyre: Vit. Pythag. plutarchus: De placitis philosophorum, lib. IV, Cap. 3) et de cette belle sentence de théodose inintelligible pour les modernes: « De quatre deviens cinq, c’est-à-dire de l’intelligence des qua­tre éléments dont est formé le monde, illumine tes cinq sens pour leur donner l’Intelligence (Sen­tences de Théodose, § 57). Ainsi le mot « eau » que saint thomas emploie fréquemment dans ce chapitre est synonyme dans son sens inférieur de « liquide en général ». L’adepte généralise donc presque toujours; lorsqu’il commande: Prends la terre, distille l’eau, il désigne le solide, le liquide en général, il évolue ainsi dans un plan métaphy­sique où les obstacles accidentels s’effacent et où il perçoit clairement les grandes lignes rectrices du processus invariable qui suivent les transformations de la matière; il enseigne alors la réaction en général, le noumène, c’est-à-dire ce qui s’ac­complit quels que soient les liquides, les gaz, les solides mis en présence; quant aux phénomènes ce sont les diversités qui se produiront dans la pra­tique lorsque l’on particulisera les substances. Pour l’alchimiste, il n’existe qu’une réaction, type unique sur laquelle sont calculées toutes les autres avec de simples modifications accidentelles, il con­naît donc ainsi la norme absolue des transforma­tions de la matière, c’est-à-dire le secret de ces mystérieuses forces d’affinité et de cohésion que la chimie avoue ne pas connaître. La science mo­derne au contraire ne voit que d’après le phéno­mène, et c’est le phénomène qui lui obscurcit et rétrécit son horizon de perceptivité: les modi­fications de proportions, de poids, de durée, de couleur qui se trouvent entre deux réactions l’ab­sorbent essentiellement et l’aveuglent; elle n’ob­serve que la variété, là où l’alchimiste remonte jusqu’à l’unité, elle restera analytique sans jamais devenir synthétique. Or, la synthèse c’est la voie de l’Absolu.
7. La matière première des minéraux, dit albert le grand, est un humide onctueux, subtil et for­tement incorporé dans une matière terrestre. (De Minéral. Lib. 3, cap. II) (Note du Tr.)
8 La siccité est un effet du froid comme de la chaleur, dit pernety. (Fab. Egypt. Tome I, De l’Eau).
9. Lac Virginis. La pierre philosophale parvenue à la couleur blanche. Remarquons bien ici, que saint thomas d’aquin à déjà commencé à l’insu du lecteur la description des opérations de la pierre. Comparez cette méthode d’exposé avec celle dont se sert roger bacon dans son Spéculum Alchemiae. Cap. VIII et suivants. Le lac virginis s’obtient sans la participation immédiate de l’opé­rateur. Après les quatre opérations qui conduisent à la tête de corbeau entre la Fermentation et la Fixation, on voit apparaître cette couleur blanche, appelée par d’autres auteurs: alcaest, eau bénite, essence blanche, hermaphrodite, Eve, soufre blanc, etc.
10. Litharge, nom de la pierre au rouge Sel alcali, nom de la pierre au blanc. Vinaigre, le mercure dissolvant des Philosophes. saint thomas vient de décrire la Fermentation du premier magistère. Exotériquement, la litharge (ou litharge, suivant saint thomas) (du grec liuoV arguroV)  c’est le plomb qui se trouve dans les scories de l’argent quand on l’affine. On le nomme protoxyde de plomb, PbO. La réaction donnée par la litharge, le vinaigre et le sel ammoniac produit un acétate monochloré de plomb dont la formule reste pro­blématique.
11.  Les plus célèbres de ces pierres sont les bézoards (voy. à ce sujet, bontius, seba, kempler, garcias, clusius, buffon, rumphius, monard, hernandès, cardan, aldrovande, et aussi andré lacuna, amatus lusitanus et les voyages de tavernier). On n’a jamais su de quels animaux provenaient les bézoards. rabbi moses prétend qu’ils se forment dans l’angle des yeux des gazelles. galien les mentionne comme spécifique contre le venin. Au XVIIe siècle, ils entraient dans la composition de tous les cordiaux et quelquefois de la thériaque. Les Perles sont au nombre de ces concrétions animales. ammien marcellin Lib. XXIII, cap. VI), enseigne que les perles se forment par le mélange de la rosée dans des huîtres qui s’entrouvraient pour s’ac­coupler avec l’humidité de la nuit. solin (Polyhistor, LIV), croit aussi qu’elle sont conçues de la rosée.
Mentionnons la chlorite, pierre verte qui se trouve dans les intestins des hochequeues, la chelonia, qui était l’œil solidifié d’une tortue des Indes (voy. pline, passim), la pierre appelée Dracontas, qui se tire du cerveau du dragon (solin, Polyhistor, XXI). La chélidoine qui se trouve dans le nid des hirondelles, la chelonite, dans les cra­pauds (pline). Enfin, ajoutons que l’urine du Lynx se solidifie en pierres précieuses (solin, Polyhistor, II).
Voyez aussi dans les vers Jambliques de manuel phila le paragraphe peri thV megalhV strouou et aussi De remediis contra fascinationes.
12. Les vertus magiques des pierres sont innom­brables. « On tient que l’hyacinthe calme la mer et préserve du tonnerre celui qui la porte », dit robert de berquen {Les Merveilles des Indes occidentales et orientales, ou nouveau traité des pierres précieuses par robert de berquen, mar­chand orfèvre à Paris, 1669, chap. 5). Suivant jérôme cardan, elle préserve du tonnerre et facilite le sommeil (De subtilitate, Lib. 7, de Lapidibus). L’agate, pierre remarquable, egregius lapis, qu’on trouvait au pied de l’Etna, avait de nombreuses propriétés (priscianus, Periegesis). La Smaragdoprase ou « sperme d’émeraude », com­me l’appelle rabelais (Pantagr., Liv. IV, ch. I), n’est pas moins salutaire : « L’on dit qu’étant portée, elle empêche l’ivrognerie » (boetius de boot, Le Parfait Joaillier, Lyon, 1649, Liv. II, ch. XXXIV). « Les perles corrigent le lait des femmes et le font venir » (Id., Liv. II, ch. XXXVIII). La topaze refrène l’ardeur de la lasciveté, dit l’auteur anonyme du livre Horto di Sanita (Lib. V). L’émeraude, dit encore boetius « par la commune opinion des hommes est cru conserver la chasteté et trahir l’adultère à cause qu’elle ne peut pas souffrir les actes illégitimes de Vénus»(Parf. Joaill., Liv. II, ch. III). toll, médecin de Leyde, dans ses annotations sur boe­tius (Edit. 1644, pag. 255), ajoute: « l’on dit que les plus belles émeraudes se rompent en la défloration des vierges. » cardan enseigne que, placée sous la langue, elle fait connaître l’avenir et préserve du venin, et frangi vero smaragdum in coitu (De subt., Lib. 7). « Le saphir porté par une personne impure, intempérante et adonnée aux choses de Vénus se salit et perd son éclat... si on renferme une araigne dans une petite fiole et qu’à la bouche on mette un saphir, elle mourra bientôt » (boet. de boot, Liv. II, ch. XLIII).
Selon albert le grand (passim) et cardan (loco cit.), le saphir guérit les clous et les anthrax. Selon marbode, (De Gemmarum lapidumque pretiosorum formis, naturis atque viribus opusculuni), il guérit des ulcères, mais « Porter se volt mut chiastement. » Le saphir préserve de la morsure du scorpion, dit l’admirable cléandre arnobe (II tesoro délie gioie, trattato maraviglioso intorno alle vertuti e propriété più rare di tutte le gioie, Vinetia, 1602, cap. V, dei Saffiri). Le diamant peut faire reconnaître la fidélité des femmes et est réputé contre les ensorcellements et le venin, quoiqu’on ait écrit qu’il est vénéneux lui-même. scaliger et arnobe rapportent qu’il préserve des incubes et des succubes. « Le diamant se mouille en présence du venin, dit boetius: il nourrit et fomente l’amour des mariez ». (Par. Joail., Liv. II, ch. VII).
Le sang de bouc amollit le diamant (theophylactes, berquen, ch. II et cl. arnobe, Tesoro, capo VI). La turquoise se ternit dans l’acte vé­nérien (berquen, ch. XI); elle préserve des chutes de cheval, des empoisonnements, adversus veneficia et lymphaticos (cardan, De subt., Lib. VII). Mentionnons Vapsyctos de pline, pierre précieuse qui, chauffée, conserve sa chaleur pendant sept jours. L’œtite appelée aussi pierre d’aigle est fort remarquable, mais n’a rien de commun avec l’aetite moderne, trioxyde de fer. Zoroastre plaçait cette pierre au-dessus de toutes les autres (solin, Polyhistor. XXXVIII). dioscorides (œuvres médi­cales), prétend qu’on s’en sert pour découvrir les voleurs. Voy. aussi le p. lebrun, (Hist. critique des pratiques superstit. Paris, 1752 tome I, p. 219). On mêlait la poudre d’aetite dans un pain que l’on faisait manger aux accusés: le voleur ne pouvait l’avaler (Voy. à ce sujet le vieil historien belon, le glossaire de lindenbrok, in leges antiquas et le concile d’Auxerre (année 586), collect. du p. labbé, Tome V) « La pierre œtites, dit encore le p. de castaigne, nous est enseignée des Aigles, qui fait enfanter les femmes sans douleur » (Le Paradis Terrestre, 1661, page 7). Enfin la plus parfaite de toutes, l’escarboucle dont les proprié­tés ont été connues de toute antiquité. « De sa clarté la noit resplent », dit l’évêque marbode dans son livre des Gemmes. D’après un auteur anonyme cité par berquen, Hildegarde, femme de Théodric de Hollande, possédait un chrysoprase qui éclairait la nuit une chapelle. Il faut ajouter que certaines pierres possèdent cette propriété ; ainsi le diamant frotté avec du drap dans l’obscu­rité devient lumineux (buffon, Hisf. miner., art. Diamant). hérodote dit avoir vu dans le temple de Tyr en Phénicie une colonne de jaspe vert pur, qui jetait un vif éclat pendant la nuit (Lib. II. XLIV). Quant aux propriétés mystiques de l’Escarboucle, camille léonard dans son Spéculum Lapidum, nous apprend qu’elle assainit l’air, refrène la luxure, apaise les querelles entre amis et ac­croît la propriété. « Enfin, d’après cléandre arnobe (Tesoro. Dei rubini carbonchi, etc., cap. III), « elle symbolise la face de dieu. »
13. Pour ces procédés, consulter boetius de , boot, jérôme cardan qui indique (Lib. 7) un procédé de transmutation du saphir en escarboucle, et benvenuto cellini (Trattato dell’ore-ficeria. Capitolo I). Tous ces procédés étaient in­terdits aux orfèvres, par ordonnances royales :
« Nul ne peut teindre amatistes, ne quelconque pierres fausses, par quoi elle se doive montrer autre qu’elle n’est de sa nature », dit l’article IV de l’ordonnance du roi Philippes de Valois, en sa maison de Saint-Ouen, confirmée du depuis par le roi Jean, son successeur, contenant les pre­miers statuts, ordonnances, et privilèges accordez aux marchands orfèvres, du mois d’Aoûts 1345. » (Voy. Recueil des Ordonnances de lambert roulland, Paris, 1688).
14. claudien regarde le diamant et le cristal comme une eau mystérieusement solidifiée (Eidylla, de crystallo et seq.) Sur la concordance des pierres avec les couleurs des éléments, voy. ben­venuto cellini, Oreficeria, cap. I.
15. Vitriol rouge, un des noms de la pierre rouge. Urine d’enfants, la pierre au blanc. saint tho­mas commente ici la description des élixirs de l’œuvre, l’élixir rouge et l’élixir blanc. L’ordre des opérations est entièrement interverti, à dessein.
16. Cf. aristote, Elément. (ocellus lucanus, De Natura Universi. Pars physica, cap. 2, tex. I. V. Elementorum numerus, et jérôme cardan, De subtil., Lib. de Elementis.
17. Quinta essentia, dit paracelse (De vita longa, cap. II), nihil aliud est quam bonitas natures ita ut tota natura in spagiricam mixturam et tem-peramentum abeat, in qua nihil corruptible, nihil que contrarium fit invenibile.
« La quinte essence, dit pernety (Fab. Egypt., 1786, t. I, p. 195), est une extraction de la plus spiritueuse et radicale substance de la matière : elle se fait par la séparation des éléments qui se terminent en une céleste et incorruptible essence dégagée de toutes les hétérogénéités». aristote la nomme une substance très pure... heraclite l’appelle une essence céleste, qui prend le nom du lieu où elle tire son origine, paracelse la dit, l’être de notre ciel centrique; pline, une essence corporelle séparée néanmoins de toute matérialité et dégagée du commerce de la matière ».
18. L’éléphant blanc est bien appuyé sur sept membres; il a le sommet de la tête ornée d’OR; il a un étendard d’OR, il est couvert de parures d’OR, enveloppé d’un réseau d’OR, il est doué de puis­sances surnaturelles; il va au travers des cieux ET CONNAIT BIEN LA LOI DES TRANSFORMATIONS. (Rgya Tch’er roi pa Lalitavistara. Chap. III. Un des neuf dharmas, 2e volume de la 5e section du Bkah hgyour, dans les livres sacrés du Tibet).
19. Mercurius est fons et origo omnium metallorum... (Oeuvre philosophique de Jehan Saunier. Chapitre IX).
20. geber dans la Somme de la perfection (Bibl. phil., chim., t. I, p. 379) exprime une idée sem­blable: « J’ai ci-devant fait voir clairement, dit-il, que les corps ou métaux qui avaient beaucoup d’argent-vif étaient les plus parfaits... et il est certain, par conséquent, que les corps qui reçoi­vent et boivent plus avidement l’argent-vif s’ap­prochent le plus de la perfection, etc. »
Ailleurs, Liv. II, Partie I, chap. 10, il ajoute : « C’est donc l’argent-vif et le soufre fixe qui don­nent la dureté aux métaux, et ce qui fait leur mol­lesse, ce sont les deux causes opposées à celles-là, c’est-à-dire l’Argent-vif volatil et le soufre com­bustible. »
21. Voici la nature des planètes: Saturne tient de la terre: sec et froid ; Jupiter, de l’air : humide et chaud; Mars tient du feu: chaud et sec; Vénus, de l’eau: froide et humide: le Soleil et la Lune sont des principes d’universalité (N. d. Tr.).
22. saint thomas omet le cuivre dans son énumération parce que le mystère de Ene doit pas être révélé.
23. « Fils de philosophes, dit Hermès, il y a sept corps ou métaux, entre lesquels l’or tient le pre­mier rang comme étant le plus parfait de tous... l’Eau ne l’altère ni ne le change... il contient aussi tous les métaux en perfection, c’est lui qui les vivifie parce que c’est lui qui est le ferment de l’élixir et sans lui l’élixir ne peut être parfait. » (Les sept chapitres d’Hermès Trismégiste. Chap. VII, § 1,2,3).
« L’or est un corps parfait, dit jehan de meung, engendré d’un argent vif, pur, fixe, clair, rouge, et d’un soufre net, fixe, rouge, non brûlant et aucune faute n’a en lui. » (Le miroir d’Alquimie de Jean de Mehun, philosophe très excel­lent. Paris, 1612. Chap. II). « L’argent aussi est un corps quasi parfait, féminin. » (Id. ibid., chap. III).
24. Ce traité est aujourd’hui perdu, ou bien n’a pas été réalisé par le Maître; nous n’avons pu trouver aucun document témoignant de son exis­tence.
25. L’argent vif s’attache facilement à Saturne, à Jupiter et au Soleil; plus difficilement à la Lune et plus difficilement encore à Vénus qu’à la Lune. (geber, Somme de Perfection).
26. Voyez dans les Douze Clefs de la Philosophie de frere basile valentin, Paris, 1650, le sceau hermétique que nous ne pouvons reproduire ici (planche de la septième clef) et surtout la planche explicative de la clef IX, qui est le plus effrayant pentacle que nous connaissions et qui symbolise le grand secret de l’Oeuvre.
27. Il y a cinq feux, dit zoroastre: le feu Voh freiami qui se trouve dans le corps des hommes et des animaux; le feu Orouazescht, dans les ar­bres, le feu Vazecht dans les montagnes, le feu Speenescht, dans le monde, feu ordinaire qui pourvoit aux besoins des hommes et le feu Berezesengh, qui se tient devant Ormuzd (zend avesta, Boun Dehesch, ch. XVII).
Ceci doit être de la plus grande utilité dans la découverte du feu philosophique : néanmoins, c’est encore le point qui offrira le plus de difficulté à l’alchimiste pratiquant. artéphius (Bibl. de phil. chim.) en parle ainsi : « Notre feu est miné­ral, il est égal, il est continuel, il ne s’évapore point, s’il n’est trop fortement excité; il participe du soufre; il est pris d’autre chose que de la ma­tière; il détruit tout; il dissout, congèle et calcine ; il y a de l’artifice à le trouver et à le faire ; il ne coûte rien, ou du moins fort peu. De plus, il est humide, vaporeux, digérant, altérant, pénétrant, subtil, aérien, non violent, incomburant, ou qui ne brûle point, environnant, contenant et unique. Ce feu humide suffit en toute l’œuvre, au commen­cement, au milieu et à la fin, parce que tout l’art consiste en ce feu. Il y a encore un feu na­turel, un feu contre nature et un feu innaturel et qui ne brûle point; enfin, pour complément, il y a un feu chaud, sec, humide, froid. Pensez bien à ce que je viens de vous dire et travaillez droite-ment, sans vous servir d’aucune matière étran­gère. »
Le manuscrit n. 3012 de la Bibliothèque de l’Arsenal, qui renferme plusieurs traités du trévisan, du Petit Paysan, avec Le Triomphe her­métique et les Six principales clefs de la philoso­phie secrète, sous le titre: Les apparences de vé­rités et vraie pratique de l’Alchimie, le tout tirés d’un livre manuscrit par moi Garchaole Lenfeit, marchant orfèvre de paris, étudient en la philoso­phie hermétique et naturelle, 1756. On lit: page 82, 2e clef : « Celui qui sait sublimer la pierre philosophiquement mérite à juste titre le nom de philosophe, puisqu’il connaît le feu des sages qui est l’unique instrument qui puisse opérer cette sublimation. Aucun philosophe n’a jamais ouverte­ment révélé ce feu secret, et ce puissant agent qui opère toutes les merveilles de l’art; celui qui ne le comprendra pas et qui ne saura pas le distin­guer aux caractères avec lesquels j’ai taché de le dépeindre, doit s’arrêter ici et prier Dieu qu’il l’éclairé, car la connaissance de ce grand secret est plutôt un don du ciel qu’une lumière acquise par la force du raisonnement. »
Ce feu est si important qu’on en a écrit un traité spécial: Arte del fuoco per la pietra filosofica, imprimé en italien à Genève. Consulter aussi le magnifique chapitre: Des Feux, dans l’œuvre du Prestre Vicot, Arsenal, ms. n. 2516, troisième partie de ce manuscrit, liv. II, § 188 à 195 et aussi le n. 3005, le Guide charitable qui tend la main aux curieux de l’Alchimie par l’auteur du Thésaurus medico-chimicus (Lubeck, 1638), chap. XVI, p. 60: Des différentes manières de faire le feu philosophique. Et enfin le ms. 5020, sans nom d’auteur, ayant appartenu à M. Hellot, orné de curieux dessins à la plume, pag. 38; Pratique du feu, etc.
28. Le Fils a demandé à Hermès: « Les soufres qui conviennent à notre Oeuvre sont-ils célestes ou terrestres? Et Hermès répondit: « Il y en a de célestes et il y en a aussi qui sont terrestres ». {Les sept chapitres d’Hermès Trismégiste, chap. II, 7.).
29. Le vase philosophique dans lequel s’accom­plit l’Œuvre est encore un grand mystère: dans la plupart des manuscrits sa figure manque à la place qu’on lui a réservée; suivant philalete, c’est un aludel, non de verre, mais de terre; il est le réceptacle des teintures et doit contenir (la première année des Chaldéens) vingt-quatre plei­nes mesures de Florence, ni plus ni moins (Bibl. phil. chim.). roger bacon (Epistola de secretis operibus artis, cap. IX) l’appelle une pyramide. « L’œuf, dit le Guide charitable, déjà cité ms. n. 3005, doit être d’un bon verre de Lorraine, fait en ovale ou en rond, clair et épais...; il doit avoir le long col de huit à neuf pouces; il faut qu’il puisse contenir quatre onces d’eau distillée » (page 57).
jean saunier, après avoir dit qu’on peut le construire de plusieurs matières, ajoute: « Partant, je te conseille que les vaisseaux soient d’arain, à fin qu’on puisse être hors de danger. »
Le premier desdits vaisseaux sera scellé juste­ment au fourneau et à ce fourneau y aura quatre tuyaux par en haut en croix...; le second entre un peu dans la bouche de l’autre environ de quatre doigts de profond... et faut que le premier vaisseau qui est scellé au fourneau ait un col de canard, c’est-à-dire un entonnoir, et qu’il y ait quatre doigts d’espace entre l’eau et le vaisseau qui a le cul percé. » (Oeuvre philosophique, chap. XVI).
Suivant flamel (le Livre des fig. hieroglyph., ch. VII, c’est « un vaisseau de terre appelé par les philosophes le triple vaisseau, car dans icelui y a au milieu un étage et sur icelui une écuelle pleine de cendres tièdes, dans lesquelles est assis l’œuf philosophie qui est un matras de verre... Le vaisseau triple, les envieux l’ont appelé Athanor. Crible, Fumier, Bain-Marie, Fournaise, Sphè­re, Lyon vert. Prison, Sépulcre, Urinal, Phiole, Cucurbite. » d’espagnet s’exprime autrement:
« Pour dire la vérité, on n’a besoin que d’un seul vase pour perfectionner les deux soufres, il en faut un second pour l’élixir... Le premier sera de ver­re... Le second sera formé de deux hémisphères creux de chêne dans lesquels on placera l’œuf. » (Arcan. Herm. Philosophiae opus, Can. 112 et seq.) En réalité, il n’y a qu’un vase, l’œuf philo­sophique. Les dépurations préliminaires se font dans des matras ordinaires. On peut se servir avec succès du matras à mercure, autrefois appelé enfer de Boyle et, pour la conjonction du premier œu­vre, de la cornue appelée les deux frères. On la soude à la lampe après y avoir introduit la ma­tière.
30. Obrisum, obrysum, ou obryzon, du grec obruzon, vieux terme qui désigne l’or affiné qui a éprouvé le plus haut degré de feu. L’évêque fortunat dit : Omnes obryso ornati super astra coruscant (VIII, 5, 275).
31. Cet agent universel des œuvres de la nature, c’est Yod des Hébreux et du chevalier de reichenbach, c’est la lumière astrale des martinistes (eliphas levi, Hist. de la Magie, 19). Cette substance est ce qu’hermès trismegiste appelle le grand Thelesma. Lorsqu’elle produit la splendeur elle se nomme la lumière (eliphas levi, Clefs des Grands Mystères, 117), suivant albert poisson, c’est le Spiritus ou portion de vie que l’adepte projette sur la matière pour l’animer. Voyez aussi le dessin symbolique de léonard de vinci sur la pierre philosophale. « Qu’on se rappelle bien, dit geber dans La Somme de Perfection (Liv. I. Par­tie I, ch. III) que le plus grand empêchement au grand Oeuvre vient de l’impuissance naturelle de l’Artiste ou de ses organes, qui sont faibles ou cor­rompus, ou elle vient de son esprit qui ne peut agir librement. » Voir aussi le présent traité, ch. IX, dernier alinéa.
La projection de la lumière astrale sur l’œuvre philosophique est un des grands mystères de l’al­chimie.
32. L’homonculus, que l’illustre disciple d’albert le grand ne pouvait manquer de connaître.
33. Ce paragraphe, l’un des plus importants et des plus décisifs de l’ouvrage, demanderait une longue explication, mais nous ne pouvons encore lever le voile du grand mystère qu’il recouvre. Ce mystère s’accomplit tous les jours en nous et dans la Société. Dans le plan minéral il a été accompli le jour de Pâques 1895, par un juif de Bagdad.
34. Tous les alchimistes ne préconisent pas cette méthode et nous-mêmes ne la conseillerons pas. Voici ce qu’en dit (grosparmy (L’œuvre ou traité premier de Nicolas Grosparmy de Norman­die. Ms, Arsen., n. 2516, pag. 28): « Les Ignorants croyant la sublimation être faite par véhé­mence et feu commun d’aucun des quatre maté­riaux sous lesquels l’art est figuré, c’est à savoir : vif-argent, semblablement au genre commun, et de souffre et de sel armoniac et d’orpin, lesquels fuient au coupeau du vaisseau quand ils sentent l’âpreté du feu et puis disent que leur matière est bien sublimée. » Saint Thomas lui-même semble partager cette opinion à la fin du chapitre.
35. C’est le petit magistère (N. du Tr.).
36. C’est le grand magistère (N. du Tr.).
37. C’est là le langage de tous les alchimistes. « Celui qui transmua le premier, dit valois, n’avait aucun livre, mais suivait nature, regardant comment et avec quoi elle travaille » (Les Cinq livres de Nicolas Valois, compagnon du seigneur Grosparmy, ms. bibl. Arsen, n. 2, 5, 16, page 174).
38. Les alchimistes s’accordent unanimement sur ce point. « Car Hermès dit de ceste science : Alchimie est science corporelle, d’un et par un simplement com­posée, conjoignant ensemble, les choses plus pré­cieuses par connaissance et effet, et transmuement en un genre meilleur, par une même et semblable commixtion naturelle. » (Le Miroir d’Alquimie de jehan de mehun. Paris, 1612, chap. I).
« Bref, sache que pas un animal ne peut étendre son espèce et engendrer son semblable, s’il ne le fait par le moyen de choses semblables et d’une même nature, voila pourquoi je ne veux point que tu mettes peine à chercher notre Pierre autre part, ni d’autre coté que dans la semence de sa propre nature de laquelle la nature l’a première­ment produite... songe en toi-même à quelle fin et usage tu veux faire la Pierre, alors tu sauras qu’elle ne s’extrait que de racine métallique. (Les douze Clefs de frere basile valentin, religieux de l’ordre de Saint Benoît, traitant de la Vraie médecine métallique. Paris, 1650, liv. I, Avant-Propos).
On connaît le célèbre paragraphe de bernard le trévisan: « Laissez aluns, vitriols, sels et tous attramens, borax, etc. ».
39. Les rois n’ont pas toujours récompensé les al­chimistes suivant leurs mérites; richard l’an­glais déposa son secret entre les mains du roi d’Angleterre, qui le fit mourir dans le tour de Londres. Edouard d’Angleterre ne tint pas ses promesses à raymond lulle. jacques Cœur, quoique ayant livré son secret à Charles VI, n’eut que la mort pour récompense. Voyez l’Ouverture de l’Ecole de Philosophie Transmutatoire, par david de planis-campy. Paris, 1633, in 8°.
40. On n’a pas prêté suffisamment d’attention à la concordance astrologique du temps nécessaire au grand œuvre et c’est ce qui a rendu nuls les efforts de beaucoup d’alchimistes modernes: « Les temps de la pierre sont précisés par l’Eau Philosophique et Astronomique », dit d’espagnet (Arcan. Herm.). Le premier œuvre au blanc doit être terminé dans la maison de la Lune; le second dans la seconde maison de Mercure; le premier œuvre au rouge, dans la seconde maison de Vénus; et le second ou le dernier au rouge, dans la maison d’exaltation de Jupiter. »
Le jour de Pâques est le jour par excellence pour parachever l’œuvre à cause de l’analogie avec la fête de la résurrection du Sauveur, que l’Eglise célèbre en ce jour. Car l’artiste peut pro­fiter pour son œuvre de l’immense somme d’éner­gie potentielle qui a été émise dans l’univers entier pendant le Carême et surtout pendant la Semaine Sainte. Les forces qui sont projetées par la masse des fidèles dans le désir de la résurrection du Messie après la nuit du tombeau, se centralisent et forment un courant fluidique intense. L’alchi­miste qui attend aussi la résurrection du Roi phi­losophique qui est dans l’athanor détournera ce courant, s’en emparera et le dirigera sur son œuvre. rabbi schelomoh a opérée la transmuta­tion le jour de Pâques 1550 (voy. Opuscule très excellent de la vraie philosophie, par D. zacharie, Lyon, 1612).
Toutefois nicolas flamel accomplit l’Œuvre le lundi 17 janvier 1582, vers midi et la même année le 25 avril, à cinq heures du soir. (Le liv. des fig. hiéroglyph., Avant-Propos) et jean sau­nier, le 7 mai 1432 (Le Grand Miracle de la Na­ture métallique, page 10).
41. C’est ce procédé qu’ont suivi les chimistes Gromberg et Gayot, quand le duc d’Orléans les a fait travailler au Palais-Royal pour essayer de re­trouver par la chimie moderne le secret de la pierre philosophale; ils disent « avoir trouvé des indices de possibilité, mais après un travail long et ennuyeux durant près de quatre ans. » (Voy. Note manuscrite sur la couverture du ms. n. 3.021 de l’Arsenal qui contient les Douze portes, de ripley).
On peut à la vérité se servir des chlorures mercurique et mercureux, vulgairement appelés sublimé corrosif et calomel, au lieu du véritable soufre philosophique, mais le résultat est moindre.
42. Aditya (le soleil), est vraiment la vie; la lune est la matière. » (Prasna Upanishad. Prasna
I, § 5.).
43. Voy. le Rig Veda (Premier Ashtaka, Premier Adhyaya, Anuvaka I, Sukta I.)
« I. Je glorifie Agni (le feu), le grand-prêtre du sacrifice, le devin, l’officiant, celui qui présente l’offrande aux dieux et ce qui est prossesseur d’une grande richesse ».
II. « Puisse cet Agni, que doivent célébrer les sages tant anciens que modernes, conduire ici les dieux ».
III. « C’est par le moyen d’Agni que celui qui adore obtient cette abondance qui s’accroît cha­que jour, qui est la source de la renommée et qui fait multiplier la race humaine. IV. Agni, le sa­crifice qui s’effectue sans obstacles et que tu pro­tèges de tous côtés, parvient aisément jusqu’aux dieux. »
44. « Les sept rivières pures qui coulent du ciel sont dirigées par toi, ô Agni ». (Rig-Veda. Ashtaka I, Adhyaya V, Anuvaka IX, Sukta VIII, § 8.).
45. Comme on le voit, la dissolution préalable est d’une nécessité absolue, ainsi qu’il est dit au chapitre IX du Grand éclaircissement de la pierre philosophale, de nicolas flamel. Or, comme par la succession des temps, certains secrets se révèlent à point nommé, nous pouvons soulever un peu ici le voile mystérieux du magistère. Sui­vant albert poisson, on doit faire cristalliser le chlorure aurique au bain-marié. Mais il vaudrait mieux accomplir l’opération que saint Thomas a décrite au chapitre VIII du premier traité, et qui est la réduction immédiate du chlorure aurique par le chlorure stanneux, et qui donne un précipité pourpre que l’on appelle encore pourpre de Cassius, mais qui était connu bien avant ce chimiste. H2O + Au2O (SnO2) 3. Nous avons encore obtenu le beau précipité d’or métallique par l’acide oxa­lique ou d’autres précipités encore par les acides phosphoreux, sulfureux, hydrophosphoreux, et surtout par le phosphore. Mais il est un procédé qui donne un résultat extraordinaire qui consiste à remplacer le chlorure aurique par le fluorure aurique qu’on obtiendra avec une eau régale beau­coup plus puissante que l’eau régale ordinaire, et composée d’acide fluorhydrique et d’acide nitri­que. Mais l’expérience offre de grands dangers à cause de la corrosivité de l’acide fluorhydrique. Comme il est nécessaire de dissoudre l’or et que les traités enseignent généralement que l’eau ré­gale possède cette propriété, il ne sera pas superflu d’indiquer ici que la simple dissolution de gaz chlore à l’état naissant produit cet effet; que l’a­cide iodique mélangé avec l’acide nitrique en ex­cès, dissout également l’or. Nous avons expérimente également l’acide paratartrique additionné d’acide acétique, procédé enseigné par le vicomte de Lapasse, puis un mélange d’acide sulfurique et d’acide acétique chauffés. De plus, l’alcool dis­sout l’or par un procédé secret. (Voir Manusc. de la Bibl. du Vatican, n. 4095, fol. 9). Et aussi de castaigne, Le Paradis Terrestre, 1661, page 32.). Nous avons expérimenté plusieurs fois ce procédé absolument exact. Enfin, les sucs gastriques ex­traits récemment du corps de l’homme ou des animaux dissolvent l’or et tous les métaux (Expé­rience de Sèvres.).
guyton de morveau a fait, en outre, une ob­servation de la plus haute importance et bien oubliée: « L’or, dit-il, (Eléments de chymie, tome II, p. 85) est aussi calciné et réduit en chaux pourpre, par une forte décharge électrique... Mais la même décharge revivifie l’or en chaux, comme elle réduit la chaux de plomb. »
46. Ainsinc porroit des métaux faire qui bien en saurait à chief traire. Et tolir as ors lor ordure Et metre-les en forme pure (jehan de meung, Roman de la Rosé, vers 17049)
47. Etudiez ici les propriétés du mélange d’or et d’argent nommé électre. (Cf. Pausanias, Lib. Elida. Cap. XII).
48. Un vieil auteur anonyme décrit ainsi naïve­ment cette opération: « L’artiste met la matière dans un matras, et ayant bien bouché le vaisseau, il donne feu lent par trente jours et nuits, et deux fois la semaine il fait ténèbre en bas avec une patte de lièvre. » (Ms. Arsen. n. 18: bis. Tome I, p. 67).
49. Voy. premier traité de Saint Thomas, chapi­tre V, note 29. Qu’on se souvienne que la pre­mière sorte de feu doit être administrée clibaniquement, la seconde géométriquement, suivant flamel et artéphius.
50. Suivant d’espagnet, (opus cit. can. 42), c’est un travail d’Hercule. Voir à ce sujet rupescissa, pic de la mirandole, isaac, guy de montanor et northon dans leurs oeuvres alchimiques, maier, (Arcana arcamssima). albert le grand (De Al-chymia) et raymond lulle (Theorica Testam).